Ces relous qui bourrent la poubelle jaune avec des énormes cartons
Les impatients de l’aéroport qui attendant trois quarts d’heures debout avant d’embarquer dans leur avion, les ahuris de Strava qui nous gonflent avec leur temps au marathon de Paris, les vélotafeurs avides de drama sur les réseaux… L’idée de départ est simple : s’intéresser à ces petits gestes « relous » qui nous titillent au quotidien. Aujourd’hui, rendez-vous dans le local poubelle avec vos voisins qui prennent un malin plaisir à remplir le bac jaune avec le carton de leur aspirateur tout neuf (ou n’importe quel autre objet hors dimensions).
Le fait relou
Votre journée de télétravail bat son plein, et pour le quatre-heures, vous décidez de porter le coup de grâce au paquet de gâteau qui traîne dans le placard. Au moment de jeter le cadavre de la boîte dans votre poubelle de tri, vous constatez qu’elle déborde et vous vous dites que, somme toute, il serait grand temps d’arrêter de procrastiner.
Armé du sac de déchets recyclables, vous partez en expédition dans le local dédié de votre immeuble. La dernière collecte date de la veille, le bac jaune est probablement vide, y aura plus qu’à jeter le bazar vite fait, bien fait, et hop, on n’en parle plus. Mais en arrivant, stupeur. Deux énormes cartons jetés tels quels par le voisin relou de la copro obstruent la poubelle, ruinant votre entreprise de sauvetage de la planète.
Pourquoi c’est giga relou ?
Trois choix s’offrent alors à vous : remonter bredouille avec le sac plein, tout jeter dans le bac des déchets ménagers, ou prendre le temps de faire ce que l’autre n’a pas fait, à savoir déplier ces putains de cartons. L’inconfort, la faillite morale ou le travail bénévole, Carapuce, Bulbizarre ou Salamèche, dans tous les cas, il s’agira d’une défaite. Le choix de déplier gracieusement les cartons pour gagner un peu de place dans le bac peut se transformer en âpre bataille pour peu que votre ennemi soit un reste de colis Vinted enveloppé dans un rouleau de scotch double face. Sécuriser un paquet, ok, mais le faire sans céder à la névrose, c’est mieux. Bref, tout ça coûte du temps et de l’énergie alors qu’à la base, vous n’étiez pas venu pour souffrir.
Que dit la science ?
Étonnamment, ses méfaits ne sont pas les plus préjudiciables dans cette histoire de bac jaune. Hélder de Oliveira, directeur de l’Ordif (Observatoire régional des déchets en Île-de-France), en a un autre dans le viseur. « Le vrai relou dans l’immeuble, c’est celui qui va mettre sa poubelle résiduelle dans le bac jaune. Parce que celui-là, il va tuer le travail de tous les autres. C’est un problème que l’on rencontre beaucoup à Paris. Et ça, c’est très démotivant. » Non seulement il met en péril le bien-fondé de la poubelle, mais aussi de la benne dont elle augmente les risques d’être recalée à l’entrée du centre de tri et renvoyée pour le traitement d’incinération. De l’argent de perdu et du CO2 de gagné.
Les arguments des relous
A côté de lui, le relou aux gros cartons est à classer parmi les bons élèves, voire à ranger dans le camp des victimes d’un système défaillant sur le plan logistique. comme le souligne le directeur de l’Ordif. « S’ils bourrent le bac jaune, c’est qu’il est trop petit. La Ville de Paris a mis en place l’année dernière une troisième collecte hebdomadaire pour justement faire face à ce problème de place, qui est directement lié à ces gros emballages comme le carton. Oui, le voisin peut être énervant avec son gros carton dans le bac jaune, mais quelque part, il a voulu bien faire. » A mettre en perspective avec le chiffre de seulement 40 % de carton capté en centre de tri. « Les gens ne trient pas assez le carton », le relou le fait. Mais à quoi bon s’il empêche les autres d’en faire autant ?
« Ça vaaaaaaaaa », répond Julien, qui se classe parmi les bons élèves en la matière mais concède quelques jets de cartons pas dépliés sous le coup de la fatigue ou par pure flemme. « Je suis le relou de l’AG de copropriété qui gère tous les sujets pénibles et qui ouvre au plombier pour la fuite d’eau dans la cave, je fais donc ma part de travail pour l’immeuble. »
Le truc infaillible pour faire comprendre au relou qu’il est relou ?
Il faudrait déjà pouvoir l’identifier. Jeter ses poubelles est un acte assez confidentiel, et pour peu qu’on croise quelqu’un dans le local poubelle, il faudrait un culot surhumain pour que celui-ci foute un carton 60x60x40 dans le bac en regardant le témoin de la scène droit dans les yeux.
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Bref. S’il s’agit d’un colis, le coupable a peut-être laissé son nom sur la scène du crime. La suite appartient à l’imagination : vous pouvez monter poser le carton (vide, on n’est pas dans Seven) avec un post-it passif-agressif devant la porte du relou ou attendre de le croiser (éventuellement à l’AG de la copro s’il s’agit de Julien) pour le réprimander. La réalité, c’est que vous n’y pouvez pas grand-chose.