France

Confinement, trois ans après : Méditation, conseils, suivi psy… Les applis de santé mentale ont-elles encore la cote ?

« Petit Bambou pour les enfants, c’est formidable. » Début mai 2020, lors d’un live Facebook en plein confinement depuis sa maison du Cap-Ferret, Guillaume Canet vante l’application de méditation Petit Bambou à ses abonnés. « Elle permet de faire des exercices de respiration le soir et de s’endormir. C’est vachement bien. » Une sacrée pub – non sponsorisée – pour la petite boîte d’une vingtaine de personnes basée dans le nord de la France.

Comme l’acteur, de nombreux Français se sont mis à utiliser des applications de méditation, de bien-être, de conseils ou de suivi psychologiques lors du confinement, que ce soit pour trouver le sommeil, mieux appréhender ses émotions, lâcher prise sur l’agitation quotidienne ou pratiquer la pleine conscience.

Une explosion des téléchargements

« On a eu une explosion de l’utilisation de l’appli pendant le confinement », atteste Vincent Bouton, directeur des opérations de Petit Bambou, première application française de méditation. Un mois après le début du premier confinement, le nombre d’utilisateurs de la plateforme a été multiplié par deux. « Les programmes les plus suivis étaient ceux sur le sommeil, la santé mentale et le travail. » Pas étonnant puisque pendant cette période, 20,1 % des Français ont déclaré des symptômes dépressifs et 16,9 % des symptômes d’anxiété, selon une étude de l’Inserm et de l’Université de Bordeaux.

Du côté de l’application de soutien psychologique Mon Sherpa, l’explosion des téléchargements durant ce temps enfermé est encore plus impressionnante, passant de 15.000 avant le confinement à 150.000 pendant. « Ces chiffres sont un peu biaisés parce qu’on a rendu notre application entièrement gratuite au moment du confinement », reconnaît cependant Fanny Jacq, psychiatre chez Qare et créatrice de l’application.

Afin de coller aux besoins des Français, des exercices dédiés au confinement ont même été créés pour l’occasion, tels que « comment vivre le confinement quand on est isolé ? », « comment gérer ses problèmes d’addiction ? », ou encore « comment gérer l’angoisse liée au coronavirus ? » Des programmes largement consultés pendant cette période.

Prendre conscience de son état mental

« Les gens ont utilisé ce moment pour se recentrer sur eux-mêmes, analyse Vincent Bouton. Il fallait trouver des solutions pour se libérer de ses ruminations et de sa charge mentale. » Selon Fanny Jacq, il y a eu une prise de conscience du fait que la santé mentale est aussi importante que la santé physique. « On se rend compte que sa santé mentale peut être fragilisée alors on va la muscler, un peu comme on le fait avec le sport. »

Cette prise de conscience a-t-elle une résonance aujourd’hui ? Après le confinement, le ministère de la Santé a créé une application permettant de suivre l’évolution de son état psychologique. Son nom : Jardin Mental. « A la base, l’application a été pensée pour les patients qui ont un suivi psychologique, pour les aider à suivre leurs symptômes, explique Antoine de Zélicourt, responsable de la plateforme. Et progressivement, on a eu de plus en plus d’utilisateurs qui n’avaient aucun suivi psychologique. »

Ainsi, aujourd’hui, la moitié des utilisateurs de Jardin Mental n’ont pas de suivi thérapeutique. En recensant leurs émotions, telles que leur anxiété, leur colère ou leur tristesse, ils peuvent progressivement se rendre compte de leur état mental. « Faire prendre conscience qu’on souffre d’un burn-out ou d’une dépression n’était pas notre but premier, mais c’est une bonne chose », se réjouit le responsable de l’application.

De nouveaux adeptes de la méditation

Selon une étude MoiJeune de 20 Minutes, réalisée en partenariat avec Opinionway et publiée le 20 février dernier, 42 % des 18-30 ans interrogés disent qu’ils prennent « davantage de temps calme rien que pour eux, sans rien faire de particulier » par rapport à la période précédant la crise du Covid-19. Un chiffre que viennent confirmer ceux des différentes applications. « Trois ans après le confinement, il n’y a pas eu d’abandon majeur, témoigne le directeur des opérations de Petit Bambou. On se rend compte qu’on a plutôt acquis des primo-méditants. »

Si 150.000 personnes avaient téléchargé Mon Sherpa pendant le confinement, ils sont aujourd’hui 300.000 à avoir le logo du petit bonhomme au bonnet péruvien orange parmi leurs applications. Les programmes les plus utilisés sont ceux sur l’anxiété et la dépression. « Si l’application ne va pas soigner des idées suicidaires, une dépression grave ou une schizophrénie délirante, les exercices peuvent par contre aider à réguler des troubles du sommeil ou à essayer de contrôler les premiers symptômes de dépression ou d’anxiété », précise la créatrice de Mon Sherpa.

Autre nouveauté du monde d’après-confinement : « Les gens ont commencé à se poser des questions sur leurs valeurs », explique Fanny Jacq. La psychiatre a donc ajouté à son application un programme sur la thérapie des valeurs. Un programme bref pour connaître ses valeurs de vie et savoir si on vit en cohérence avec elles. Une autre prise de conscience possible.