Derrière l’arrestation de Mohamed Amra, la question des « super-prisons » pour narcotrafiquants
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Le gouvernement veut, comme ses semblables, l’enfermer dans une prison de haute sécurité pour les narcos les plus dangereux : Mohamed Amra, arrêté ce samedi en Roumanie après une évasion meurtrière en mai, est devenu le symbole des narcotrafiquants à mettre sous cloche.
Les Français « ne comprennent pas qu’il y ait des téléphones portables en prison » ou qu’on puisse « s’évader de prison et exécuter de sang-froid deux agents pénitentiaires », lançait ce mois-ci le ministre de la Justice, Gérald Darmanin. Il avait déjà annoncé en janvier une future prison de haute sécurité réservée aux « 100 plus gros narcotrafiquants ».
Mis à l’« isolement total »
A ce sujet, le garde des Sceaux fait sans cesse référence à l’évasion sanglante du multirécidiviste Mohamed Amra. Le 14 mai 2024, deux agents pénitentiaires avaient été tués et trois autres blessés lors de l’attaque ultraviolente de leur fourgon au péage d’Incarville (Eure) pour libérer le narcotrafiquant trentenaire, soupçonné d’avoir commandité des meurtres depuis sa cellule.
La super-prison doit voir le jour en juillet. Le lieu choisi doit être dévoilé prochainement. « Quatre millions d’euros » ont été débloqués pour cet établissement rénové, dont les pensionnaires seront « mis à l’isolement total » dans un lieu « inviolable », promet Darmanin. Il y sera « absolument impossible de se faire livrer téléphone ou drogue », prédit encore le garde des Sceaux.
La question des transferts de prisonniers
« On ne voit pas de problème sur ce projet de prison haute sécurité, à partir du moment où on y met les moyens – en termes de personnel, de formation – pour pouvoir les mettre sous cloche », indique samedi à l’AFP Dominique Gombert, secrétaire général adjoint de FO Justice, un des organes représentatifs de l’administration pénitentiaire. « Il faut voir comment on va fonctionner à l’intérieur de ces établissements, mais notre organisation défend depuis plus de 30 ans les établissements spécialisés et adaptés, donc ça va dans ce sens-là », réagit également Emmanuel Chambaud, secrétaire général UFAP-UNSa Justice.
Mais au-delà de ces bunkers de haute sécurité, Dominique Gombert appelle à un changement de « paradigme » en matière de transferts. Car au moment de son évasion, Mohamed Amra avait été extrait de sa cellule pour être amené chez un juge d’instruction pour y être interrogé. « On parle d’armer un peu plus nos collègues qui vont faire ces extractions, mais ce ne sera pas la solution », expose le syndicaliste de FO. « Quand vous avez des collègues qui font, encore, 600 ou 700 kilomètres dans la journée pour 5 minutes d’audience, est-ce qu’on peut continuer à fonctionner comme ça ? Il faut changer de manière de voir les choses », assène-t-il.
Notre dossier sur les narcotrafiquants
Emmanuel Chambaud plaide pour un « renforcement des escortes quand on devra sortir les détenus », « le développement des visioconférences », ainsi que « la possibilité donnée au magistrat de pouvoir entendre le détenu sur les établissements ».