« Le PS a un sens de l’État que Georges-Louis Bouchez (MR) n’a pas”
Pierre-Yves Dermagne, chef du groupe PS à la Chambre, revient sur la politique hospitalière du ministre Vandenbroucke et sur le processus de refondation du PS. Il estime que son parti a payé aux élections une atmosphère de dégagisme, mais aussi les affaires qui ont touché certains de ses mandataires.
- Publié le 29-03-2025 à 07h05

À la tribune de la Chambre, vous avez déclaré que la poursuite de la réforme du paysage hospitalier pourrait entraîner la fermeture de la moitié des hôpitaux wallons. Cette analyse est contestée par le ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke (Vooruit), mais aussi par l’Unessa, un représentant du secteur. Vous vous êtes planté ?
Absolument pas. Je ne retire pas un mot de ce que j’ai dit. Si on économise plus ou moins 1 milliard d’euros sur les soins de santé, comme le fait le gouvernement, il n’y a pas de secret, les patients et les soignants vont le payer, et il y aura une rationalisation du paysage hospitalier, avec des fermetures de services, voire des fermetures d’hôpitaux. Frank Vandenbroucke disait dans La Libre : « La proximité des soins hospitaliers là où c’est possible, la concentration là où c’est nécessaire ». Il ne faut pas être grand clerc pour savoir ce que cela veut dire.
Ça n’implique pas qu’un hôpital sur deux va fermer en Wallonie.
J’ai parlé de risque sur la base de ce qui avait été présenté par un collaborateur du ministre au secteur. Je sais que Frank Vandenbroucke a dit que son collaborateur s’était exprimé à titre personnel. Mais je ne connais pas un seul collaborateur ministériel qui peut s’exprimer à titre personne, et encore moins chez Frank Vandenbroucke…
Est-ce pour autant une mauvaise réforme ? La littérature scientifique prouve que la concentration des soins pour les pathologies complexes est positive. Et les hospitalisations de jour tendent à se généraliser.
C’est une logique à laquelle je peux souscrire, mais pas à n’importe quel prix et pas partout. Il faut tenir compte des spécificités du territoire wallon et des réalités sociologiques bruxelloises. Pour le moment, ce n’est pas suffisamment pris en compte.
Le PS a lancé samedi dernier son processus de refondation. Qu’en attendez-vous ?
D’abord un débat franc et ouvert avec les militants et les sympathisants, mais aussi avec des gens qui ne sont pas socialistes mais partagent nos valeurs. Toutes ces personnes viennent avec des critiques, positives et négatives. C’est l’essence même du processus qui a été lancé. L’opération va se faire fenêtres et portes ouvertes, pour laisser rentrer de l’air frais, et parfois ça décoiffe.
Quelles critiques vous a-t-on adressées ?
Des critiques sur les compromis qu’on a dû faire, sur l’exercice du pouvoir. Maintenant, le catalogue des horreurs de l’Arizona permet de relativiser les choses. Il y a des critiques aussi sur les dérives de certains, sur les affaires. On l’a payé électoralement, c’est logique. On doit être intransigeants. Je suis « robespierriste » sur ces questions, ma main n’a jamais tremblé.
guillement Durant la campagne électorale, il y a eu une forme de dégagisme que le PS incarnait. Pourtant, le MR est au gouvernement depuis 25 ans, mais il s’en est sorti grâce à la « particip-opposition » de son président.
Durant la campagne électorale, aviez-vous ressenti une forme de rejet du PS ?
Il y a eu une forme de dégagisme que le PS incarnait. Pourtant, le MR est au gouvernement depuis 25 ans, mais il s’en est sorti grâce à la « particip-opposition » de son président, Georges-Louis Bouchez, au fait qu’il n’a jamais assumé le bilan des libéraux, qu’il est parvenu à se présenter comme vierge de toute responsabilité. Nous, on a assumé les compromis. On a aussi pris des décisions difficiles par rapport à certaines personnes, ce que Bouchez n’a jamais fait quand on voit le cas Reynders (l’ex-ministre Didier Reynders est soupçonné de blanchiment d’argent, NdlR). On a un sens de l’État que Georges-Louis Bouchez n’a pas. Il a pollué l’action du gouvernement Vivaldi.
Sa stratégie a fonctionné électoralement.
Le lendemain des élections, c’était ma plus grande interrogation : peut-on encore faire de la politique honnêtement et dans le respect de ses adversaires politiques ?
Paul Magnette, président du PS, a annoncé qu’il serait candidat à sa succession en 2027, à l’issue de la refondation. N’a-t-il pas annoncé sa candidature trop vite, alors que tout reste à faire ?
Je trouve assez sain de dire : « je suis le président qui pilote le processus de refondation du parti et je me soumettrai à l’élection interne à l’issue de ce processus ». Il reste l’homme de la situation.