Comment ce que l’on mange peut réduire les risques de dépression et améliorer nos humeurs

On le sait depuis de longues années, pour vivre longtemps et en bonne santé, l’alimentation joue un rôle crucial sur notre santé globale. A l’instar du célèbre régime méditerranéen. La recherche l’a démontré : il permet de réduire les risques de développer un ensemble de maladies métaboliques. Mais depuis quelques années, les scientifiques s’intéressent à la manière dans le contenu de nos assiettes influe sur notre santé mentale.
Si la junk food est associée au développement de maladies chroniques telles que l’obésité, le diabète, mais aussi de maladies cardiovasculaires, elle a aussi des effets délétères scientifiquement prouvés sur notre santé mentale. Et de nouvelles études démontrent à nouveau un lien entre malbouffe et dépression. Si mal manger peut affecter notre santé mentale, bien manger peut-il booster notre moral ?
Un lien entre alimentation ultratransformée et dépression et anxiété
Pas le temps de cuisiner, envie de plats réconfortants et gourmands : ces dernières années, les produits ultratransformés, riches en graisses, sucres et additifs, mais pauvres en nutriments, ont envahi nos placards et nos frigos, donc nos assiettes. Mais ces aliments mauvais pour notre corps sont également dangereux pour notre santé mentale. Une étude menée par une équipe de chercheurs australiens du Food & Mood Centre (centre de l’alimentation et de l’humeur) publiée début 2024 dans la revue BMJ a ainsi démontré la consommation accrue d’aliments ultra-transformés « était associée à un risque accru d’effets indésirables sur la santé, notamment de troubles mentaux ». Ils soulignent chez ces personnes un risque accru de 48 % de souffrir d’anxiété et de 22 % de développer des troubles dépressifs.
Et avec les effets de ce type d’aliments ultratransformés sur la dépression, un cercle vicieux s’enclenche, selon une étude menée par des chercheurs des universités de Bonn et Tübingen publiée il y a quelques semaines. « De nombreuses personnes souffrant de dépression accusent une perte générale d’appétit, souligne le Pr Nils Kroemer, coauteur de l’étude. D’autres en revanche ont plus d’appétit pendant un épisode dépressif et développent même des envies alimentaires, en particulier de sucreries ». Et dans de nombreux cas, « les envies de sucre sont davantage liées à la gravité générale de la dépression, en particulier aux symptômes d’anxiété », observe Lilly Thurn, autrice principale de l’étude.
Soigner son assiette pour soigner son moral
Pour l’équipe de chercheurs allemands, ces résultats suggèrent qu’une modification du régime alimentaire permettrait d’améliorer l’état mental des patients dépressifs. Soigner son assiette et son microbiote permettrait ainsi de soigner son moral. « Les thérapies ciblant la connexion entre l’intestin et le cerveau semblent particulièrement prometteuses pour l’avenir, avance Lilly Thurn. Les premières études ont déjà montré que le jeûne ou les aliments riches en probiotiques peuvent avoir un effet antidépresseur. Il a aussi été démontré que les personnes souffrant de dépression présentent des changements dans leur microbiote qui pourraient exacerber différents symptômes ».
Et c’est là que le fameux régime méditerranéen peut encore nous faire profiter de ses multiples bienfaits. C’est ce qu’a démontré dès 2018 une étude menée par les chercheurs de l’Inserm, selon laquelle l’adoption de ce régime spécifique, riche en fruits et légumes, poisson et céréales, et pauvre en viande rouge et exempt d’aliments ultratransformés, est associée à une diminution de 33 % du risque de dépression. « Ces résultats soutiennent l’hypothèse selon laquelle éviter les aliments pro-inflammatoires en faveur d’un régime anti-inflammatoire contribue à prévenir les symptômes dépressifs et la dépression », analyse Tasnime Akbaraly, chercheuse à l’Inserm en charge de l’étude. Des conclusions qui montrent aussi « l’importance de nos habitudes alimentaires dans la survenue de troubles dépressifs et encouragent à généraliser le conseil nutritionnel lors des consultations médicales », notamment en matière de santé mentale.
Des résultats confirmés y compris chez les patients plus jeunes dans une revue de treize études publiée en février dans les Nutrition Reviews, qui a montré que l’adoption du régime méditerranéen permettrait de diminuer les risques de dépression, d’anxiété et de trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) chez les enfants et les adolescents.
Ne pas dire adieu au plaisir pour autant
Bien sûr, cela ne signifie pas qu’il faut supprimer tous les aliments plaisir que peuvent être burgers, pizzas et autres glaces et douceurs qui flattent le palais. « La notion de plaisir reste primordiale, a rappelé Laetitia Proust Millon, diététicienne nutritionniste et coautrice de l’ouvrage Le grand livre de l’alimentation anti-inflammatoire (éd. Leduc). Il faut trouver le bon équilibre entre une alimentation quotidienne anti-inflammatoire saine, mais qui autorise des plats ou aliments un peu moins sains de temps en temps pour continuer à se faire plaisir en mangeant ».
L’alimentation doit s’envisager dans le cadre d’un équilibre global. Lorsque au quotidien, on mange équilibré, avec des repas composés d’aliments frais et bruts que l’on cuisine soi-même, on a bien mérité de s’accorder de temps en temps un dessert gourmand voire un fast-food. Et si vous vous demandez comment chouchouter votre microbiote grâce à votre assiette, misez sur les aliments fermentés, comme la choucroute fraîche, les conserves lacto-fermentées ou encore le kéfir, boisson fermentée. Des aliments riches en probiotiques, qui permettent de rétablir l’équilibre du microbiote intestinal.
Et en se composant une assiette riche en fruits et légumes de toutes les couleurs et aux propriétés anti-inflammatoires, on s’assure de couvrir nos besoins quotidiens en vitamines et nutriments essentiels à notre santé physique et mentale. Noix, avocats, chocolat noir et fruits de mer apporteront de la gourmandise à nos repas, mais aussi de bonnes graisses, du magnésium et des oméga 3 essentiels à notre bien-être général. Et en leur laissant la part belle dans nos assiettes, libre à nous de nous offrir de temps en temps et sans culpabiliser une bonne pizza, un burger ou une pâtisserie qui nous fait de l’œil. Les amateurs de cuisine se feront d’autant plus plaisir en concoctant des versions maison plus saines de ces plats et desserts à partir d’aliments bruts, sans additifs.