« Un des problèmes de Bruxelles, c’est le manque de sérieux et d’expérience de leaders politiques comme Christophe De Beukelaer et Frédéric De Gucht »
Ridouane Chahid (PS) réagit aux attaques de Frédéric De Gucht (Open VLD), qui accuse Ahmed Laaouej et le PS d’avoir une stratégie du « pourrissement ». « Ahmed Laaouej est loin d’être dans une volonté de régression et de repli sur soi. C’est un faux procès qu’on est en train de faire à cet homme », lance le député socialiste.
- Publié le 17-12-2024 à 12h33
- Mis à jour le 17-12-2024 à 14h32
Frédéric De Gucht, président de l’Open VLD à Bruxelles, a eu des mots assez tranchants dans la Libre, ce mardi, au sujet du veto du PS contre la N-VA, dans les négociations pour former un gouvernement bruxellois. « Ahmed Laaouej a choisi la voie du pourrissement, il n’a jamais eu la volonté de monter dans un gouvernement bruxellois« , a assuré le libéral néerlandophone.
Sans surprise, ces propos ont fait bondir le PS bruxellois, qui a tenu à réagir, via Ridouane Chahid, député fédéral et proche du président de la Fédération bruxelloise du PS.
guillement Contrairement à ce que certains disent ou pensent, il est loin d’être dans une volonté de régression et de repli sur soi. C’est un faux procès qu’on est en train de faire à un homme qui a voué sa vie politique à Bruxelles depuis 24 ans. »
Ridouane Chahid, l’Open VLD a-t-il raison d’estimer qu’Ahmed Laaouej participe au pourrissement de la situation bruxelloise, sans intention de monter au gouvernement ?
J’invite M. De Gucht à plus de modestie et d’humilité, surtout au vu du dernier score électoral de son parti. Et au vu du fait qu’il ne sait pas ce que c’est que d’être élu, à Bruxelles. Ahmed Laaouej a décidé d’initiative d’être tête de liste régionale bruxelloise. C’est parce qu’il a la volonté de faire évoluer Bruxelles, tant du point de vue économique que sociétal. Contrairement à ce que certains disent ou pensent, il est loin d’être dans une volonté de régression et de repli sur soi. C’est un faux procès qu’on est en train de faire à un homme qui a voué sa vie politique à Bruxelles depuis 24 ans. Je pense sincèrement que les sorties de la N-VA et de M. De Gucht démontrent qu’ils ont peur du parti socialiste et de son président (bruxellois). Leur stratégie est-elle d’en arriver à ce que Bruxelles ne soit plus gérée par des Bruxellois ? Il y a un changement de cap à l’Open VLD. On a connu des leaders de ce parti qui étaient bruxellois avant d’être néerlandophones. Aujourd’hui, leurs leaders sont néerlandophones avant d’être bruxellois. C’est là qu’est le problème, avant tout.
Selon Frédéric De Gucht, Ahmed Laaouej n’a pas découvert la possibilité d’avoir la N-VA dans une majorité à la mi-novembre. Et il est exact que le PS n’avait pas formulé ce veto explicitement avant cette date.
Seuls les amnésiques ont oublié la position d’Ahmed Laaouej vis-à-vis de la N-VA. Il a été le premier, en interne au PS, à monter au front en 2020 contre une coalition fédéral avec la N-VA. C’était clair pour tout le monde que la N-VA, c’était no way. Depuis août, Ahmed Laaouej fait valoir auprès du formateur David Leisterh et de la formatrice néerlandophone Elke Van den Brandt que, notre scénario à nous, c’est de fonctionner avec la parti frère de chacun, sachant qu’Ecolo avait annoncé son choix pour l’opposition. Sauf si quelque chose nous échappe, le MR n’est pas le parti frère de la N-VA… Dire cela, de facto, excluait la N-VA.
guillement La N-VA veut renforcer sa mainmise sur Bruxelles pour pouvoir recevoir ses ordres d’Anvers et pouvoir mieux infiltrer les institutions bruxelloises, afin de les dénaturer. Ce sera sans nous. »
Mais ce veto du PS envers la N-VA est-il définitif ?
Comment voulez-vous, quand on lit encore la position de la N-VA ce week-end (Cieltje Van Achter dans le Soir), qu’il en soit autrement ? Leur position est aux antipodes de ce que les Francophones, tous partis confondus et pas seulement le PS, ont défendu depuis plus de 35 ans. La position de la N-VA a toujours été de dire : « Fusionnons les institutions, non pas pour plus d’efficacité, mais pour encore renforcer le poids des néerlandophones qui sont déjà surreprésentés à Bruxelles. Mais comme ils n’y arrivent pas de manière démocratique, ils veulent essayer de le faire par la particratie. C’est un déni de démocratie. Fusionner les zones de police, cela vise à renforcer le contrôle des néerlandophones, qui n’ont pas de contrôle sur les bourgmestres bruxellois. La N-VA veut renforcer sa mainmise sur Bruxelles pour pouvoir recevoir ses ordres d’Anvers et pouvoir mieux infiltrer les institutions bruxelloises, afin de les dénaturer. Ce sera sans nous. Nous; les socialistes, avons été les pères de cette Région bruxelloise, avec Philippe Moureaux et Charles Picqué.
Charles Picqué, justement, estime que vous devriez négocier avec la N-VA…
Charles Picqué est pourtant le premier à avoir dit il y a deux ans qu’il ne voulait pas entendre parler de la N-VA… Il faut rester dans la constance. Il ne fait plus partie de la discussion aujourd’hui et il y a peut-être des éléments qui lui échappent… On a toujours été dans une logique de défense des institutions bruxelloise.
Le PS a-t-il toujours l’intention de monter dans un gouvernement bruxellois, contrairement à ce que dit Frédéric De Gucht ?
Notre objectif est simple : ne pas être autour de la table avec la N-VA. On étudiera toutes les options qui nous seront présentées sans la N-VA. Mais aujourd’hui, certains nous manquent de respect alors qu’on reste la deuxième formation politique de Bruxelles. Si l’Open VLD et le MR voulaient vraiment gouverner avec nous à Bruxelles, ils auraient agi autrement. Depuis notre prise de position vis-à-vis de la N-VA, il n’y a eu envers nous aucun geste d’apaisement, et uniquement des attaques personnelles vis-à-vis d’Ahmed Laaouej. Nous ne sommes pas un paillasson. S’attaquer à notre président, c’est aussi s’attaquer à celles et ceux qui ont voté pour nous en juin et en octobre dernier.
Vous n’êtes pas inquiets face à la situation budgétaire qui se détériore, en l’absence de gouvernement ?
Si le gouvernement n’est pas mis en place, des groupes de travail peuvent reprendre la main au Parlement et y faire une proposition de budget pour 2025. Je rappelle que la situation budgétaire de la Région est gérée depuis 30 ans par ce parti, qui tire aujourd’hui la sonnette d’alarme. S’il y a un responsable de la situation budgétaire, c’est l’Open VLD, le parti de Frédéric De Gucht.
guillement Un des problèmes de Bruxelles, c’est le manque de sérieux et d’expérience de leaders comme Christophe De Beukelaer et Frédéric De Gucht »
Le MR et les Engagés ont ouvert la porte à Défi et à Ecolo pour négocier la formation d’un gouvernement bruxellois. Qu’est-ce que cela vous évoque ? L’axe MR-PS-Engagés n’existe plus…
Le seul axe qui compte pour nous, c’est celui qu’on défend pour les Bruxellois. Pour le reste, je laisse à Ecolo et à Défi le soin de se prononcer. Mais il y a trois qualités en politique qui permettent de concrétiser des accords dans l’intérêt général, c’est s’en tenir à l’engagement donné, respecter ses partenaires et se souvenir du poids que l’on représente. Aujourd’hui certains n’ont ne semble-t-il pas encore démontré qu’ils étaient en mesure d’avoir au moins une de ces qualités… Se retrouver autour d’une table avec un représentant des Engagés qui fait fuiter les notes, les conversations et les infos après les réunions, cela reflète le manque de crédibilité et de discrétion du personnel politique bruxellois. Quelle utilité de balancer une note dans la presse ? Si la sincérité y était vraiment, il procéderait autrement. Un des problèmes de Bruxelles, c’est le manque de sérieux et d’expérience de leaders comme Christophe De Beukelaer et Fédéric De Gucht, qui s’amusent dans la presse à étaler des problèmes et à attaquer des éventuels partenaires. Je n’ai pas compris l’utilité de cela.
Vous visez aussi la fiabilité et le sérieux de David Leisterh ?
Je n’ai jamais évoqué le sérieux et la crédibilité de David Leisterh. Il est le représentant de la première formation politique à Bruxelles. Il a sa méthode que je n’ai pas à critiquer. Je n’ai pas envie d’attaquer l’homme. Ce qui m’intéresse, c’est de savoir quand il y aura un gouvernement bruxellois.
* Christophe De Beukelaer a réagi sur les réseaux sociaux aux propos de Ridouane Chahid. « Une fuite c’est quand un des auteurs n’est pas d’accord de rendre la note publique. Ce n’était clairement pas le cas ici. Vu le veto du PS, pointer publiquement les convergences au sein d’une coalition alternative était devenu indispensable », a-t-il indiqué sur X. » Après plus de 6 mois de blocage, je veux avoir tout fait pour sortir Bruxelles de l’impasse. Dans 12 semaines Standard & Poor’s est à nos portes. Il n’y a vraiment plus de temps à perdre ».