Belgique

Plusieurs associations veulent l’interdiction de la reconnaissance faciale à Bruxelles, qui « entravera de nombreux droits et libertés »

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Ce qui permet tout cela, c’est l’intelligence artificielle, et dans ce cas précis, les caméras à reconnaissance faciale. Si le procédé semble alléchant tel qu’il est présenté au cinéma, l’outil n’en reste pas moins illégal en Belgique (deuxième pays européen, avec l’Espagne, où la reconnaissance faciale est interdite). Et pour cause : aucune base légale ne permet de cadrer l’usage de la reconnaissance faciale.

Sauf que la propagation des gadgets technologiques – et, parallèlement, des caméras de surveillance – est telle que l’usage de cette technologie intrusive semble s’imposer malgré tout.

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Plusieurs associations – rassemblées autour du slogan “Protect my face” – ont lancé un appel à signer une pétition interdisant purement et simplement la reconnaissance faciale à Bruxelles. Parmi les organisations, la Ligue des droits humains (LDH) qui rappelle que la reconnaissance faciale a déjà été utilisée par la police belge à plusieurs reprises.

Près de 15 000 caméras rien que dans le réseau Stib

Ce fut le cas en 2017 et en 2019 à Brussels Airport, puis en 2019 et en 2020 lorsque la police fédérale a avoué 78 recherches à l’aide du logiciel Cleraview AI, le nec-plus-ultra de la reconnaissance faciale.

Dans les deux cas, les usages étaient prévus à des fins sécuritaires, mais l’Organe de contrôle de l’information policière (institution en charge de la surveillance de la gestion des données par la police) avait exigé la fin de ces tests, rappelant que les bases légales existantes (notamment la loi de fonction de police) n’étaient pas suffisantes pour permettre un tel dispositif.

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La LDH cite également une étude menée par la KULeuven en Flandre et à Bruxelles, en 2021, et selon laquelle au moins cinq zones de police locale sur 86 répondantes disposent de la reconnaissance faciale. L’une de ces zones de police affirmant même l’utiliser “souvent à très souvent”. Par ailleurs, la ministre de l’Intérieur, Annelies Verlinden (CD&V) a déjà exprimé sa volonté d’avoir recours à la reconnaissance faciale, “à condition que des garanties soient suffisantes en termes de respect des droits de l’homme”.

Des éléments qui font craindre un usage opaque de cette technologie par la LDH, qui prône donc l’interdiction de la reconnaissance faciale à Bruxelles. Le nombre précis de caméras dans la capitale n’est d’ailleurs pas connu. Le dernier chiffre (datant de 2016) évoque 1 365 caméras en région bruxelloise. S’ajoutent à cela les quelque 15 000 caméras qui surveillent l’ensemble du réseau de transports en commun, la Stib.

L’association estime d’ailleurs que c’est au niveau du Parlement bruxellois qu’il faut agir.

Risque de surveillance à chaque coin de rue

Pour les associations de lutte en faveur des droits humains, l’usage de la reconnaissance faciale induit aussi un risque : celui d’une ingérence grave dans le respect de la vie privée et d’une exploitation des données à caractère personnel.

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”L’usage de la reconnaissance faciale par la police et les autorités entravera de nombreux droits et libertés : le droit au respect de la vie privée, le droit à l’anonymat, la liberté de circulation, d’association, de réunion, de rassemblement et de manifestation, le droit à ne pas être discriminé, etc.”, dit la LDH par communiqué. Utiliser la reconnaissance faciale dans l’espace public reviendrait à contrôler automatiquement l’identité de chaque personne à chaque coin de rue.”

La LDH explique également que les logiciels de reconnaissance faciale commettent de nombreuses erreurs envers les personnes « racisées ». En Chine, le géant des télécoms Huawei aurait mis en place un système d’alerte permettant d’identifier, à l’aide de la reconnaissance faciale, des personnes issues de la minorité Ouïgour sur la base d’éléments comme la forme du visage ou des yeux.