L’Union européenne va-t-elle abolir le changement d’heure après 7 ans ?
Chaque année, les citoyens avancent leur montre d’une heure en mars pour passer à l’heure d’été, puis la reculente en octobre pour retrouver l’heure d’hiver. Le dernier dimanche d’octobre 2021 devait être celui du dernier changement d’heure, mais le Conseil de l’UE n’a pas suivi.
C’est devenu une question rituelle pour les Européens, à poser deux fois par an : quand va-t-on changer d’heure ? Et quand pourrons-nous en finir avec ce système ?
Introduit dans les années 80 par une directive européenne, ce mécanisme a été harmonisé à l’échelle du continent. Chaque année, les citoyens avancent l’heure d’une heure en mars pour la transition à l’heure d’été, puis la reculent en octobre pour revenir à l’heure d’hiver.
Un rituel bien établi mais de plus en plus fatigant pour les Européens, littéralement.
« Ce changement d’heure vient dérégler nos horloges biologiques », explique la docteure Inge Declercq, neurologue à l’hôpital universitaire d’Anvers (UZA). « On perd du sommeil surtout au moment du passage à l’heure dite d’été, on en sort déréglé. Ce changement est mauvais à tous les égards et surtout pour la santé », affirme cette spécialiste du sommeil.
Un constat similaire est partagé par la docteure Caroline Depuydt, psychiatre et directrice médicale de l’association Epsylonon, qui observe que la transition à l’heure d’été a des effets particulièrement néfastes sur ses patients : « Ce changement d’heure participe à toute une modification au niveau de la lumière. Cela peut contribuer à des crises et à des décompensations, notamment de troubles bipolaires. »
En septembre 2018, le Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a surpris tout le monde en proposant d’abolir le changement d’heure.
« Cette proposition a pris tout le monde par surprise », se souvient avec amusement un fonctionnaire européen. « C’était un beau coup politique. Nous sortions d’un KO infligé par les Britanniques et leur vote sur le Brexit, les élections européennes approchaient et la crainte d’un raz-de-marée populiste inquiétait la classe politique. Il fallait montrer que l’Europe agissait pour ses citoyens. »
Malgré cette belle idée, rien ne s’est concrétisé. Ce n’est pas la faute de la Commission, qui a rédigé un projet de directive, ni celle du Parlement européen, qui a voté le texte tout en ajoutant une échéance : le dernier dimanche d’octobre 2021 devait être celui du dernier changement d’heure… mais le Conseil de l’UE n’a pas suivi.
Officiellement, tous les États membres sont d’accord pour abolir le système. Mais la question demeure : quelle heure choisir, l’heure d’hiver ou l’heure d’été ? Les pays du nord préfèrent l’heure d’hiver, plus en phase avec l’heure solaire et nos rythmes biologiques, tandis que les pays du sud privilégient l’heure d’été. La Belgique souhaite quant à elle que tous les pays du Benelux adoptent la même heure.
Finalement, personne n’est d’accord sur rien. Sans accord, il y a un risque de se retrouver avec autant d’heures que d’États membres, ce qui entraînerait un désordre considérable. Dans ces cas-là en Europe, on remet le couvercle et on attend que ça passe. D’autant plus que, depuis, la pandémie de COVID a relégué le dossier du changement d’heure en bas de la liste des priorités des ministres, qui n’ont plus discuté du sujet depuis décembre 2019.
Cependant, récemment, le dossier a connu un regain d’intérêt. La proposition de supprimer les changements d’heure est réapparue dans la liste des priorités du programme de travail annuel de la Commission.
Cette semaine, devant les eurodéputés, le Commissaire européen aux transports a insisté : « Le temps est venu de mettre enfin un coup d’arrêt au changement d’heure », a plaidé Apostolos Tsitsikostas. « Ce système nous concerne tous, agace la plupart d’entre nous et nous fait du mal alors qu’il ne génère même plus d’économies d’énergie. »
Le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a également exprimé son désaccord sur les réseaux sociaux, affirmant qu’il ne voyait plus de sens au changement d’heure : « Toutes les enquêtes montrent que les Espagnols et les Européens sont majoritairement opposés au système actuel. La science nous dit qu’il ne permet plus d’économiser l’énergie et qu’il perturbe nos rythmes biologiques deux fois par an. »

