France

Affaire Bétharram : « Procès à charge » ou « entreprise d’enfumage »… Les réactions à l’audition de François Bayrou

«Indécence totale », « procès stalinien » ou encore « exploitation assez indigne »… Du centre à l’extrême droite, plusieurs députés se sont indignés jeudi de la manière dont le Premier ministre François Bayrou a été interrogé mercredi, durant son audition par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur l’affaire Bétharram.

Sur Radio J, le chef des députés Modem Marc Fesneau, très proche de François Bayrou, s’en est pris à Paul Vannier, le député de la France insoumise, corapporteur de la commission d’enquête parlementaire sur les violences physiques et sexuelles perpétrées à Notre-Dame de Bétharram. Il a jugé « cette façon de traiter les gens assez dégueulasse ». « C’est du stalinisme », a-t-il estimé, évoquant « un procès à charge ».

« Entreprise d’enfumage » de François Bayrou, selon Boris Vallaud

« Il faut qu’on arrête avec les commissions d’enquête » à l’Assemblée nationale « parce qu’on en fait des objets politiques permanents », a-t-il estimé, « il ne s’agit pas de combattre, il s’agit d’accuser l’autre ». Pour Marc Fesneau, « le projet » de La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, « c’est la démolition ».

« Je trouve assez indigne la récupération de la France Insoumise », a déclaré de son côté le chef des députés LR Laurent Wauquiez sur RTL, jugeant qu’ « on n’est pas face à une crise politique, on est face à une crise de société ». « Cette audition m’a mis assez mal à l’aise parce que pour moi, elle ressemblait davantage à un procès de Moscou », a déclaré jeudi sur TF1 le vice-président du Rassemblement national Sébastien Chenu.

Beaucoup plus critique vis-à-vis du Premier ministre, le patron des députés socialistes Boris Vallaud a dénoncé « une entreprise d’enfumage » mise en œuvre par François Bayrou au cours de ces plus de cinq heures d’audition. « Est-ce que, au sortir de cette audition, les Françaises et les Français, les victimes, ont le sentiment d’avoir été éclairés sur ce qu’il s’est passé ? Ont-ils eu des éléments supplémentaires de compréhension ? Je ne crois pas », a-t-il regretté sur Public Sénat.

François Bayrou a démenti fermement à plusieurs reprises avoir été au courant des violences physiques et violences sexuelles commises dans les années 1980 et 1990 au sein de l’établissement, dénonçant encore mercredi une « instrumentalisation » politique.

« François Bayrou ne représente pas l’enjeu principal de notre combat », rappelle le collectif de victimes

Plusieurs membres du collectif de victimes de Bétharram ont suivi chez l’un d’eux l’audition de François Bayrou. Ils se sont montrés mesurés à l’issue de ce rendez-vous très attendu avec le Premier ministre, également élu local des Pyrénées-Atlantiques, et ancien ministre de l’Éducation nationale (1993-1997). « À celles et ceux qui espéraient que cette audition permettrait de tourner la page, nous répondons que ce 14 mai n’est pas un aboutissement, c’est une étape », a déclaré Alain Esquerre, porte-parole du collectif, entouré d’une dizaine de victimes, lors d’une conférence de presse à Bordères (Pyrénées-Atlantiques), village où réside aussi le Premier ministre.

« Nous, les victimes, on ne rentre pas dans ce jeu politique, on s’y refuse catégoriquement », a-t-il dit, jugeant néanmoins le chef du gouvernement « un peu malmené » par les parlementaires. « François Bayrou ne représente pas l’enjeu principal de notre combat. Il fait partie d’une chaîne de responsabilités », a fait valoir Alain Esquerre, estimant « qu’il y a une responsabilité collective ».

Notre dossier sur l’affaire Bétharram

« Nous n’avons rien obtenu de ce que [François Bayrou] nous a promis le 15 février », a par ailleurs souligné Alain Esquerre, sauf un plan pour renforcer les contrôles dans les établissements privés. Le collectif réclame notamment « des moyens renforcés pour la justice », « une évolution de la loi sur la prescription des crimes sexuels subis par les enfants » ou encore « la création d’une structure animée par les victimes, pour les victimes ». François Bayrou a tout de même prôné la création d’une « autorité indépendante » sur les violences contre les enfants, lors de son audition