Belgique

Les débuts chaotiques de la réforme de la collecte des déchets : “Sortons des discours populistes, cette réforme est positive”, assure Alain Maron

Car depuis ce 15 mai, le tri des déchets organiques est obligatoire partout dans la capitale. Dans 10 communes bruxelloises, pour compenser l’augmentation des ramassages de sacs orange, les sacs blancs ne sont plus ramassés qu’une fois par semaine. Les 9 autres communes sont préservées, pour l’instant. “Il n’y aura pas d’autre réforme des collectes sous cette législature”, assure Alain Maron (Ecolo) ministre bruxellois en charge de la Propreté publique.

Bis repetita ?

Il règne une impression de chaos dans la commune. Les voitures roulent sur les déchets”, tonne Benoît Cerexhe (Les Engagés), bourgmestre de Woluwe-Saint-Pierre. “L’information a été déficiente. Les gens ont reçu une enveloppe contenant des données peu claires. Notre commune compte 40 % d’étrangers mais les documents ont été envoyés uniquement en français et en néerlandais. En plus, cela a été fait pendant les vacances. Mardi, nous avons réalisé que 70 % de la masse habituelle des sacs blancs avait été sortie, bien que la collecte n’avait plus lieu ce jour-là. Je crains qu’on assiste à nouveau à un scénario similaire cette semaine.”

”On s’attendait à des difficultés même si c’est un peu plus important qu’attendu. On s’adapte et on est compréhensif”, tempère Mounir Laarissi (Les Engagés), échevin de la Propreté à Jette.

Des tournées rattrapages ont bien été organisées dans certaines communes, en particulier sur les axes stratégiques et commerçants. “Mais elles ne sont pas systématiques sinon les gens n’intégreront pas le changement opéré”, pointe Adel Lassouli, nouveau porte-parole de Bruxelles Propreté. “Pour l’instant, nos agents collent des autocollants sur les sacs pour indiquer les erreurs. Les stocks arrivent ce lundi dans toutes les communes demandeuses.”

Alain Maron défend la réforme qu’il endosse au nom du gouvernement bruxellois. “Il n’y a pas eu de surprise, ni bonne ni mauvaise. Changer les habitudes de 400 000 ménages ne se fait pas du jour au lendemain. Nous devons faire cette réforme pour atténuer les tonnages de déchets qui vont à l’incinérateur, pour des raisons environnementales. Et puis, nous ne faisons jamais qu’anticiper (de quelques mois) une obligation européenne de tri des déchets organiques”, assure l’écologiste qui dément avoir négligé la préparation de la population à la réforme.

guillement

La réforme est intrinsèquement positive, et de toutes façons, elle est obligatoire. »

Bruxelles Propreté a mis en place les campagnes de sensibilisation et d’information les plus massives de son histoire. Et il y a eu une concertation avec les communes. On peut toujours dire qu’il en aurait fallu plus… Nous continuons à travailler à l’information et la sensibilisation”, assure le ministre bruxellois.

La baisse de la fréquence des collectes, même si cela n’apparaît clairement pas pour l’instant, a pour but de diminuer la présence des sacs poubelles en rue. “Moins longtemps des sacs se trouvent en rue, mieux c’est pour la propreté publique. Les sacs se retrouvent souvent déchirés, mal embarqués au moment de la collecte. C’est aussi une des raisons pour lesquelles la conférence des bourgmestres a demandé le rétablissement des collectes en soirée, sur les grands axes. Ainsi, les trottoirs peuvent être balayés le matin et la voirie reste propre jusqu’à la collecte suivante, une semaine plus tard. La réforme est intrinsèquement positive, et de toute façon, elle est nécessaire et obligatoire. “

guillement

Il faut sortir du y a qu’à et des procédures purement théoriques. Cette réforme, ce ne sont pas des décisions politiques, ce n’est pas une vision écologiste, socialiste ou libérale. C’est de l’opérationnel pur.« 

Le ministre balaye d’un revers de la main la proposition des bourgmestres qui réclament qu’on continue pendant 6 mois le ramassage des sacs blancs deux fois par semaine pour laisser aux gens le temps de s’adapter. “Avec quels hommes et quel matériel ramasserait-on les sacs oranges, en plus du reste ? Il faut sortir du y a qu’à. Cette réforme, ce ne sont pas des décisions politiques, ce n’est pas une vision écologiste, socialiste ou libérale. C’est de l’opérationnel pur et la meilleure option après analyse des services de Bruxelles-Propreté.”

Alain Maron ciblé par l’opposition

Cette tentative de dépolitiser la réforme semble peu efficace. Les jeunes libéraux ont placé des poubelles taguées du nom d’Alain Maron devant son cabinet et réclamé sa démission, tandis que le MR s’est coordonné pour monter les problèmes en épingle, en demandant à ses troupes de faire remonter un maximum de photos de poubelles en rue.

Les Jeunes MR déposent des poubelles non collectées devant le cabinet d’Alain Maron : « le ministre prend Bruxelles en otage »
Les Jeunes MR déposent des poubelles non collectées devant le cabinet d’Alain Maron : « le ministre prend Bruxelles en otage » ©D.R.

Les Engagés parlent quant à eux d’un “travail d’amateur” tandis que le PTB cogne fort, lui aussi. Alain Maron est, aux yeux de ses opposants, le coupable idéal…

”Les postures populistes du PTB et du MR”

”C’est une réforme difficile car elle touche le quotidien des gens. Forcément, c’est très exposant. Un certain nombre de mandataires décident de faire de la politique, mais c’est de la politique populiste. Qui peut croire une seule seconde que les jeunes MR géreraient mieux la réforme des collectes ? Ils ont été capables de collecter 15 poubelles et de les exposer 15 minutes pour faire un selfie. Nous faisons ce que nous devons faire. Les postures populistes du PTB et du MR n’aident en rien”, assène le ministre écologiste. “D’autant que si on regarde le système en vigueur à Liège, avec un échevin MR, ou à Zelzate (la seule commune gérée par le PTB), on constate qu’il y a moins de collectes qu’à Bruxelles et que les ménages doivent payer pour elles.”

Quant aux préavis de grève déposés par certains syndicats, Alain Maron se montre cinglant. “Des préavis de grève du SLFP, j’en ai des fardes, en fait. Et c’était pareil pour tous mes prédécesseurs. Mais je note cependant que les travailleurs de Bruxelles-Propreté sont là tous les matins et tous les soirs depuis le début de la semaine, de manière très professionnelle.”

”Une amélioration progressive”

Se dirige-t-on vers une montée en puissance de la contestation, façon Good Move ? Alain Maron, qui estime que nouveaux calendriers de collecte seront progressivement intégrés par la population, dit ne pas craindre ce scénario. “Je ne sais pas encore à quel rythme, mais nous allons aller vers une normalisation. Nous savons tous qu’il subsiste malheureusement trop souvent, et a de trop nombreux endroits, des soucis de propreté. C’est pour ça qu’on agit. Une fois en régime de croisière, on verra les effets positifs de la réforme.”