Belgique

Vérification de 10 affirmations des 5 présidents et co-présidente de parti sur RTBF

Raoul Hedebouw a affirmé que « les mesures pensions vont coûter, suivant la commission de vieillissement de la population entre 150€ et 200€ par pensionné. » Paul Magnette a déclaré que « trois Belges sur quatre disent ‘depuis que le gouvernement fédéral s’est installé avec le MR et Les Engagés, mon pouvoir d’achat s’est détérioré’. »


Sur une quarantaine d’affirmations factuelles vérifiables comprenant des chiffres ou des dates, une quinzaine a été sélectionnée selon différents critères, en se basant sur celles sur lesquelles les personnalités ont le plus insisté ou celles ayant suscité le plus de débats, parfois en utilisant un joker, en privilégiant des arguments n’ayant pas encore été vérifiés dans le passé.

Dans la mesure du possible, nous tentons d’équilibrer la sélection entre la majorité (5 affirmations) et l’opposition (7 affirmations), bien qu’il puisse parfois y avoir plusieurs intervenants pour une même affirmation. La conclusion (vrai, faux ou à nuancer) n’est pas un critère de sélection car elle apparaît uniquement après la vérification d’une affirmation préalablement choisie.

### « Les mesures pensions vont coûter entre 150€ et 200€ par pensionné » (Raoul Hedebouw – PTB)

Dès le début du débat, Raoul Hedebouw a critiqué les mesures du gouvernement sur les pensions : « Les mesures pensions vont coûter, selon la commission de vieillissement, entre 150€ et 200€ par pensionné. » Quelques minutes plus tard, il a relancé cet argument en précisant ses chiffres : « J’ai ici un rapport du comité de vieillissement, qui indique que les pensionnés vont perdre entre 9% et 12% de leur pension suite à vos réformes, soit entre 150€ et 200€. »

Ce deuxième argument a été contesté par Georges-Louis Bouchez immédiatement après : « Ce que Monsieur Hedebouw dit est faux. […] (Le rapport concerne) des gens qui n’ont pas suffisamment cotisé, qui n’ont pas suffisamment travaillé, quand ils seront à la pension, pas les pensionnés actuels. »

#### Vérification

Dans son rapport annuel publié en juillet dernier et révisé en septembre, le Comité d’Étude sur le Vieillissement a évalué l’impact budgétaire et social de la réforme des pensions proposée par le gouvernement. Il a examiné 14 mesures contenues dans cette réforme, telles que l’abrogation du bonus actuel, son remplacement par un système de bonus/malus, la limitation des périodes assimilées, l’accès à la retraite à 60 ans après 42 ans de carrière, la suppression de la péréquation, et le relèvement de l’âge de la retraite pour certaines catégories. Le comité a ensuite agrégé toutes ces réformes selon différents profils et a conclu que, « en termes de rapport entre la pension moyenne et le revenu professionnel moyen, l’impact cumulé des mesures est le plus élevé chez les pensionnés du régime de la fonction publique. Cela s’intensifie progressivement pour atteindre -11,9% en 2070. Les pensionnés du régime salarié subissent le deuxième impact le plus important, avec une diminution globale estimée à -9,2% en 2070. Enfin, les pensionnés du régime des indépendants apparaissent comme les moins touchés, avec un impact global maintenu relativement stable à -3,1% en 2070. »

Le comité a également publié un tableau récapitulant tous les impacts cumulés selon les profils. Le chiffre de -8,1% pour le ratio de bénéfice des salariés dans le tableau est sous-estimé et a été corrigé à -9,2%, comme indiqué dans le texte.

Le comité a en outre précisé qu’en termes budgétaires, la réforme conduirait à un relèvement du taux d’emploi de 0,2% et à une croissance du PIB de 0,3%. Le calcul du PTB change la baisse estimée entre 150 et 200€, se basant sur une pension moyenne de 1500€. Une baisse d’environ 10% sur une telle pension correspond effectivement à 150€. Selon le Service Fédéral des Pensions, « en janvier 2024, les pensionnés ont reçu en moyenne un revenu de pension légale de 1998 euros. » Ainsi, une baisse de 10% sur un tel montant se traduirait par une perte d’environ 200€, comme l’a indiqué Raoul Hedebouw.

#### Conclusion

Les chiffres avancés par Raoul Hedebouw sont corrects et bien sourcés, mais il ne mentionne que les baisses les plus importantes (celles qui touchent les fonctionnaires et les salariés) et non celles concernant les indépendants, qui sont plus modérées à -3,1%. Sa conversion d’euros est également correcte. Cependant, comme l’a souligné Georges-Louis Bouchez, ces projections concernent les années à venir, jusqu’en 2070, et s’appliquent donc aux futurs pensionnés, et non aux pensionnés actuels.

L’affirmation de Raoul Hedebouw est donc à nuancer.

### « Trois Belges sur quatre disent que leur pouvoir d’achat s’est détérioré depuis l’Arizona » (Paul Magnette – PS)

Lors d’un débat, le président du PS a affirmé que « trois Belges sur quatre disent ‘depuis que le gouvernement fédéral s’est installé avec le MR et Les Engagés, mon pouvoir d’achat s’est détérioré’. Les gens le constatent concrètement dans leur vie quotidienne. »

#### Vérification

Un sondage réalisé sur des échantillons représentatifs des Belges de 18 ans révèle effectivement que « 73% des Belges estiment que leur pouvoir d’achat s’est détérioré depuis l’arrivée au pouvoir du gouvernement de Bart De Wever le 3 février 2025. »

#### Conclusion

Cette affirmation est donc vraie.

Cependant, bien qu’il soit exact que près de trois Belges sur quatre estiment que leur pouvoir d’achat a baissé depuis l’établissement de la nouvelle coalition fédérale, cela traduit-il une véritable réalité économique ?

En Belgique, pour évaluer l’évolution du pouvoir d’achat, on se base sur l’indice des prix à la consommation (IPC), qui mesure l’évolution des prix des biens et services consommés par les ménages. Cet indice reflète donc le coût de la vie pour les ménages.

En réalité, l’IPC est resté relativement stable depuis février 2025. La dernière indexation des salaires a eu lieu en janvier 2025 (avant la mise en place du nouveau gouvernement) et il n’y a eu aucune indexation automatique des salaires depuis que l’Arizona est en place. En conséquence, si les prix sont, en moyenne, demeurés plutôt stables, ils ont même très légèrement reculé.

Selon Statbel, l’IPC était à 135,39 en janvier 2025 et a légèrement diminué à 134,95 en septembre 2025. Cependant, cet indice représente une moyenne et un indicateur économique global, ce qui ne signifie pas que certains Belges n’ont pas effectivement perdu du pouvoir d’achat entre février et septembre 2025. Cela ne reflète tout simplement pas la situation économique globale du pays.

### Conclusion

L’affirmation de Paul Magnette est donc à nuancer.

### « Le Prix Nobel d’économie l’a reçu parce qu’il explique que davantage d’impôts faisait fuir la richesse » (Georges-Louis Bouchez – MR)

Georges-Louis Bouchez a exprimé, lors d’un débat sur le pouvoir d’achat et la fiscalité, que « on nous dit ‘taxez les riches !’. Mais aujourd’hui, le prix Nobel d’économie lui-même a reçu le prix Nobel parce qu’il explique que taxer plus dans des pays comme la Belgique ou la France, c’est faire fuir de la richesse et des capitaux, et cela détruit l’économie. »

#### Vérification

Le prix Nobel d’économie 2025 a été attribué à Joel Mokyr, 79 ans, « pour avoir identifié les conditions préalables à une croissance durable grâce au progrès technologique, » et conjointement à Philippe Aghion, 69 ans, et Peter Howitt, 79 ans, « pour leur théorie de la croissance durable à travers la destruction créatrice, » comme l’a rapporté l’Agence France Presse.

D’après le communiqué de presse du Comité Nobel, « Joel Mokyr s’est appuyé sur des sources historiques pour identifier les causes de la croissance durable, prouvant qu’il ne suffit pas de savoir que quelque chose fonctionne, mais d’avoir aussi des explications scientifiques. » Quant à Philippe Aghion et Peter Howitt, « ils ont étudié la croissance durable, illustrant via un modèle mathématique le concept de destruction créatrice. »

Contacté après le débat, le porte-parole de Georges-Louis Bouchez a précisé que la source utilisée par ce dernier provient d’un portrait dans Le Figaro d’un des lauréats, Philippe Aghion. Ce dernier a exprimé son désaccord, lors d’une conférence, avec les propositions de Gabriel Zucman, qui plaidait pour une taxation du capital, en déclarant : « si vous faites cela, vous transformez la France en prison fiscale. »

### Conclusion

Un des lauréats du prix Nobel d’économie a effectivement exprimé son désaccord concernant certaines taxes sur le capital lors d’un débat, affirmant que cela aurait des effets négatifs. Cependant, il n’est pas certain que ce commentaire s’applique à toutes formes de taxation du capital.

Par ailleurs, il n’a pas reçu le prix Nobel pour cet avis mais pour ses travaux sur « la destruction créatrice. »

L’affirmation de Georges-Louis Bouchez est donc fausse.

### « Une famille de classe moyenne paiera 2500 euros en plus sur le parcours scolaire » (Paul Magnette – PS)

Dans un débat sur l’éducation, Paul Magnette a souligné que « sur une scolarité moyenne, une famille de classe moyenne va débourser plus de 2500 euros. »

#### Vérification

Paul Magnette fait référence à une simulation faite par RTL Info. Celle-ci a pris l’exemple d’un enfant inscrit dans une crèche dont les subventions ne seront pas indexées, engendrant un coût additionnel de 220 euros pour la famille. La fin de la gratuité des fournitures scolaires en primaire ajouterait environ 312 euros en coûts. Les frais d’une académie de musique, également re-transmis à la famille, s’élèveraient à 188 euros. En incluant trois stages sportifs majorés de 63 euros chacun et le coût des études supérieures avec une hausse du minerval de 357 euros par an (soit 1785 euros pour cinq ans), le total atteint effectivement 2568 euros sur l’ensemble de la scolarité.

Bien que les hausses des frais mentionnées soient alignées avec les mesures annoncées par le gouvernement, la simulation de RTL peut être interprétée comme maximaliste en partant du principe que toutes les hausses de coûts seront intégralement répercutées sur les familles.

### Conclusion

Le chiffre présenté par Paul Magnette est correct. Même si la notion de « classe moyenne » peut prêter à confusion, ce scénario pourrait s’appliquer à certaines familles sans aide. Cependant, l’augmentation des coûts ne représente pas nécessairement l’expérience de toutes les familles.

### « La hausse du minerval dans le supérieur touchera 60% des étudiants » (Raoul Hedebouw – PTB)

Raoul Hedebouw a affirmé que « 60% des étudiants seront impactés par la hausse du minerval. »

#### Vérification

Le gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles a prévu des minervaux progressifs confirmant que les étudiants boursiers continueront à ne rien payer. Il y a aura des minervaux de 375 euros pour les « étudiants modestes » et de 835 euros pour d’autres, tandis que le minerval maximum est de 1194 euros. Cependant, il n’est pas encore clair combien d’étudiants seront effectivement impactés par cette augemntation.

### Conclusion

Il est donc impossible de déterminer qui a raison sur ce point.

### « 9% des demandeurs d’emploi qui le sont depuis plus de 20 ans ont retrouvé un emploi depuis janvier » (Georges-Louis Bouchez – MR)

Au cours d’une discussion sur le chômage, Georges-Louis Bouchez a avancé que « 9% des demandeurs d’emploi depuis plus de 20 ans ont trouvé un emploi depuis janvier. »

#### Vérification

Ces statistiques, provenant du Forem, concernent les demandeurs d’emploi en Wallonie. Ils ont été partagés lors d’une conférence et montrent que parmi le groupe de demandeurs d’emploi de plus de 20 ans, 9% ont effectivement retrouvé un emploi dans les six mois précédant cette conférence.

### Conclusion

L’affirmation de Georges-Louis Bouchez est donc globalement vraie.

### Envie de revoir le débat ?

Vous souhaitez lire le résumé du débat des présidents de partis ? Vous pouvez retrouver notre compte-rendu dans cet article et aussi revisionner le débat dans la vidéo ci-dessous.