Belgique

Pourquoi la chute du gouvernement Jeholet est improbable

Depuis lors, les tentatives de conciliation ont échoué. Et, récemment, le PS a dramatisé l’enjeu en faisant savoir qu’une proposition de décret serait déposée mardi au parlement afin de valider les demandes des universités. Selon les socialistes, les députés Engagés, dans l’opposition, pourraient voter avec le PS et Écolo. Dans ce scénario extrême, le parti de Maxime Prévot aurait remplacé les libéraux au sein du gouvernement Jeholet. Et, par effet domino, dans la coalition régionale wallonne emmenée par Elio Di Rupo.

Le PS va déposer un texte au parlement de la Fédération afin de valider les 57 demandes d’habilitation des universités.

Mais cette séquence politique en restera sans doute au stade de la simple menace. Dans les partis, plusieurs forces poussent à une solution dans ce qui reste un dossier périphérique.

Le MR voudra éviter des troubles internes

Le Mouvement réformateur, bien entendu, doit arrondir les angles. Il a beaucoup à perdre : la ministre-présidence de la Fédération, la vice-présidence du gouvernement wallon et trois autres portefeuilles ministériels dans les deux gouvernements… De nombreux “cabinettards” libéraux perdraient également leur job de manière prématurée.

Le MR débarqué, c’est la présidence de Georges-Louis Bouchez qui pourrait aussi être mise en cause. Les ministres déchus pourraient lui reprocher de ne pas s’être montré suffisamment souple. Les contempteurs du jeune Montois trouveraient dans le renvoi du MR dans l’opposition une occasion parfaite pour contester son emprise sur le parti et tenter de le défenestrer. Politiquement, tout pousse le MR à chercher un compromis.

Un cadeau empoisonné pour Prévot

Pour Les Engagés, un retour aux affaires en remplacement des libéraux peut sembler tentant. Mais cette opération pourrait être un cadeau empoisonné. Le parti héritier du CDH et du PSC passerait pour le satellite des socialistes. Maxime Prévot voudra-t-il exécuter des accords de gouvernement, en Wallonie et à la Fédération, négociés sans lui par l’attelage unissant le PS, le MR et Ecolo ?

Paul Magnette lui aurait proposé un “scénario global” permettant cette adaptation des pactes de majorité. On peut imaginer que, dans le package, le PS a indiqué aux Engagés qu’ils resteraient au pouvoir à ses côtés après les élections de 2024. Il n’empêche que Les Engagés devraient assumer une bonne part d’un bilan qui n’est pas le leur, ce qui sera très inconfortable lors de la campagne électorale.

Quant aux verts, qui s’expriment de manière moins audible que les socialistes, ils prônent la modération. Que l’on ne s’y trompe pas, Écolo défend les dossiers de l’UMons et de l’UNamur. Mais le coprésident Jean-Marc Nollet évite d’ajouter de l’huile sur le feu en s’exprimant dans les médias. Les verts soulignent que plusieurs pistes de compromis sur les masters en médecine sont possibles et qu’il ne tient qu’aux libéraux d’accepter d’infléchir quelque peu leur ligne.

La vengeance socialiste

Pour le PS, le jeu de chaise musicale entre le MR et Les Engagés pourrait davantage se révéler payant. Paul Magnette l’a dit à plusieurs reprises : à la première occasion, il se débarrassera des libéraux. Le refus de la ministre Glatigny lui offre l’occasion de démontrer qu’il ne bluffait pas.

Au quartier général du parti, la perspective d’un affrontement électoral violent avec un MR déchaîné, car rejeté dans l’opposition, a ses partisans. Le débat politique n’en serait que plus polarisé entre les rouges et les bleus. De quoi démonter aux électeurs tentés par le PTB que le PS n’a pas perdu sa combativité.

Plus psychologiquement, l’expulsion du MR hors des majorités fédérées résonnerait également comme une vengeance pour Paul Magnette. Selon l’adage, il s’agit d’un plat qui se mange froid… En 2017, les socialistes, au pouvoir à la Région wallonne aux côtés du CDH, avaient dû céder leurs portefeuilles ministériels au MR. Benoît Lutgen, alors président des humanistes, s’était débarrassé du PS. Paul Magnette, ministre-Président wallon, avait dû quitter ses fonctions en pleine législature…

Un accord serait en vue

Toutefois, malgré le sérieux de l’avertissement lancé au MR par le PS, les socialistes privilégient la voie du compromis sur les masters. Ils sentent que le MR ouvre tout doucement le jeu. Les négociations au niveau des cabinets de la Fédération Wallonie-Bruxelles pourraient déboucher sur un accord ce week-end ou lundi, entend-on. “J’ai le sentiment que l’on va atterrir”, juge un socialiste.

L’irruption du dossier “Legoland” vient également chambouler les priorités politiques et devrait pousser PS à l’apaisement. Faut-il vraiment faire exploser les actuelles alliances sur l’offre académique en médecine alors que la région carolorégienne est soudainement touchée par le renoncement du groupe Merlin à investir sur l’ancien site de Caterpillar ?

Le groupe Merlin renonce à son investissement sur l’ancien site de Caterpillar.