Colère des agriculteurs : « On ne va pas crever en silence »… Un céréalier explique pourquoi il est opposé au Mercosur
«Voilà l’outil d’un agriculteur : un ordinateur et une imprimante. Je passe plus de temps au bureau que dans les champs ». Les yeux rivés à son écran, Kévin Brouillard laisse échapper un soupir. Cet agriculteur de 32 ans se sent « étouffé ». Étouffé par les nombreuses normes administratives européennes et françaises, étouffé par les dettes, étouffé par la concurrence déloyale qui fait chuter le prix de sa production.
A la tête de 350 hectares dans l’Essonne, il cultive des céréales, des betteraves, du maïs et des oignons. Kevin Brouillard a hérité ses terres et son savoir-faire de son père, décédé en 2023. « Même lui, à l’époque, il avait envie d’arrêter… Le métier d’agriculteur, en un mot, c’est : galère. Galères sur galères », assène Kévin.
« La goutte d’eau qui fait déborder le vase »
En l’espace de trois ans, la tonne de blé est passée de 300 à 180 euros, à quoi s’ajoutent de mauvais rendements liés au dérèglement climatique. L’agriculteur se rémunère 1.200 euros les bons mois, mais durant l’été, il ne parvient pas à se verser de salaire, « et ça ne va pas aller en s’arrangeant avec la signature du Mercosur », estime-t-il.
Au quotidien déjà difficile, se greffe la peur d’une concurrence déloyale venue d’Argentine et du Brésil, où les productions sont soumises à moins de restrictions qu’en France. La ratification du traité de libre-échange du Mercosur le 6 décembre 2024, permet d’importer plus de denrées d’Amérique Latine en Europe, avec des droits de douane réduits. Pour rester attractifs sur le marché mondial, les agriculteurs doivent adapter leur prix.
Pour Kévin Brouillard, c’est « la goutte d’eau qui fait déborder le vase ». Déjà présent lors des mobilisations agricoles en janvier 2023, il l’assure, il continuera à « se battre » et a déjà prévu d’autres actions avant la fin de l’année. Son bonnet jaune de la Coordination Rurale enfoncé sur la tête, il le répète, il ne laissera pas « les agriculteurs crever en silence ».