Collision en mer du Nord : Kérosène et cyanure de sodium dans la nature… Quels risques pour l’environnement ?
Les risques toxiques sont bien réels. Depuis la collision entre un pétrolier et un porte-conteneurs lundi en mer du Nord, les associations environnementales sont très inquiètes de l’impact de cet accident sur la faune et la flore. Les deux navires se trouvent à environ 16 kilomètres des côtes anglaises. L’ONG Greenpeace s’est dite « extrêmement préoccupée » par les rejets de substances toxiques dans l’environnement. Et il y a de quoi, les deux navires transportant chacun des produits particulièrement nocifs : du kérosène d’un côté et du cyanure de sodium de l’autre. Un membre d’équipage porté disparu n’a toujours pas été retrouvé. Une trentaine de blessés a été transportée à Grimsby, ville portuaire de 90.000 habitants située au sud de Hull, dans le nord de l’Angleterre. Que faut-il craindre ? 20 Minutes fait le point.
Le cyanure de sodium, c’est quoi ?
D’après le site spécialisé Lloyd’s List Intelligence, le porte-conteneurs portugais Solong qui serait à l’origine de la collision transporterait « une quantité non déterminée d’alcool » mais aussi « quinze conteneurs de cyanure de sodium ». Ce gaz inflammable est très toxique en cas d’inhalation et d’ingestion. Il est très utilisé dans l’exploitation de minerai et notamment de l’or. D’après l’Ineris, « environ 70 % de la totalité du cyanure de sodium produit dans le monde est utilisé à cette fin ». Son déversement dans les eaux de la mer du Nord pourrait avoir des répercussions dramatiques. D’après l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), le cyanure de sodium peut être mortel en cas d’ingestion, par contact cutané et par inhalation. Il est considéré comme « très toxique pour les organismes aquatiques » et « entraîne des effets néfastes à long terme ».
D’après Sciences et avenir, le contact de cyanure de sodium avec de l’eau peut créer de l’acide cyanhydrique, qui avait notamment servi à fabriquer le Zyklon B, gaz utilisé dans les camps d’extermination nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Il provoque la mort par asphyxie. En 2015, des explosions avaient frappé la zone industrielle du port de la ville de Tianjin, en Chine, où étaient entreposées d’importantes quantités de cyanure de sodium. L’accident avait fait plus de 170 morts et 800 blessés.
Quelle quantité de kérosène et quels dangers ?
L’autre navire impliqué dans cette collision est un pétrolier américain. La collision a entraîné un énorme incendie. D’après plusieurs témoins, un des réservoirs du « Stena Immaculate » contenant du kérosène a été brisé, ce qui a provoqué une fuite et fait craindre d’importants dégâts environnementaux. « Le kérosène qui a pénétré dans l’eau à proximité d’une zone de reproduction des marsouins est toxique pour les poissons et autres créatures marines », prévient Paul Johnston, scientifique des laboratoires de recherche de Greenpeace à l’université d’Exeter.

D’après le site Lloyd’s List Intelligence, le Stena Immaculate transportait environ 220.000 barils de kérosène. Pour l’heure, on ignore quelle quantité de kérosène s’est déversée en mer. Mais un risque de marée noire sur les côtes anglaises n’est pas à exclure. Une partie du kérosène a probablement brûlé. Un important incendie continue de libérer des substances extrêmement toxiques dans l’air et dans l’eau. D’après l’ONG Robin des bois, la substance serait du Jet A-1, un carburant d’aviation notamment utilisé par les militaires, qui a la particularité « d’inclure des additifs antistatiques chimiques comme des organophosphorés ».
Quels risques sur l’environnement à long terme ?
D’après Tom Webb, maître de conférences en écologie marine et en conservation à l’université de Sheffield, la zone où a eu lieu la collision est connue pour la richesse de sa faune, notamment les échassiers et autres oiseaux d’eau. « La pollution chimique résultant d’incidents de ce type peut avoir un impact direct sur les oiseaux et peut également avoir des effets à long terme sur la chaîne alimentaire marine », assure le scientifique. L’ONG Robin des bois ajoute que l’embouchure du Humber est « un site d’hivernage d’importance internationale pour des oiseaux menacés comme les avocettes et les pluviers dorés ». Quant aux plages voisines de Donna Nook, elles « abritent la plus grande colonie de phoques gris d’Angleterre et sa protection est d’importance mondiale », rappelle l’ONG.
L’incident fait redouter une catastrophe écologique majeure. Un porte-parole du Premier ministre britannique Keir Starmer a qualifié la situation « d’extrêmement préoccupante », tandis que les garde-côtes ont lancé une « évaluation » pour décider des « mesures de lutte contre la pollution probablement nécessaires » après la collision.