Bretagne : « Je ne suis pas un shérif »… Face aux cambriolages, ce maire patrouille la nuit dans sa commune

Pour savoir ce qui se raconte dans un bourg, rien ne vaut de pousser les portes du troquet du coin et de s’attabler au comptoir. Mais quand celui-ci est fermé, la boulangerie sert aussi de lieu de causerie. Et dans celle d’Iffendic (Ille-et-Vilaine), petite commune rurale située à l’ouest de Rennes, on parle beaucoup en ce moment de cambriolages. « Les gens ont peur, surtout les personnes âgées, et tout le monde fait attention », confie Laëtitia, la gérante des lieux. Depuis quelques semaines, la petite bourgade de 4.600 habitants ainsi que des patelins voisins font face à une vague inédite de cambriolages. « Je suis maire depuis vingt ans et il n’y en a jamais eu autant », assure Christophe Martins.
Cela a commencé au début du printemps par des vols chez des particuliers en pleine journée. « Ils ont carrément découpé la clôture de mon voisin pour lui voler son salon de jardin et son barbecue », confirme la fleuriste. Les jours suivants, les camionnettes des artisans ont également été ciblées ainsi que plusieurs commerces dont la petite supérette, un salon de coiffure et la crêperie.
« C’était quasiment tous les deux jours à un moment », indique Christophe Martins, qui a déjà été victime lui-même de trois cambriolages et a dû installer un système d’alarme alors qu’il habite « en pleine campagne. » « Avant, on ne fermait jamais sa porte à clef mais les zones rurales sont désormais aussi touchées que les villes par les cambriolages », souligne l’élu du Parti radical de gauche.
« Je n’ouvre à personne le soir »
Dans le bourg, cette inquiétante série de délits suscite beaucoup d’émoi. Comme chez ses trois retraitées qui profitent du soleil généreux de cette fin avril sur un banc. « C’est triste car c’est très calme ici d’habitude mais là ça ne s’arrête pas, confie Odette. J’espère que les gendarmes vont rapidement interpeller les auteurs mais en attendant, je n’ouvre à personne le soir. » Pour rassurer ses ouailles, Christophe Martins et quelques collègues élus patrouillent désormais la nuit en voiture dans les secteurs touchés. « Je n’ai pas été élu maire pour ça et c’est beaucoup plus sympa de célébrer un mariage mais ça fait aussi partie de nos missions », indique-t-il.
Christophe Martins n’entend pas pour autant se substituer aux gendarmes, accusés par certains habitants sur les réseaux sociaux de ne rien faire pour endiguer le phénomène. « Je ne suis pas un shérif, ni un justicier et je ne vais pas arrêter les cambrioleurs, prévient l’élu. Je patrouille juste certaines nuits pour voir s’il n’y a pas des personnes qui rôdent ou pour relever les plaques de véhicules qui paraissent suspects. »
L’éclairage public rallumé la nuit
A l’entendre, son action n’a d’ailleurs rien d’exceptionnel. « Je ne suis pas le seul maire à tourner dans son bourg la nuit, cela arrive souvent dans les petites communes ou à la campagne », assure-t-il. Comme tant d’autres élus, Christophe Martins s’est également résolu à installer quatre caméras de vidéosurveillance dans sa commune. « Pas que pour les cambriolages mais aussi pour les tags, les dépôts sauvages de déchets et toutes ces incivilités qui usent les habitants », détaille l’édile.
Dans quelques jours, il remettra également l’éclairage public la nuit qu’il avait coupé il y a plusieurs mois pour des raisons économiques et écologiques. « Je ne suis pas persuadé que cela aura un effet mais si ça permet au moins de rassurer les habitants », concède le maire, qui aimerait surtout que cette vague de cambriolages cesse. Tout comme la boulangère. « On a justement quitté Rennes il y a quelques années après avoir été victime d’un cambriolage donc on n’est pas venu ici pour revivre ça », témoigne Laëtitia, qui « croise les doigts » pour ne pas être la prochaine sur la liste.