France

Ambassadeurs, médiation animale… Ces nouvelles armes pour venir à bout du harcèlement scolaire

La lutte contre le harcèlement scolaire reste un véritable casse-tête. Ce jeudi 7 novembre, journée nationale de la lutte contre le harcèlement à l’école, est une occasion de plus de le constater. D’après les résultats des questionnaires d’autoévaluation réalisés en novembre 2023, plus d’un élève par classe de collège en serait victime. Ces moqueries, mises à l’écart et autres attaques blessantes et répétées, entraînent souvent les victimes à penser au pire. Selon une publication de l’Unicef de 2018, un quart des enfants harcelés a déjà pensé au suicide. Pourtant, les sanctions sont sévères : depuis 2022, les auteurs de harcèlement scolaire de plus de 13 ans peuvent être punis jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 7.500 euros d’amende, s’ils ont entraîné la victime à s’ôter la vie – ou à tenter de le faire. Pour les élèves majeurs, les sanctions s’élèvent jusqu’à 10 ans d’emprisonnement et 150.000 euros d’amende.

Insuffisant pour enrayer la machine. Samuel Comblez, directeur général adjoint d’e-Enfance, observe « un rajeunissement des cas de harcèlement et un triplement des appels depuis l’an dernier. » L’association de lutte contre le harcèlement et les violences en lignes, a mis en place un numéro de téléphone gratuit et anonyme, le 3018, pour assister et guider les jeunes, qu’ils soient cibles de violences psychologiques ou physiques. « A la fin de l’année, nous aurons reçu 150.000 appels. Malheureusement, seulement la moitié des appels a pu être prise en charge », regrette-t-il. d’ici la fin de l’année. Mais ces chiffres toujours plus importants, sont avant tout révélateur d’une prise de conscience sur la question du harcèlement scolaire : « Ce serait mentir de dire que rien ne se passe. Mais le travail est loin d’être terminé », poursuit le cadre d’e-Enfance.

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L’implication des élèves

Pour endiguer la situation, les acteurs concernés ne manquent pas d’efforts, ni d’inventivité. Afin de mieux traiter l’afflux de demandes, la ligne de téléphone 3018 d’e-Enfance a été dérivée en application courant 2022. En plus de la ligne téléphonique 3018, ouverte 7/7 jours de 9 heures à 23 heures, le software met un chat à la disposition des victimes. Ainsi, elles peuvent être directement mises en relation avec une équipe juridique ou un psychologue.

Au sein des écoles, les solutions se pensent désormais en collaboration des élèves. C’est dans cet état d’esprit qu’est né le dispositif d’ambassadeurs « non au harcèlement », impulsé par le Ministère de l’Education nationale en 2015. Formés pour l’occasion, des élèves volontaires, qui ont parfois souffert eux-mêmes de harcèlement, deviennent ambassadeur et font le relais entre les élèves victimes et le personnel enseignant. Une façon de libérer la parole des enfants avant de la soumettre au monde parfois intimidant des adultes.

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Le lycée professionnel Saint-Michel de Priziac (Morbihan), qui appartient à la fondation Apprentis d’Auteuil, a lancé l’initiative en 2018. Capucine, fait partie des figures censées désamorcer les violences : « C’est un sujet qui me touche, c’est la raison pour laquelle j’y prends part. Les victimes peuvent avoir du mal à en parler et c’est super de participer à cette libération de la parole. » Johann Quenault, directeur adjoint de l’établissement, considère ce dispositif essentiel : « On ne peut pas traiter les problématiques des élèves sans leur implication. »

Nos amis les bêtes

Au lycée agricole privé Val-de-Drôme de Montéléger (Drôme), la prévention se fait aussi à l’aide d’animaux. Sous la supervision de Natacha Vauclin, éducatrice et formatrice, les élèves se sensibilisent par la médiation animale. Le plus régulièrement, l’animal en question est un chien, mais il peut aussi s’agir d’un lapin ou encore d’une poule. Au cours de plusieurs heures dans l’année, les élèves vont être en présence d’un animal médiateur avec lequel ils vont devoir interagir. « Ça permet de travailler l’estime et la confiance de soi. Le contact avec l’animal va apprendre aux élèves des valeurs d’empathie, de respect et de bienveillance. Au fil des séances, ils ont tendance à naturellement s’identifier à lui ». Au sein du lycée, le recours à ces intermédiaires à plumes ou à poils porte ses fruits : « Les enfants deviennent beaucoup plus attentifs aux signaux corporels de leurs camarades. De la même façon qu’ils comprennent qu’il ne faut pas embêter le chien, ils finissent par faire le lien avec leurs camarades et sont moins enclins à les contrarier. »

Les réseaux sociaux dans le viseur

Malgré la forte mobilisation des établissements, la sphère numérique reste un angle mort dans la lutte contre le harcèlement scolaire. D’après une étude de l’OMS parue en mars 2024, 15 % des adolescents ont été sujets au cyberharcèlement. « Les situations de harcèlement ont diminué mais se déplacent dans la sphère numérique. Nous sommes dépassés par le harcèlement sur les réseaux sociaux », déplore Johann Quenault.

Pour Samuel Comblez, c’est aux parents d’assumer ce rôle et de régulièrement prendre la température auprès de leurs enfants : « Les adultes ne s’impliquent pas suffisamment dans les usages numériques des jeunes. Quand ils posent des questions à leurs enfants ils vont toujours leur demander  »comment ça se passe à l’école ? » mais jamais ce qu’il en est sur les réseaux sociaux ou les jeux vidéo. »

En février 2024, l’institut norvégien de recherche sur la consommation avait observé que les jeunes qui ne possédaient pas de « skins » (comprendre des costumes pour le personnage incarné dans le jeu) sur Fortnite devenaient des proies pour les élèves les plus moqueurs. Comme quoi, le harcèlement n’a de scolaire que le nom.