Pourquoi la résistance a-t-elle mis du temps à s’organiser en Belgique durant la Seconde Guerre mondiale
Il est difficile de chiffrer le nombre de résistants belges durant la Seconde Guerre mondiale. Ce qui est certain, précise Fabrice Maerten, historien spécialiste de la question, c’est que 200 000 Belges ont demandé à l’État d’être reconnus comme résistants, et que 160 000 ont obtenu un tel statut.
- Publié le 21-10-2024 à 14h32
La résistance belge a mis du temps à se structurer, raconte également l’historien. En 1940, la victoire d’Hitler est écrasante, et la défaite surprise de la France déroute de nombreux Belges, les paralyse en quelque sorte. Sans oublier que le rexisme de Léon Degrelle a semé son idéologie au sein d’une partie de la population qui n’est pas contre l’avènement d’un pouvoir fort.
« Ce n’est qu’aux environs du 11 novembre 1940, au moment du souvenir de l’Armistice de 18, que de premiers résistants patriotiques, issus de la petite et moyenne bourgeoisie, se manifestent. Ils sont encouragés aussi par l’attitude de l’Angleterre qui tient bon », poursuit Fabrice Maerten. Ce premier 11 novembre n’est pas férié, raconte l’historienne Chantal Kesteloot sur le site belgiumwwii.be. Au pied de la colonne du Congrès à Bruxelles, une foule se rassemble malgré tout. » Les anciens combattants n’ont pas hésité à porter ostensiblement leurs décorations, écrit-elle. Autour du soldat inconnu, le silence fait place à des clameurs patriotiques mais aussi à des cris d’hostilité à l’occupant. On chante la Brabançonne et on arbore des insignes pro-britanniques. C’est la jeunesse qui se montre la plus mobilisée et, parmi elle, des enfants de combattants. » Des arrestations auront lieu et certains résistants seront condamnés à plus de cinq ans de travaux forcés.
Le tournant d’octobre 1942
En Belgique donc, les premières années de guerre verront progressivement s’organiser une résistance de droite, portée notamment par l’Armée secrète et proche de la figure du roi ; une résistance conservatrice, attachée à l’État belge et au gouvernement ; puis une résistance communiste qui se lance une fois que le IIIe Reich aura envahi l’Union soviétique le 22 juin 1941. Cette résistance ne deviendra massive qu’à partir d’octobre 42. « À ce moment-là, alors que le vent commence à tourner en leur défaveur, les Nazis décrètent le travail obligatoire en Allemagne pour les jeunes Belges. C’est un évènement fondamental pour expliquer la résistance de nombreuses familles qui ne veulent pas voir partir l’un des leurs en Allemagne, insiste Fabrice Maerten. L’écroulement de l’Italie puis le Débarquement encourageront aussi la lutte contre l’occupant. D’abord non violente (presse clandestine, récolte de renseignements, aide aux prisonniers…), cette lutte deviendra armée. À l’été 1944, elle rassemblera entre 100 000 et 150 000 personnes et sera soumise à une répression très féroce de la part des occupants, mais aussi de collaborateurs. Durant l’été 44, on assistera à des épisodes de petites guerres civiles dans le Limbourg et dans le Hainaut. »
En définitive, peut-on lire dans les écrits du Cegesoma, les raisons de résister sont multiples en Belgique durant la Seconde Guerre. Elles vont de la défense de valeurs comme le patriotisme, l’antifascisme ou la germanophobie héritée de 1914-1918 à des motivations individuelles, comme le goût de l’aventure ou le besoin de s’émanciper. Les résistants sont dès lors issus de tous les âges, de tous les milieux et de toutes les tendances idéologiques, même si la proportion des militants communistes est supérieure à celle des résistants issus des autres courants politiques.