Dettes, pensions, biens immobiliers… Est-on lié à notre ex à vie malgré le divorce ?
On se promet fidélité et soutien mutuel à vie. On construit un foyer. On bâtit une famille. On contracte des prêts immobiliers, des crédits à la consommation. Puis les disputes remplacent la lune de miel, le couple part à vau-l’eau, et on demande le divorce comme dans plus d’un mariage sur deux (selon les chiffres officiels de 2020).
Si juridiquement le fait de divorcer supprime tous les liens entre les deux anciens époux, restent les chaînes financières. Certains aspects doivent être pris en compte pour éviter les mauvaises surprises comme celle qui a pris de court Christelle Gillot, obligée de rembourser les 600.000 euros de dettes contractées par son ex-mari.
Des ex-époux solidaires devant la banque
Pendant le divorce, ce dernier ne s’est pas occupé de la désolidarisation des crédits. Une fois qu’il s’est retrouvé sans revenu, c’est donc vers son ex-femme que la banque s’est tournée pour le remboursement. Car quand l’un des époux contracte un crédit immobilier ou un prêt à la consommation, « tant qu’il n’est pas disproportionné par rapport au train de vie du ménage et contracté pour le bien du foyer », « les deux époux sont soumis à la solidarité », explique Anaïs Foix, avocate au barreau de Bordeaux et intervenant en droit de la famille.
Cette solidarité ne s’annule pas au moment du divorce, il faut en faire la réclamation au créancier. « Quand elle prête à deux débiteurs, c’est intéressant pour la banque, donc quand on divorce, en demandant la désolidarisation des époux, on lui demande de se priver d’un des débiteurs, elle peut refuser si elle considère que la situation financière ne permet pas d’assurer le remboursement du crédit », précise l’avocate.
Et « même si un juge considère que c’est à l’autre époux de rembourser, cette décision de justice n’est pas opposable à la banque », ajoute Angélique Delagarde, du cabinet Jadde Avocats. Cette décision du juge offre seulement la possibilité de faire un recours contre son ex pour réclamer des dommages et intérêts. Mais c’est une autre démarche et si votre ex n’a plus de fonds, « c’est perdu », prévient-elle. L’avocate spécialisée en droit de la famille relève que si « en pratique, ce type de demandes de désolidarisation sont souvent faites en matières immobilières », c’est moins le cas sur les crédits à la consommation.
Concernant ces crédits, il existe une exception à la règle : si un des époux s’endette pour des biens qui ne sont pas dans l’intérêt de la famille, « par exemple une voiture hors de prix ou un sac à main de luxe, l’autre époux peut demander de ne pas payer », précise Angélique Delagarde.
Dettes fiscales et biens immobiliers
Autre lien qui peut subsister malgré le divorce : les dettes fiscales. C’est l’impôt qui est dû au Trésor public. « Sinon, ça serait trop facile de divorcer pour y échapper », soulève Angélique Delagarde.
La séparation des biens immobiliers peut aussi prendre du temps, surtout si les époux ou ex-époux ne sont pas d’accord sur la répartition. On peut alors se retrouver attaché à son ex pendant des mois, voire des années, parfois jusqu’au partage judiciaire qui laisse le soin à un juge de trancher.
Quand il y a des enfants à charge, la situation se complique. « Les enfants sont un sujet financier, en plus d’être un sujet moral pour les époux », pointe Anaïs Foix. Et « même quand ils sont majeurs, peuvent rester à charge s’ils font des études par exemple, le montant de la pension alimentaire peut être revu à la hausse, et quand il devient majeur, celui qui verse la pension peut vouloir la payer directement à l’enfant et là encore, cela peut entraîner une nouvelle procédure judiciaire », ajoute l’avocate bordelaise.
Notre dossier sur le divorce
Pour éviter les mauvaises surprises et les désagréments après le divorce, les époux doivent bien penser aux démarches de désolidarisation auprès de leurs créanciers et se mettre d’accord autant que possible sur la séparation des biens et les frais engagés pour leurs enfants. « Si on veut être protégé, le mieux c’est de solder ses crédits avant le divorce, il vaut mieux prévoir », conseille enfin Angélique Delagarde.