Repas à la carte, robot transporteur, technologies inédites… Pénétrez dans l’hôpital du 21e siècle, à Charleroi (PHOTOS)
L’ouverture complète des Viviers, le tout nouveau site du Grand hôpital de Charleroi, a eu lieu lundi. L’automatisation et les technologies font désormais pleinement partie du quotidien des soignants et de leurs patients. Pour la série « Dans le secret des lieux », La Libre vous emmène dans les coulisses de l’établissement.
- Publié le 01-12-2024 à 12h02
On hésite entre un hall de gare ou le lobby d’un hôtel. On est loin, en tout cas, de l’entrée des anciens sites hospitaliers, avec leurs plafonds bas et leurs mûrs défraîchis. Ce qui frappe, c’est la luminosité, les ouvertures, le large espace du hall d’accueil avec ce grand escalier boisé en plein milieu amenant à la polyclinique. À la réception, le personnel n’est plus calfeutré derrière une vitre mais en contact direct avec le visiteur.
Après cinq ans et demi de travaux, le tout nouveau site du Grand hôpital de Charleroi, baptisé « Les Viviers », a complètement ouvert en début de semaine. Les patients hospitalisés dans les anciens sites de Saint-Joseph, de l’IMTR et de Sainte-Thérèse, ainsi que certains patients de Notre Dame – 340 malades au total – ont pu être transférés vers le nouvel hôpital, un paquebot de quelque 150 000 m² pour une capacité de mille lits, situé à Gilly, en bordure du Ring 3.
Bien sûr, il reste de nombreux détails à régler. Des petits travaux sont encore en cours par-ci, par-là. La brasserie de l’hôpital n’ouvrira qu’à la mi-décembre. Dans les espaces réservés au personnel, il reste des cartons à classer, du matériel à ranger, un amoncellement de câbles à dénouer. Mais les lieux fréquentés par les patients sont, eux, en ordre.
Des crapauds cachés dans les fresques
Les couloirs des unités de soins sont égayés par 150 fresques réalisées par un collectif d’artistes. Avec un petit jeu : repérer le crapaud… Il s’agit d’un clin d’œil au terrain sur lequel l’hôpital a été construit où une réserve de crapauds calamites a été sauvegardée.
Dans les chambres, quasiment la moitié des lits sont neufs. Ils sont plus ergonomiques à la fois pour le patient et les soignants. « On a voyagé dans toute la Belgique pour faire une étude de marché pour le choix des lits, raconte Maryline Destrée, en charge du matériel et du dispositif médical. Le matériel a été testé par le personnel et par des patients partenaires pour s’assurer qu’ils convenaient. » Une chambre test avait même été installée à la clinique Reine Fabiola.
Dans les chambres courts séjours, les lits sont mis côte à côte, de manière traditionnelle. Par contre, dans les chambres longs séjours, ils sont placés en vis-à-vis afin que les deux patients profitent au mieux de la lumière du jour, le long des fenêtres. Ces chambres sont aussi plus grandes et chaque patient dispose de sa salle de bains.
Seize cuisines réparties dans l’hôpital
Autre confort : la possibilité de choisir à la carte son repas à l’aide d’une tablette électronique – sous la supervision d’une diététicienne. Cette nouveauté a été rendue possible grâce à l’installation de seize cuisines, appelées « cuisines satellites », à travers tout l’hôpital, chacune s’occupant de deux ou trois unités.
Les avantages sont multiples, selon Michèle Pirlot, la directrice du département Opérations : amélioration du confort du patient grâce à une plus grande variété de menus ; meilleure conservation des qualités nutritionnelles des aliments ; « une plus grande réactivité et une plus grande flexibilité » selon les besoins du patient – s’il faut changer son régime alimentaire ou retarder le moment du repas, par exemple. « On est le deuxième hôpital belge, après l’hôpital Delta à Bruxelles, à offrir ce service personnalisé », se réjouit Mme Pirlot.
Ces cuisines satellites impliquent un changement de taille aussi pour le personnel qui restait confiné dans une cuisine centralisée. Le travailleur endosse à présent le rôle d' »aide hôtelière » – un nouveau métier – et sert lui-même les repas au patient avec qui il est donc en contact direct. Cela permet de décharger les infirmières de cette tâche et de leur accorder davantage de temps au chevet des malades.
Le robot prend l’ascenseur tout seul
Un autre métier a fait son apparition aux Viviers, celui de « logisticien hospitalier ». Il est chargé entre autres de ranger le matériel et les produits livrés dans les unités par… un robot, un AGV, pour « Automated guided vehicle ».
Imaginez une tondeuse automatique. Au lieu d’être rond, le robot est rectangulaire et bien plus grand. Cet AGV va se glisser sous des chariots métalliques remplis de matériel pour ensuite les transporter dans tout l’hôpital. Il se déplace seul (les couloirs ont été cartographiés), ouvre les portes, prend les ascenseurs qui lui sont dédiés, utilise des clignotants, « parle » pour alerter de sa présence. Une présence humaine n’est nécessaire qu’au départ et à l’arrivée, où l’on retrouve le logisticien hospitalier.
« L’AGV, explique Michèle Pirlot, est utilisé pour du matériel standardisable et programmable qu’il transporte entre deux points », de gare à gare, lesquelles sont représentées au sol par des grandes bandes rouges. La gamme des produits transportés est large : denrées alimentaires, médicaments, perfusions et dispositifs médicaux, linge, déchets, etc.
Les Viviers sont dotés de 21 AGV. Les premiers doivent fournir à partir de mardi la polyclinique et la dentisterie. Ils délesteront ainsi du personnel des tâches de manutention les plus lourdes. Mais « il n’y a pas de pertes d’emplois. Cette crainte n’est pas fondée, assure Khalid Mourchid, responsable logistique. Au contraire, on a créé quarante ETP (équivalents temps plein) pour gérer les AGV. »
Des vestiaires automatisés
L’automatisation concerne aussi le vestiaire du personnel soignant. Ce dernier encode sur un écran la tenue dont il a besoin. On entend alors une machinerie se mettre en branle jusqu’à ce que la tenue se présente face au soignant à hauteur d’une ouverture dans le mur. Lorsque l’on entre dans le local technique derrière le mur, on découvre un enchevêtrement de rails auxquels sont accrochées des milliers de tenues.
Une fois changé, le soignant met ses vêtements dans une housse, qui va emprunter le chemin inverse. Le système fonctionne à l’aide de badges et de puces de détection. Avantages : il prend beaucoup moins de place qu’un système de casiers et permet de mutualiser les tenues, qui ne sont plus nominatives.
Aux Viviers, on se réjouit aussi d’utiliser les dernières avancées technologiques, notamment en radiothérapie, cardiologie ou encore en dialyse, avec un traitement de l’eau unique en Belgique qui permet une diminution de 40 % de la consommation. Finalement, pousser les portes des Viviers, c’est pénétrer dans l’hôpital du 21e siècle.