Affaire Bétharram : « Cheval », « PM » et un prêtre nonagénaire, qui sont les gardés à vue ?
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Un an après la création du groupe des anciens de Bétharram sur Facebook, par Alain Esquerre, et visant à rassembler les témoignages des sévices subis pendant plusieurs décennies dans l’établissement Notre-Dame-de-Bétharram, situé près de Lourdes, dans les Pyrénées-Atlantiques, les premières gardes à vue ont eu lieu, ce mercredi.
Trois hommes, deux laïcs et un prêtre, sont entendus pour des faits de viols, agressions sexuelles et violences commis entre 1957 et 2004 sur d’anciens élèves de l’établissement, qui ont récemment brisé le silence. Dans les récits du groupe, ils sont décrits comme « Cheval », un surveillant de dortoir, son acolyte « PM » mais aussi un prêtre, aujourd’hui âgé de 94 ans. La garde à vue de ce dernier a été levée ce jeudi, a informé le parquet de Pau tandis que celle des deux autres a été prolongée.
« Cheval », un surveillant violent et sadique
« Cheval est au perron !!! », c’est un post écrit à l’annonce des gardes à vue, sur le groupe Facebook des anciens et victimes de Bétharram. Victime du surveillant général surnommé « Cheval », son auteur a renoué pour l’occasion avec le jargon des internes de Bétharram. Décrit comme particulièrement « sadique », ce surveillant avait l’habitude de retourner sa chevalière avant d’infliger ses coups, ce qui lui a valu son surnom. Le perron, c’est là où il envoyait de longues heures dans le froid, quasiment nus, des élèves qui ne devaient pas bouger.
Aujourd’hui septuagénaire, il a laissé de très douloureux souvenirs à d’anciens élèves qui s’accordent sur sa cruauté. Des récits de piqûres dans les fesses et de doubles claques assénées après relevage des oreilles ont laissé d’horribles souvenirs aux anciens élèves. Un des témoignages qui figure sur ce groupe relate des faits encore plus graves : « Il a été mon violeur durant mes quatre années de 1983 à 1988 et comble du vice, il m’a nommé sonneur durant ma dernière année pour m’avoir à disposition. J’espère que justice sera faite. »
« PM », l’acolyte de « Cheval »
Cet ancien surveillant, âgé de 59 ans était surnommé « PM » par les enfants et décrit comme le « copain » de « Cheval ». Il aurait sévi en particulier pendant les camps scouts dont il avait la charge le mercredi après-midi, raconte La Dépêche du Midi. Il vivait à quelques centaines de mètres de Notre-Dame-de-Bétharram et aurait emmené plusieurs élèves à son domicile, selon les informations du quotidien régional.
Arrivé en 1983 dans l’établissement privé, il était encore en poste jusqu’à récemment. Il n’a été écarté que grâce à l’action d’Alain Esquerre, lanceur d’alerte dans cette affaire.
Un prêtre âgé de 94 ans qui terrifiait les enfants
Ce nonagénaire officie à Notre-Dame de Bétharram dès les années 1950. Selon l’un des principaux témoins dans l’affaire, Jean-Louis Delbos, âgé de 78 ans aujourd’hui, ce clerc était craint par tous les élèves à l’époque.
« En 1957, arrive au dortoir un jeune ecclésiastique dont nous avions une peur irraisonnée, écrit-il dans une lettre à François Bayrou qu’il a transmis à 20 Minutes. La suite vous la subodorez… Venir la nuit, soutane ouverte, accroupi au pied de mon lit, pour venir me faire des attouchements et des fellations… Puis il allait faire sa macabre mission sur d’autres copains… Avec toujours le même lexique : « Rendormez-vous, c’est rien. » Cela a duré jusqu’en fin 1961. »
Toutes nos infos sur l’affaire Bétharram
On dénombre 132 plaintes déposées au 20 février dans cette affaire qui pourrait encore prendre de l’ampleur. Au travers des récits du groupe, on lit l’angoisse du dimanche soir de retourner à Bétharram, les enfances détruites, la haine née là-bas contre la religion et ses représentants, et des cauchemars encore présents chez des victimes pour certains septuagénaires.
On lit aussi la compassion de ceux qui n’ont vécu « que » des violences physiques vis-à-vis de ceux qui ont subi des violences sexuelles.