Que vaut un passeport belge aujourd’hui et quel est son prix ?
L’index Arton Capital mesure la “mobilité mondiale” (voyages sans visa + visa à l’arrivée). Depuis 2014, le Henley Passport Index a enregistré d’importantes transformations liées à l’évolution des politiques de visas et aux changements géopolitiques.
Classement Global Passport Power Rank (Arton Capital) 2025
L’index Arton Capital évalue la “mobilité mondiale” en tenant compte des voyages sans visa et des visas à l’arrivée. La première place de ce classement est occupée par des pays du Moyen-Orient et d’Europe.
Les deux classements montrent une forte présence européenne parmi les dix premiers, mais le leadership varie : Singapour est en tête dans la liste Henley, tandis que les Émirats arabes unis dominent selon Arton Capital.
Qu’est-ce qui a changé en 10 ans ? Une certaine vision de la géopolitique actuelle
Depuis 2014, le Henley Passport Index a observé d’importantes transformations, liées à l’évolution des politiques de visas et aux changements géopolitiques.
1. Progression générale de la mobilité mondiale
Le nombre moyen de destinations accessibles sans visa a quasiment doublé, passant de 58 en 2006 à 111 en 2024. Les détenteurs de passeports les mieux classés peuvent désormais accéder facilement à plus de 190 destinations, contre environ 170 il y a dix ans. Cette augmentation indique une ouverture mondiale progressive, malgré certaines restrictions temporaires dues à la pandémie de Covid-19.
2. Les plus fortes progressions
Les Émirats arabes unis se distinguent comme le grand gagnant de la décennie, ajoutant 106 destinations depuis 2014, et passant de la 55ᵉ à la 11ᵉ place. Singapour a accru son accès sans visa d’environ 25 destinations et occupe la première place mondiale depuis 2023, devant le Japon et la Corée du Sud. L’Ukraine et la Chine figurent parmi les pays qui progressent grâce à des accords bilatéraux et à une stratégie d’ouverture diplomatique.
3. Les pays en déclin
Pour les États-Unis, le score absolu n’a progressé que de 12 destinations au cours des dix dernières années, les faisant reculer à la 12ᵉ place en 2025. Leur stagnation en matière d’accords de mobilité est pointée comme une des raisons principales. D’autres pays comme la Russie, la Turquie, le Mali, le Sénégal et l’Afrique du Sud enregistrent également des baisses notables à cause de tensions diplomatiques et de politiques migratoires restrictives.
4. Glissement du centre de gravité
La domination occidentale observée dans les années 2000 a laissé place à une hégémonie asiatique, avec Singapour, le Japon et la Corée du Sud en tête depuis 2018. L’Europe demeure fortement représentée dans le top 10 (France, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Espagne et Belgique), mais les écarts avec l’Asie se sont considérablement réduits.
Un baromètre du pouvoir géopolitique, diplomatique et économique mondial
Le Henley Passport Index et le Global Passport Power Rank vont bien au-delà d’un simple classement de mobilité : ils fonctionnent comme un baromètre du pouvoir géopolitique, diplomatique et économique mondial, bien qu’ils présentent d’importantes limites analytiques. Ce classement illustre la capacité d’un pays à négocier des accords bilatéraux de libre circulation et à maintenir des relations internationales stables. Plus un pays a d’accords d’exemption de visa, plus il dispose d’une forte influence diplomatique.
Christian H. Kaelin, directeur de Henley & Partners, souligne que « la mobilité est devenue une nouvelle forme de puissance douce », révélant ainsi les gagnants et les perdants de la mondialisation. Les pays les mieux classés, comme Singapour, le Japon ou plusieurs États de l’Union européenne, reflètent une coopération internationale soutenue et une stabilité politique qui favorisent la confiance migratoire.
1. Un impact économique et social réel
Les passeports puissants facilitent la mobilité des entreprises et des investissements. Les détenteurs peuvent voyager, étudier ou établir des entreprises à l’étranger avec moins de restrictions, favorisant ainsi la croissance économique, le tourisme et les échanges commerciaux. Selon Henley, les passeports à haut score représentent « près de 60% des recettes mondiales du tourisme et jouent un rôle clé dans la stratégie d’attraction des entrepreneurs internationaux via les programmes de citoyenneté par investissement« .
2. Des inégalités structurelles persistantes
Ce même indice révèle toutefois une fracture importante : 70% des destinations mondiales sont accessibles aux passeports des 10 premiers, contre à peine 10 à 20% pour les derniers du classement comme l’Afghanistan, la Syrie ou l’Irak. Cette disparité illustre la géopolitique de la mobilité, où la liberté de mouvement est étroitement liée à la richesse nationale, à la stabilité politique et à la perception de la sécurité.
3. Limites et critiques
Le Henley Index ne prend pas en compte les obstacles pratiques tels que les procédures administratives, la durée de séjour, les coûts ou les restrictions sanitaires. Il néglige également des critères qualitatifs tels que la liberté personnelle, fiscale ou numérique, qui sont intégrés dans d’autres classements comme le Nomad Passport Index. De plus, certains analystes soulignent son biais occidental et économique, favorisant les destinations touristiques ou commerciales au détriment de la migration réelle.
En résumé, bien que ces classements éclairent la géographie mondiale de la mobilité, leur portée reste avant tout indicative : ils traduisent davantage la projection du pouvoir diplomatique et économique d’un État que l’expérience réelle de voyage de ses citoyens.
Un business juteux, le boss d’Henley, Christian Kälin, le « roi des passeports »
Christian Kälin, président du groupe Henley & Partners, est reconnu comme le grand architecte de l’industrie mondiale de la citoyenneté par investissement, un secteur qu’il a contribué à structurer depuis les années 2000. Surnommé le « roi des passeports« , il a bâti un empire sur la promesse d’une mobilité sans frontières pour les ultrariches désireux d’acquérir une nationalité par des moyens financiers légaux.
1. Un business de la mobilité globalisée
Henley & Partners conseille des gouvernements et des particuliers sur plus de 60 programmes de résidence et de citoyenneté par investissement. Ces dispositifs offrent, en échange d’un apport de capital — généralement sous forme d’achat immobilier ou de contribution au budget national — la citoyenneté d’un pays facilitant l’accès à la zone Schengen, au Royaume-Uni ou à Hong Kong.
L’entreprise revendique avoir levé plus de 15 milliards de dollars d’investissements directs étrangers à travers ces mécanismes depuis sa création. « Depuis la crise financière à la fin des années 2000, une douzaine d’États membres de l’Union européenne, en particulier les plus affaiblis économiquement, ont mis en place des dispositifs spécifiques pour attirer des investisseurs non européens, avec des systèmes de ‘visas dorés’ qui permettaient, en contrepartie d’un investissement, d’obtenir un droit de résidence temporaire, ou des passeports dorés permettant d’accéder librement à l’Europe », explique Philippe Jacqué dans Le Monde.
L’Union européenne considère ces pratiques comme une déviation contraire à l’esprit du droit européen. Ces « visas dorés« , qui commercialisent la citoyenneté d’un État membre, accordent de facto la citoyenneté européenne, avec tous les droits de circulation et d’installation sur le continent. Les autorités européennes estiment qu’ils créent un marché parallèle de la nationalité, accessible uniquement aux plus riches et susceptibles de favoriser des activités illégales comme le blanchiment d’argent.
2. Le tournant juridique de 2025
Le 29 avril 2025, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu un arrêt historique (Commission c. Malte), déclarant illégal le programme maltais de citoyenneté par investissements. Elle a jugé qu’une citoyenneté transactionnelle enfreint l’article 20 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), qui définit la citoyenneté comme un lien politique et non commercial. Cet arrêt a condamné Malte, dernier État membre à commercialiser ses passeports, après la fin des programmes similaires à Chypre (2020) et en Bulgarie (2022).
Pour ses critiques, ces programmes illustrent un « capitalisme de passeport », où la mobilité devient un privilège négocié. Entre 2011 et 2019, plus de 42.000 demandes ont été approuvées, représentant plus de 132.000 nouveaux citoyens issus de pays tiers. L’Europe poursuit désormais une ligne stricte : éliminer ces dispositifs d’ici 2026 au nom de « l’égalité de traitement entre citoyens européens et du respect des valeurs de l’Union ».
Pour 250.000 euros de mise, vous pouvez devenir citoyen européen.

