France

Alpes-Maritimes : Des peintures rupestres vieilles de 4.000 ans découvertes dans une zone « sacrée » du Néolithique

Elles étaient jusque-là passées inaperçues, camouflées par de la végétation. Et ce n’est qu’à la faveur d’une opération de débroussaillage, organisée là, au pied d’une paroi rocheuse d’un hameau de Valdeblore (Alpes-Maritimes), pour y baliser des parcours d’escalade, que deux promeneurs, un père et son fils, sont tombés dessus. 120 peintures rupestres vieilles de plus de 4.000 ans ont été mises au jour en août dernier.

« Il y a des anthropomorphes sexués mâles, quelques chiens, d’autres animaux et des idoliformes, c’est-à-dire des divinités. On trouve aussi des arcs, des poignards », a détaillé à 20 Minutes Claude Salicis, le président de l’Institut de préhistoire et d’archéologie Alpes Méditerranée (IMAAP) qui a pu les authentifier.

Une découverte « rare » près de la Vallée des merveilles

Racontée par Nice-Matin, la découverte de ce musée à ciel ouvert, à quelques kilomètres seulement de la Vallée des merveilles et de ses 40.500 gravures datées de la fin de la Préhistoire, pourrait sembler presque dérisoire. Mais elle est « rare », confirme le spécialiste. Car les « artistes » à l’œuvre ici n’ont pas entaillé la roche, ils l’ont recouverte de peintures. « Et jusque-là, nous n’en avions répertorié que deux dans tout le département des Alpes-Maritimes », appuie Claude Salicis.

Les 120 « signes » de Valdeblore, retrouvés juste au-dessus du hameau de La Roche, devaient d’ailleurs être encore plus nombreux, selon lui. En 2007, de premiers travaux sur la paroi, utilisée par les amateurs de grimpe, ont peut-être endommagé le site.

« Des pans ont été rabotés. Certains dessins ont sans doute purement et simplement disparu », explique-t-il. A l’époque, en tout cas, personne ne les avait signalés. « En plein soleil, ils sont difficiles à voir. C’est du jaune avec un peu de rose sur du jaune à cause de la Cargneule [la roche locale] qui a été utilisée pour les pigments », dit-il.

Dans les derniers temps du Néolithique

L’IMAAP, qui a analysé ces couleurs, étudié les formes et corroboré le tout par une datation au carbone-14, est presque formel sur la période d’exécution de ces 120 « peintures rupestres schématiques ». Elle se situerait entre 2.100 et 2.000 ans avant J.-C., « une époque charnière située dans les derniers temps du Néolithique et les débuts de l’Âge du Bronze ». Et il s’agirait de témoignages « de pans entiers de leurs manières de vivre, de leurs comportements, de leurs croyances ».

Les peintures représentent notamment des scènes de guerre.
Les peintures représentent notamment des scènes de guerre. – IMAAP

En y regardant de plus près, le président de l’institut s’est même convaincu que la zone était alors « sacrée » pour ceux qui sont à l’origine de ces dessins. « C’était peut-être des guerriers du Néolithique. Sur la paroi, on voit notamment une scène de combat, une autre de chaos et encore une dernière qui représente des funérailles, détaille l’expert. Un abri sépulcral se situait peut-être à proximité. D’ailleurs, selon le cadastre napoléonien, le secteur est surnommé « Prohïbit ». Un terme qui veut dire interdit, prohibé. Ce serait donc une zone qu’il faut protéger et ne surtout pas profaner. »

Les « protéger pour le bien commun »

Des démarches ont d’ailleurs été entreprises pour faire sanctuariser les lieux. « Mais cela prend du temps et ce ne sera pas avant au moins cinq ans », précise Claude Salicis. En attendant, dans le dernier tome de ses mémoires, l’IMAAP rend compte de cette découverte pour « faire prendre conscience de l’importance de ces quelques « signes » du passé ». « Il serait si facile de [les] protéger pour le bien commun avant une disparition irréversible liée aux activités climatiques ou humaines », pointe l’institut.

L’annonce de la découverte a déjà malheureusement suscité la venue de curieux. Et des dessins beaucoup plus récents, tracés à la craie, ont été retrouvés juste à côté de ce patrimoine multimillénaire ce lundi. Au grand dam des archéologues.

Les élèves du Lycée de la Montagne, à Valdeblore, qui avaient l’habitude d’escalader la montagne au-dessus du hameau de la Roche, ont été sensibilisés, indique Claude Salicis. Une conférence est également prévue dans le village le 11 février. Dans un seul but. Pour que ces vestiges puissent perdurer encore plusieurs millénaires.