2025, année décisive pour l’IA ?
Que peut-on souhaiter à l’intelligence artificielle pour 2025 ? Après le boom des dernières années, l’engouement autour de la « révolution IA » n’est plus le même, face aux difficultés que rencontrent les entreprises du secteur comme Open AI.
GPT-5 ou Orion, la mise à jour tant attendue de Chat GPT est pour l’instant repoussée. Après plus de 18 mois de coûteux développement, les résultats seraient pour le moment insuffisants pour justifier une nouvelle mise à jour. Faut-il pour autant s’inquiéter pour Open AI ?
Pas selon Anna Choury, spécialiste des enjeux politiques et sociaux de l’intelligence artificielle. « Ce n’est pas tellement que Chat GPT-5 n’est pas prêt, mais les attentes sont beaucoup trop grandes. Ce n’est pas pour l’instant la révolution promise ». Pas de panique pour autant selon elle, Open AI n’a pas de vrai concurrent et peut donc se permettre de garder au chaud son nouveau modèle pour 2025.
Où est la révolution promise ?
Une méforme du secteur qui met aussi à mal l’idée que notre quotidien pourrait changer fondamentalement grâce à cette technologie en 2025. Les intégrations de l’IA dans notre quotidien sont pour l’instant sporadiques, ce qui ne surprend pas notre spécialiste Anna Choury : « En 2013, l’Université d’Oxford disait déjà qu’en 10 ans, la moitié des emplois seraient remplacés par l’IA. On voit bien que ce n’est pas le cas ». Des attentes toujours démesurées selon elle, qui n’ont rien à voir avec la réalité du terrain.
Au travail notamment, l’IA se limite pour l’instant à des utilisations de confort. En mai dernier, la Harvard Business Review publiait une enquête sur l’utilisation de l’IA en entreprise. Près de la moitié des chefs d’entreprise n’avaient aucune idée de comment et quand leurs employés utilisaient l’IA. A l’inverse, les employés étaient plus de 70 % à ne jamais l’utiliser, et quand ils l’utilisent, c’est à 43 % pour effectuer des tâches routinières, pénibles, qu’ils préfèrent éviter.
Pas de révolution prévue pour 2025, pour l’instant, la majorité des utilisations sont importées par les employés, sans que leur entreprise ne le contrôle. « On ne peut pas reprocher aux gens de vouloir se faciliter la vie au travail » affirme Amélie Cordier, fondatrice et dirigeante de Graine d’IA et spécialiste de l’IA responsable.
« Le tout est de créer un dialogue social en entreprise sur ce qu’on peut faire pour créer des outils spécifiques ». L’idée est surtout d’éviter que les employés fournissent à Chat GPT des données confidentielles ou sensibles, surtout quand on connaît l’opacité du logiciel.
L’IA dégénérée
Si nos utilisations de l’IA restent sporadiques, toutes les entreprises réfléchissent, par peur de « louper le train », à intégrer l’IA dans leurs modèles, parfois jusqu’à l’excès.
Dernièrement, c’est Meta, le groupe de Facebook et Instagram, qui a annoncé l’introduction prochaine sur leurs réseaux de comptes totalement générés par intelligence artificielle, qui pourront poster des photos, commenter, interagir avec de vrais utilisateurs, sans que l’on puisse les différencier des autres comptes. En 2025, ce genre d’exemples risque de se multiplier.
Pour Amélie Cordier, ces utilisations « forcées » sont aberrantes : « Il n’y a aucun intérêt pour la société, pour les utilisateurs, c’est simplement la plateforme qui s’entretient elle-même pour générer des dollars ».
L’idée derrière ces nouveaux comptes, créer artificiellement de l’engagement, des réactions, et donc des revenus supplémentaires.
Faut-il réguler l’IA ?
Face aux dérives, les pouvoirs publics vont devoir en 2025 se saisir à bras-le-corps de la question de la régulation, pour éviter de reproduire des schémas qui ont pu apparaître dans d’autres secteurs comme la spéculation boursière.
Mais pour l’heure, c’est plutôt l’inverse qui se profile. Aux Etats-Unis, Donald Trump vient d’annoncer la nomination de David Sacks, ancien directeur de PayPal, au poste de conseiller IA et cryptomonnaie, assurant dans le même temps sa volonté de tout faire pour que le développement de l’intelligence artificielle se poursuive sans entraves dans le pays. Le nouveau président compte notamment revenir sur les mesures de l’ère Biden, qui selon lui « entravent l’innovation et imposent des idées d’extrême gauche dans le développement technologique ».
De l’autre côté de l’Atlantique, l’Europe a mis en place en mars dernier « l’AI act », une avancée pour Anna Choury : « Cet accord a eu le mérite de différencier les utilisations. C’est-à-dire qu’on décide d’ignorer un peu les utilisations de confort, mais qu’on est plus sévères avec celles qui, si elles ne fonctionnent pas ou font des erreurs, ont des conséquences très graves ».
Une ligne ambitieuse, défendue par Amélie Cordier, mais difficile à tenir quand nous profitons des technologies américaines. « Doit-on bloquer en Europe ces technologies ou profiter de cet accès pour mettre en avant des utilisations plus éthiques ? ».
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Pour la spécialiste, le sujet principal de 2025 sera surtout l’éducation de la population aux bons usages de l’intelligence artificielle. Moins de générations d’images de chat, plus d’utilisations utiles, mesurées, d’une technologie encore en cours d’apprentissage. « C’est faux de dire que l’IA n’est pas prête, conclut Anna Choury. Elle fait exactement ce qu’on lui a demandé de faire, c’est le principe. Si on n’est pas satisfaits du résultat, ce sont nos usages qui doivent évoluer ».