Chute du gouvernement Barnier : Cazeneuve, Cresson, Attal… Les Premiers ministres les plus éphémères de la Ve République
La politique française, c’est un peu comme les données climatiques. Chaque année affiche de nouveaux records que l’on pensait ne jamais pouvoir battre. Ce fut encore le cas mercredi soir quand une motion de censure a visé Michel Barnier et son crew. En ne tenant que 90 jours en place, le Premier ministre nommé par Emmanuel Macron a battu un record historique, devenant le chef de gouvernement le plus éphémère de la Ve République. Il balaye le record établi par Bernard Cazeneuve, qui avait siégé à la fin du mandat de François Hollande. Le record de 2.279 jours établi par Georges Pompidou a de beaux jours devant lui.
Michel Barnier – 90 jours
Le Premier ministre avait été sorti de sa retraite lorsqu’il a été nommé par Emmanuel Macron à l’issue de semaines de tergiversation. Promis à une impossibilité de gouverner, Michel Barnier a fait face à une Assemblée nationale morcelée, coincé entre un front de gauche arrivé en tête au soir des élections législatives et une extrême droite qui n’avait jamais été aussi puissante. Mission impossible qui lui a coûté son poste. Michel Barnier n’aura tenu que 90 jours avant de tomber en usant du 49.3 pour tenter de faire passer le budget de la Sécurité sociale. A 73 ans, il bat aussi le record du Premier ministre le plus âgé.
Bernard Cazeneuve – 155 jours
Il avait la lourde tâche d’être nommé Premier ministre d’un des présidents de la République les moins populaires de la Ve République. Bernard Cazeneuve, alors ministre de l’Intérieur, avait été propulsé à Matignon pour tenter de sauver la fin du mandat de l’ancien secrétaire du Parti socialiste. Nommé le 6 décembre 2016, il démissionne après la victoire d’Emmanuel Macron aux élections présidentielles, le 10 mai 2017, soit un règne de 155 jours.
Gabriel Attal – 240 jours
Il n’y a pas à aller très loin pour trouver le médaillé de bronze de l’éphémère. Nommé par Emmanuel Macron en remplacement d’une Élisabeth Borne fragilisée, Gabriel Attal était devenu le plus jeune Premier ministre (34 ans), devançant de trois ans Laurent Fabius, nommé à 37 ans en 1984. Le socialiste était resté 611 jours à Matignon. Gabriel Attal ne fera pas aussi bien et sera victime de la volonté d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale. Battu lors d’élections législatives anticipées, le camp macroniste doit laisser les rênes.
Édith Cresson – 323 jours
Elle avait été la première femme française à siéger comme Premier ministre. Un vrai signal fort envoyé par François Mitterrand qui avait choisi son ancienne ministre de l’Agriculture et des Affaires européennes pour siéger à Matignon. Malheureusement pour la socialiste, le règne ne durera pas longtemps. Nommée le 15 mai 1991, elle est démise de ses fonctions le 2 avril 1992, soit 323 jours plus tard. Depuis, seule une autre femme a été Premier ministre de la France. Choisie par Emmanuel Macron, Élisabeth Borne passera 603 jours au pouvoir, lui offrant une place dans le top 10 des Premiers ministres les plus éphémères.
Maurice Couve de Murville – 345 jours
Il est le moins connu de cette liste. Sans doute parce qu’il est le plus ancien. Fidèle ministre des Affaires étrangères de Charles de Gaulle, Maurice Couve de Murville est nommé Premier ministre le 10 juillet 1968 dans la foulée de la démission de Georges Pompidou. Fort de ses 2.279 jours au pouvoir, l’ancien bras droit du général de Gaulle laisse un grand vide. Maurice Couve de Murville restera en poste 345 jours, soit moins d’un an, et devra démissionner en 1969 après la démission du président de Gaulle, victime de la victoire de ses opposants à un référendum en avril 1969. On notera au passage que derrière Pompidou, c’est un ministre récent qui détient un record de longévité. François Fillon est resté 1.820 jours au pouvoir, sous les ordres de Nicolas Sarkozy. La droite tient le record de longévité. Mais aussi celui de l’éphémère.
Pierre Bérégovoy – 361 jours
L’homme de gauche Pierre Bérégovoy avait été nommé par François Mitterrand le 2 avril 1992, en remplacement d’Édith Cresson. Censé rassurer la population avec son profil pragmatique, le Premier ministre qui était alors le plus âgé de la Ve République (67 ans) finit par quitter Matignon en mars 1993 après un peu moins d’un an comme Premier ministre, après la lourde défaite de la gauche aux législatives. Il reste aux affaires politiques en dirigeant la mairie de Nevers et en gardant son poste de député de la Nièvre. Un mois après son départ de Matignon, Pierre Bérégovoy se suicide, alors qu’il est visé par des affaires de corruption.