Marie-Hélène Ska : « Le gouvernement ne cesse pas d’attaquer le travail »
Les syndicats entament ce mardi le deuxième volet de leur mouvement de grève de trois jours, centré cette fois sur les services publics, après une première journée marquée par d’importantes perturbations dans les transports. Selon la secrétaire nationale de la CSC, Marie-Hélène Ska, « les mobilisations menées depuis des mois ont permis de corriger certaines anomalies, mais sur le fond, les attaques sur le monde du travail continuent ».

Les syndicats commencent ce mardi le deuxième acte de leur grève de trois jours, avec un accent particulier sur les services publics, après une première journée ayant entraîné de fortes perturbations dans les transports. Demain, le mouvement devrait atteindre son apogée avec une grève nationale intersectorielle, invitant tous les secteurs publics et privés à cesser leurs activités.
Marie-Hélène Ska, secrétaire nationale de la CSC et invitée ce matin, affirme que l’accord budgétaire fédéral conclu dans la nuit de dimanche à lundi n’a pas apaisé la colère. Au micro de Matin Première, elle déclare que « les mobilisations menées depuis des mois ont permis de corriger certaines anomalies, mais sur le fond, les attaques contre le monde du travail persistent« .
Indexation
Elle considère que les ajustements obtenus ne modifient pas l’orientation générale des réformes. L’un des points les plus controversés reste l’intervention du gouvernement concernant l’indexation. Le budget prévoit un plafonnement ou un saut d’index pour les revenus dépassant certains seuils, une décision que la CSC interprète comme une rupture de confiance. « Aujourd’hui, nous ne pouvons pas croire le gouvernement puisqu’il décide d’un saut d’index sans tenir compte des balises et du timing qu’il s’était lui-même fixé« , souligne Marie-Hélène Ska, qui rappelle qu’un débat avec les interlocuteurs sociaux était prévu ultérieurement dans la législature.
La syndicaliste réagit aussi à la présentation de cette mesure comme un geste de solidarité entre les salaires élevés et bas. « J’aimerais qu’on arrête d’utiliser le mot solidarité à des fins qui ne sont pas les bonnes« , insiste-t-elle, en faisant référence à l’augmentation des loyers et des coûts de l’énergie.
Pour elle, se concentrer sur « le prix du pain » occulte une réalité plus vaste : la difficulté croissante à se loger, à se chauffer et à joindre les deux bouts pour une grande partie de la population active.
Concernant les pensions, la CSC admet certains correctifs apportés par l’accord budgétaire, tels que la prise en compte de la première année de travail ou des périodes de maladie dans le calcul des pensions pour certaines catégories de travailleurs. Toutefois, Marie-Hélène Ska évoque de simples « corrections » de « profondes anomalies » identifiées dès la première analyse des réformes.
Selon la Secrétaire générale, ces ajustements ne répondent pas aux principales préoccupations concernant l’allongement des carrières, la pénibilité du travail ou les risques de malus sur les pensions.
Malades de longues durées
Un autre sujet délicat est la volonté du gouvernement de remettre 100.000 malades de longue durée au travail. Marie-Hélène Ska s’interroge sur la faisabilité et les hypothèses de cette mesure. « Je ne suis pas médecin, ce sont des médecins qui déclarent que certaines personnes sont malades« , rappelle-t-elle, estimant que le dispositif repose tant sur l’idée implicite que des malades ne le seraient pas réellement que sur le refus d’analyser les causes profondes de la désaffection en fin de carrière. Elle souligne que la pénibilité, l’intensification du travail et la rapidité des changements technologiques sont des facteurs prépondérants.
À la question de la responsabilisation des employeurs dans la prise en charge des malades de longue durée, Marie-Hélène Ska critique une approche budgétaire ambiguë, entre contributions et compensations. Elle estime peu pertinent de raisonner en termes de « coût » ou de « gain » pour les entreprises, alors que « beaucoup d’employeurs sont également désemparés et en difficulté face aux absences répétées« . Selon elle, la priorité devrait être de repenser l’organisation du travail pour prévenir l’usure, plutôt que de se limiter à des incitations financières.
Taxation des comptes titres
L’accord budgétaire contient également des mesures de taxation supplémentaires, ciblant notamment les sociétés de management, les comptes titres et la fraude fiscale, que la CSC considère comme des initiatives « dans le bon sens« , même si Marie-Hélène Ska pense que le gouvernement aurait pu « aller beaucoup plus loin« .
Elle souligne en particulier le volume important d’aides publiques aux entreprises, dont certaines devraient, selon elle, être réévaluées avant de considérer de nouvelles économies dans la sécurité sociale ou les services publics. Alors que la grève des services publics est en cours ce mardi, la secrétaire nationale de la CSC réaffirme que les actions menées ne constituent « jamais une fin en soi« . Elle note toutefois une « surdité de plus en plus marquée du gouvernement« . Les propos attribués au Premier ministre, selon lesquels les manifestations ne l’auraient pas tenu éveillé pendant les négociations, sont perçus comme un signal particulièrement négatif : « Cela témoigne d’une vraie forme de mépris à l’égard de ces mobilisations sociales« , estime-t-elle.
Un marathon d’actions syndicales
Marie-Hélène Ska exprime que la mobilisation s’inscrit dans un processus de longue durée. Elle évoque depuis plusieurs semaines un « marathon » d’actions, qui pourrait continuer au-delà de ces trois jours si un dialogue sérieux ne s’engage pas sur les conditions de travail, la pénibilité et la protection du pouvoir d’achat.
À l’approche de la grève intersectorielle de mercredi, les syndicats entendent donc maintenir la pression sur le gouvernement, qu’ils accusent de ne pas saisir la réalité quotidienne d’un « monde du travail en colère« .

