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« Angry white men » : Le ressentiment des hommes blancs alimenté par l’administration Trump

Mercredi, la présidente de l’Agence fédérale américaine pour l’égalité des chances en matière d’emploi (EEOC), Andrea Lucas, a invité les hommes blancs à solliciter une indemnisation s’ils estiment avoir subi une discrimination professionnelle pour la terrible injustice d’être… un homme blanc en 2025. En juin 2023, la Cour suprême américaine a fini par mettre fin aux pratiques de discrimination positive.


Mais quelle période étrange nous vivons où des Américaines occupent des postes de responsabilité, où les personnes racisées exercent leur travail sans être soumises à l’esclavage, et où les personnes en situation de handicap peuvent postuler aux mêmes emplois que celles valides ? Pour l’administration Trump, cela semble excessif.

Mercredi, Andrea Lucas, présidente de l’Agence fédérale américaine pour l’égalité des chances en matière d’emploi (EEOC), a exhorté les hommes blancs à demander une compensation s’ils estiment avoir subi une discrimination professionnelle en raison de leur identité d’homme blanc en 2025. Cette initiative est soutenue par le vice-président des États-Unis, J.D. Vance, et s’inscrit dans la ligne politique de Donald Trump qui vise à réduire progressivement les mesures en faveur de la diversité. Cela alimente chaque jour un peu plus le ressentiment des hommes blancs aux États-Unis.

« Donald Trump a réussi à politiser une subjectivité : le sentiment que, parce qu’on est blanc, on est désavantagé dans une société désormais multiculturelle », déclare Sylvie Laurent, historienne et auteure de Pauvre petit Blanc (éd. Maison des Sciences de l’Homme, 2020), au micro de France Culture. Ce sentiment repose sur des mesures issues de l’adoption de la loi sur les droits civiques de 1964, qui interdit la discrimination fondée sur la race, la couleur de peau, la religion, le sexe et la nationalité. L’année suivante, le décret 11 246 instauré par Lyndon Johnson a établi les « affirmative actions ».

Cette notion, qui se traduit par « discrimination positive », permet aux groupes discriminés et sous-représentés dans les échelons élevés de la hiérarchie socio-professionnelle de bénéficier d’un « traitement préférentiel dans la répartition des emplois, des places à l’université et des marchés publics », comme l’explique le docteur en sciences politiques Daniel Sabbagh dans un de ses articles. Toutefois, « on assiste aujourd’hui à une remise en cause quasi généralisée des politiques de discrimination positive » aux États-Unis, remarque l’auteur.

Ces mesures anti-discriminatoires ont rapidement été contestées par les « angry white men », des hommes blancs conservateurs qui ont trouvé en Donald Trump un porte-parole et une forme de légitimité. En juin 2023, la Cour suprême américaine a décidé d’abolir les pratiques de discrimination positive. Deux ans plus tard, en mars dernier, le ministère de la Justice a ouvert une enquête sur quatre grandes universités de Californie, soupçonnées de recourir toujours à ces méthodes lors de leurs admissions. Ces pratiques sont considérées comme « discriminatoires » envers les personnes blanches par l’administration Trump.

« Chaque fois que, dans l’histoire des États-Unis, des mesures ont été mises en place pour améliorer la situation des Noirs, des racistes blancs ont dénoncé ces actions, prétendant qu’elles constituaient une injustice, une discrimination inversée, un traitement de faveur », explique Randall Kennedy, professeur de droit à Harvard, dans Le Monde.

Fin des discriminations positives, mais également de l’autorisation d’avorter ou de changer de sexe… Avec ce deuxième mandat de Trump, les « angry white men » espèrent donc leur revanche sur une société qui n’a pas évolué en leur faveur.