France

Condamnation de Marine Le Pen : Soutien à la justice, « interrogations »… Comment réagissent les autres camps

A l’Assemblée nationale,

C’était ambiance jour d’après, ce mardi à l’Assemblée nationale, au lendemain de la condamnation de Marine Le Pen à cinq ans d’inéligibilité et quatre ans de prison, dont 2 ferme, dans l’affaire des assistants parlementaires européens. Une peine qui exclut – sauf surprise – la présidente du Rassemblement national de la prochaine campagne présidentielle.

La cheffe du RN n’y va pas par quatre chemins en conférence de presse : c’est une « bombe nucléaire » du système selon Marine Le Pen, dont les déflagrations se sont fait ressentir jusque dans les couloirs du Palais Bourbon. Difficile pour les autres députés de passer à côté de l’éléphant dans la pièce, alors que tous ne savent pas encore sur quel pied danser.

Soutien inconditionnel à la justice

De la gauche jusqu’au gouvernement, les députés, à plusieurs reprises, tiennent à apporter leur soutien aux magistrats, et plus particulièrement à la présidente, Bénédicte de Perthuis, placée sous protection policière. Face à ces attaques, Mathilde Panot (LFI) dénonce des « méthodes d’extrême droite d’intimidation », quand le MoDem parle de juges « mis au pilori ». Benjamin Lucas, député écologiste des Yvelines, s’offusque quant à lui des « campagnes médiatiques des médias Bolloré ».

Comme beaucoup de ses collègues à gauche, ce dernier met en garde contre les réactions à l’international de « l’amicale fasciste » : « Quand le Kremlin, Orban et Trump font pression pour remettre en cause notre modèle, nous serons toujours du côté des magistrats. » Seule la Droite Républicaine n’a pas réagi aux menaces qui visent notre système judiciaire, son président Laurent Wauquiez affirmant même ce lundi qu’il n’était « pas sain qu’une élue soit interdite de se présenter à une élection. »

La gauche contre « le système » Le Pen

« Marine Le Pen est une justiciable comme les autres », martèle Arthur Delaporte, député socialiste, en conférence de presse. « Pendant plus de dix ans, le Rassemblement national a mis en place un système qui a permis de détourner plus de 4 millions d’euros. » Chacun son tour, l’ensemble des groupes du Nouveau Front Populaire prend le temps de rappeler aux journalistes l’ensemble des faits qui incriminent Marine Le Pen et l’ensemble du parti.

A l’heure où l’extrême droite a abandonné le discours de la sévérité pour se poser en victime de la « tyrannie des juges », Mathilde Panot les couronne « rois des hypocrites », tout en rappelant que le Rassemblement national a grandi « sur le dos du contribuable français ».

Unie, la gauche interpelle l’exécutif, bien trop « timide » selon le député communiste Stéphane Peu. La présidente du groupe écologiste, Cyrielle Chatelain, accuse François Bayrou de « reprendre les mensonges de l’extrême droite ».

Revenir sur l’exécution provisoire ?

Le Premier ministre « troublé » lundi, explique avoir des « interrogations » sur la question de l’exécution provisoire de l’inéligibilité, lui qui attend toujours son jugement en appel pour les mêmes faits : « Je considère, en tant que citoyen, que toute décision lourde de ce type devrait être susceptible d’un appel. » Marine Le Pen a déjà annoncé s’y pourvoir.

Une position qui fait grincer des dents dans son propre camp : « Nous ne sommes pas troublés » réplique Perrine Goulet, porte-parole du groupe MoDem à l’Assemblée. Dans les couloirs de l’Assemblée, les alliés macronistes n’apprécient pas tous cette hésitation. « Il nourrit la défiance à l’égard des institutions, c’est une pente glissante, avoue un député Renaissance. Si j’étais à sa place, je n’insulterai pas ceux qui vont bientôt me juger. »

Il flotte sur les bancs centristes un malaise, notamment sur la question de l’exécution provisoire de l’inéligibilité. « Certains commencent peut-être à regretter leur vote », tacle Charles de Courson, président du groupe Liot, déjà opposé en 2016 à la loi Sapin. Dans son groupe, comme au MoDem, la possibilité de revenir sur cette loi n’est plus un tabou, alors que François Bayrou explique devant les députés qu’il « peut y avoir une réflexion sur la question, qui doit appartenir au Parlement. » Ça tombe bien, Éric Ciotti a annoncé ce mardi qu’il déposera un projet de loi pour supprimer l’exécution provisoire d’une peine d’inéligibilité dans la niche parlementaire de son groupe, le 26 juin prochain.

Le camp présidentiel perd son épouvantail favori

Dans le camp macroniste, la mise entre parenthèses de Marine Le Pen pour la présidentielle pose une question épineuse : Comment va fonctionner le barrage républicain du second tour sans son meilleur ennemi ? Le député Renaissance Mathieu Lefèvre disait déjà lundi que « personne ne comprendrait qu’elle ne puisse pas se présenter à l’élection présidentielle ».

Notre dossier sur la condamnation de Marine Le Pen

Le ministre de la Justice Gérald Darmanin confirme et souhaite de son côté « des élections apaisées, où chacun puisse choisir son candidat ». Il souhaite que le jugement en appel de la présidente du Rassemblement national soit organisé « rapidement dans un délai raisonnable ». Plutôt Marine que Jordan au second tour, donc ?