Belgique

Sammy Djedou, djihadiste belge, face à la justice pour génocide.

Sammy Djedou, membre belge de Daesh, a été condamné en 2021 à 13 ans de prison pour avoir été l’un des dirigeants de l’organisation terroriste. Son procès pour génocide et crime contre l’humanité s’ouvre aujourd’hui devant la Cour d’assises de Bruxelles.


Des années après la chute de l’État islamique, la justice continue de rendre des comptes sur les atrocités commises par ses membres. Parmi les militants belges de Daesh les plus notoires se trouve Sammy Djedou. Ce Bruxellois, originaire de Laeken, a été condamné en 2021 à 13 ans de prison pour avoir été l’un des dirigeants de l’organisation terroriste. Selon les services de renseignement, il avait un rôle clé au sein de la cellule chargée de planifier des attentats en Europe.

Bien que présumé mort dans une attaque de drone menée par les forces de la coalition en décembre 2016, il reste pourtant au centre de l’attention de la justice belge. Aujourd’hui, son procès débute devant la Cour d’assises de Bruxelles. Il est jugé pour génocide et crime contre l’humanité, avec une première étape consacrée à la constitution du jury, qui devrait durer toute la journée.

Pendant son temps au sein de l’État islamique, Sammy Djedou aurait également perpétré des atrocités contre plusieurs jeunes femmes yézidies en Irak et en Syrie. Selon les enquêteurs, il aurait réduit trois d’entre elles en esclavage sexuel, les battant et les violant à plusieurs reprises.

Pour comprendre le contexte, il est nécessaire de revenir au 3 août 2014. À cette époque, l’État islamique est en pleine expansion. Les djihadistes viennent de s’emparer de Mossoul et de Falloujah, dans le nord de l’Irak, et cherchent également à conquérir la ville de Sinjar, bastion historique du peuple yézidi, qui vit dans le Kurdistan irakien depuis des siècles.

Les hommes et les personnes âgées sont exterminés, les jeunes garçons sont recrutés de force pour devenir des combattants, et les femmes et les jeunes filles, dès l’âge de 9 ans, sont capturées et vendues comme esclaves aux membres de Daesh.

C’est ainsi que trois jeunes filles auraient été réduites en esclavage par Sammy Djedou, alias Abou Moussab Al Belgiki, selon les éléments réunis durant l’enquête. D’après le dossier judiciaire, elles ont été contraintes, comme des milliers d’autres femmes yézidies, à accomplir des tâches domestiques, tout en étant enfermées et violées à plusieurs reprises, subissant des souffrances pendant plusieurs années.

Les viols sont utilisés par les combattants de l’État islamique comme une arme de guerre pour asservir et réduire au silence le peuple yézidi. Selon la doctrine du groupe, les Yézidis sont considérés comme des mécréants, leur religion, un mélange de zoroastrisme, judaïsme, islam et christianisme, étant jugée impure par les djihadistes.

Ces viols donnent lieu à des naissances d’enfants, intégrées à la stratégie de repeuplement du groupe terroriste. Cela représente une double sanction pour les jeunes femmes, qui, après avoir survécu à ces épreuves, se retrouvent confrontées à un choix déchirant après la chute de Daesh : être rejetées par leur communauté parce qu’elles ont eu des enfants suite à des viols, ou abandonner leur enfant pour retrouver leur place au sein de leur entourage.

Les faits sont d’une gravité extrême. L’identification des victimes de Sammy Djedou a été un processus long et ardu. Les enquêteurs ont suivi des pistes jusqu’en Irak, où ils ont réalisé plusieurs auditions de victimes pour confronter les récits et authentifier les actes attribués à Djedou.

Plusieurs associations travaillant avec des jeunes femmes yézidies ont aidé aux recherches, comme l’association belge V-Europe. Son président, Philippe Vansteenkiste, avait organisé des visites dans des camps de réfugiés yézidis, permettant à des journalistes du Soir et de De Morgen de rencontrer des victimes présumées de Sammy Djedou, menant ainsi les enquêteurs vers de nouvelles pistes.

Le procès qui se tient aujourd’hui revêt un caractère symbolique fort. Bien que l’accusé soit présumé mort, son jugement demeure crucial pour les victimes. De plus, en l’absence de preuves formelles de son décès, la justice souhaite mener la procédure à son terme pour juger les faits qui lui sont reprochés, ce qui pourrait également ouvrir la voie à d’autres affaires.

En effet, durant leurs reportages, les journalistes du Soir et de De Morgen ont recueilli des témoignages de plusieurs victimes yézidies, identifiant ainsi deux autres Belges impliqués dans ces crimes. Il y a d’abord Younes Abaaoud, frère du coordinateur des attentats de Paris, Abdelhamid Abaaoud, qui aurait eu trois esclaves sexuelles et est également présumé mort. Ensuite, Yassine Cheikhi, un Anversois, aurait exploité sexuellement des jeunes filles yézidies. Le parquet fédéral belge précise que « d’autres dossiers sont en instruction, mais ne sont pas encore clôturés ».