Condamnation de Sarkozy : La peine à exécution provisoire est-elle justifiée ?
Nicolas Sarkozy a été déclaré coupable d’association de malfaiteurs dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007 et condamné à cinq ans de prison ferme. Selon un sondage Ifop paru le 4 avril pour Ouest-France, deux tiers des Français (64 %) se disaient contre une modification de la loi qui viserait à supprimer l’exécution provisoire pour un élu condamné en première instance.
La décision rendue est sans précédent. Nicolas Sarkozy, reconnu coupable d’association de malfaiteurs dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007, a été condamné à cinq ans de prison ferme, avec un mandat de dépôt différé et une exécution provisoire. Cette exécution provisoire prive son appel de l’effet suspensif qui aurait pu lui permettre d’échapper à la prison en attendant une condamnation définitive.
Au-delà de la peine infligée, c’est surtout l’exécution provisoire qui a suscité de vives réactions au sein de personnalités politiques de droite et d’extrême droite, remettant en question l’impartialité des juges. Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, a qualifié ce principe de « grand danger » pour la présomption d’innocence, ayant elle-même été condamnée en première instance à cinq ans d’inéligibilité dans l’affaire des assistants parlementaires européens.
François-Xavier Bellamy, eurodéputé et numéro 2 des Républicains, a aussi exprimé sur X son indignation face à « un traitement exceptionnel, que rien ne justifie », évoquant la nature politique de ce jugement. Un élu du sud de la France a déclaré à 20 Minutes avoir « l’impression que la justice voulait se payer Sarkozy » et qu’il semblait y avoir une volonté de lui nuire personnellement.
Ludovic Friat, président de l’Union syndicale des magistrats (USM), a déclaré à 20 Minutes qu’il comprenait que Nicolas Sarkozy se défende, mais regrettait qu’un ancien président de la République laisse entendre qu’il aurait été condamné pour ses idées et non pour ses actes. Selon lui, l’idée de vengeance des magistrats est « une fable », visant à éluder des faits graves tels que la recherche de financements auprès d’un gouvernement étranger considéré comme terroriste.
Friat a également critiqué la « rhétorique trumpienne systématique » qui présente les juges comme des ennemis politiques. Il a réaffirmé que les juges sont des arbitres appliquant la loi votée par les politiques. Répondant à des allégations d’un avocat de Sarkozy au sujet de la présidente du tribunal, Nathalie Gavarino, Friat a rejeté toute idée de vendetta, affirmant que la magistrate avait pris position pour défendre des collègues.
Nicolas Hervieu, juriste en droit public et enseignant à Sciences Po, a noté que la critique d’un prétendu « gouvernement des juges » reflète une « intolérance profonde aux contre-pouvoirs ». Selon lui, celuici se manifeste par une résistance à l’idée que même un élu populaire puisse répondre de ses actes devant la loi, ajoutant que « plus ces personnes sont puissantes, plus elles sont intolérantes à l’idée d’être contrôlées par d’autres ».
Selon un sondage Ifop paru le 4 avril pour Ouest-France, 64 % des Français se sont déclarés opposés à une modification de la loi visant à supprimer l’exécution provisoire pour un élu condamné en première instance.

