Belgique

L’Horeca effaré par une proposition du PS au conclave budgétaire: “On fait tout pour assainir le secteur, et on ne récolte que des sanctions”

La culture de la fraude vit dans l’horeca : « Sans cela, ce serait compliqué »

Mais le conclave budgétaire qui a débuté il y a quelques jours risque de brouiller les relations entre le politique et le secteur. “Le PS a préparé une note sur base de l’état des lieux du secteur que nous lui avons envoyé il y a quelques semaines. En toute transparence, on évoquait la question du travail au noir et des comptabilités parallèles, pour trouver ensemble des solutions et lancer un plan sur plusieurs années pour assainir le secteur, explique Ludivine de Magnanville. Mais tout ce qu’on récolte en retour, ce sont des sanctions ! Le PS veut présenter un projet d’élargissement des boîtes noires, ainsi que des contrôles renforcés et des sanctions plus lourdes. On tombe dans la caricature, comme si tous les indépendants fraudaient. Et cela ne vaut pas que pour l’Horeca, tous les secteurs sont concernés.

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Mais peut-on vraiment s’insurger de voir un parti politique ayant la volonté de faire respecter les lois ? “Ce que je regrette, c’est cette vision à court terme. Le PS veut frapper fort et rapidement pour récupérer de l’argent, alors que le gouvernement pourrait en récupérer bien plus sur le long terme en mettant sur pied un plan concret et bienveillant. Pour faire changer les choses, il faut accompagner les patrons, travailler à des reports de paiements et instaurer une relation de confiance.

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« Qu’on s’entende bien: nous voulons mettre fin au « black » dans l’Horeca et il faut mettre des choses en oeuvre pour redorer l’image du secteur. Mais pas n’importe comment. »

L’Horeca se sent donc trahi, en quelque sorte. “On a passé des mois à bosser sur le sujet, et j’avais une grande confiance en Pierre-Yves Dermagne, que je respecte beaucoup. Mais là, on veut faire passer tous les patrons de l’Horeca pour des fraudeurs qu’il faut contrôler massivement et sanctionner. Mais qu’on s’entende bien : nous voulons mettre fin au “black” dans l’Horeca et il faut mettre des choses en œuvre pour redorer l’image du secteur. Mais pas n’importe comment. Ce plan du PS, c’est la porte ouverte vers de nombreuses faillites, et donc du chômage et de l’argent public qui va arriver d’un côté et repartir de l’autre.

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Un patron témoigne : “Passer d’une comptabilité au noir à du 100 % légal, cela nous a pris 5 ans”

Pour comprendre concrètement les craintes du secteur, nous avons contacté le patron d’un établissement qui est passé d’une comptabilité en noir de 30 %, à du 100 % légal. “Nous avons entamé le processus en 2014, et cela a été long et difficile. Déjà, il a fallu faire accepter à nos employés de changer leur méthode de rémunération. 60 % de nos employés sont partis car ils voulaient garder une partie de leur salaire en noir. Et puis, le coût de la masse salariale est gigantesque en Belgique. Payer quelqu’un au même tarif, cela coûte deux fois plus cher, sans compter les primes de fin d’année et les différentes taxes. Malgré cela, aucun regret et je n’y reviendrais pour rien au monde. Mais on a dû passer par une PRJ pour remettre tout en ordre, et cela nous a pris 5 ans pour en sortir. Nous avions les reins assez solides pour le faire, mais ce n’est pas le cas pour tout le monde…