Le MR refuse de se faire « voler sa victoire » par Ahmed Laaouej et amorce sa contre-attaque
Georges-Louis Bouchez a répondu à la proposition du PS, qui propose de faire un budget bruxellois, voire un gouvernement, avec ou sans le MR. Les libéraux déposeront une déclaration de politique régionale en juin. Malgré le ton martial du message, les libéraux assurent qu’il s’agit « d’une manière de faire baisser les tensions, notamment avec le PS, et de sortir de la crise ».
- Publié le 01-05-2025 à 15h38
- Mis à jour le 01-05-2025 à 16h40

Certains leaders politiques annoncent des durcissements de leur politique avec le sourire, souvent pour atténuer le choc auprès de l’assemblée. Pour des raisons qui lui sont propres, Georges-Louis Bouchez, président du MR, a fait l’inverse ce jeudi face à ses militants.
À l’occasion du meeting du 1er mai de son parti, le Montois a annoncé, sur un ton martial, ce qu’il conçoit comme une tentative de reprise de la concertation entre partis, en vue de sortir de la crise des négociations pour former un gouvernement bruxellois.
Le Montois, en effet, a d’abord tenu des propos peu amènes envers le PS bruxellois. « N’en déplaise à Ahmed Laaouej, vous ne nous volerez pas notre victoire à Bruxelles », a lancé Georges-Louis Bouchez, en référence à la sortie d’Ahmed Laaouej (PS) qui, dans la Libre, n’a pas exclu de former un gouvernement bruxellois sans le MR. Il a été soutenu ce jeudi par Vooruit, qui a appelé à un véritable budget.
Le président du MR a initié dans la foulée sa contre-attaque, annonçant « le dépôt, courant juin, d’une déclaration de politique générale (DPR) au parlement bruxellois. »
Une dynamique good cop/bad cop
Rapidement, son ami David Leisterh est venu à la rescousse sur X (ex-Twitter), dans ce qui commence à ressembler à une dynamique du good cop/bad cop (bon flic et mauvais flic, NdlR). Cette DPR sera proposée « en concertation« , a précisé le président du MR bruxellois. « Les discussions politiques ont entraîné des postures qui semblent indépassables mais en travaillant sur le fond, j’espère réunir tous ceux qui aiment Bruxelles et acceptent des réformes pour la sauver ».
« Il ne s’agit pas d’imposer des choses de manière matamoresque. Ce n’est pas un passage en force. Le but, c’est de concerter cet accord le plus possible, sans exclusive contre aucun parti. Donc potentiellement avec le PS », décrypte une source libérale.
L’analyse libérale peut surprendre, tant elle semble contre-intuitive au regard du ton et des attaques du MR envers les socialistes, en ce jour 1er mai. Elle n’est, en réalité, pas si étonnante.
Une sortie côté salle, une sortie côté cuisine
La sortie de Georges-Louis Bouchez, en effet, doit s’analyser en deux temps. L’une, côté salle, vise Ahmed Laaouej, et s’adresse aux militants MR, à qui il convient de montrer que David Leisterh ne se laissera pas mettre sur la touche dans la capitale.
Quand il est arrivé en tête du scrutin régional bruxellois, le 9 juin dernier, David Leisterh et le MR pensaient en effet mettre un terme à plus de 20 années de purgatoire et d’opposition dans la capitale. Près d’un an s’est écoulé depuis lors et il n’en a rien été. Et c’est à Ahmed Laaouej, qui a mis son veto contre la N-VA, que le MR le doit.
L’autre, côté cuisine, s’adresse davantage aux négociateurs bruxellois, irrités par l’escalade des tensions entre le PS et le MR, mais aussi par l’inefficacité de la méthode MR ces dernières semaines. Le parti s’est obstiné durant un mois dans une voie sans issue, en tentant de convaincre Défi d’embarquer dans un gouvernement bruxellois minoritaire, côté francophone.
Le MR veut donc montrer qu’il ne s’enfoncera pas davantage dans l’impasse du gouvernement minoritaire avec Défi, et qu’il prend des initiatives.
guillement « L’état d’esprit dans lequel nous sommes, c’est de décrisper la situation entre partis, en apportant des débats sur le fond, pour calmer le jeu sur la forme. »
« L’état d’esprit dans lequel nous sommes, c’est de décrisper la situation entre partis, en apportant des débats sur le fond, pour calmer le jeu sur la forme », reprend notre source libérale.
L’impatience des Engagés
Il s’agit aussi de répondre à Ahmed Laaouej. La piste proposée par le PS, qui exclurait potentiellement le MR du gouvernement bruxellois, n’inquiète qu’à ce stade modérément le MR, qui semble assez sûr de son alliance avec les Engagés. Mais les libéraux ont bien noté l’impatience de Christophe De Beukelaer, chef de file des Engagés à Bruxelles, qui les avait exhortés à prendre rapidement une initiative.
Ils ont aussi constaté que la pression montait dans certains milieux de gauche. Un appel citoyen en faveur d’une majorité de gauche à Bruxelles a notamment été lancé ce mercredi, via Henri Goldman (ex-rédacteur en chef de la revue Politique).
Le MR, ce jeudi, a donc proposé son contre-discours. Mais à ce stade, il ne convainc pas ses partenaires potentiels.
« Ce n’est pas comme cela qu’on crée la confiance »
« Le MR reprend à témoin tout le monde sur une déclaration publique. Cela reste la même méthode et ce n’est pas comme qu’on crée la confiance« , pointe un socialiste.
L’ensemble des partis semblent d’accord sur un point: pour réussir, le MR doit changer de méthode, cesser les attaques et créer l’envie pour ses partenaires de travailler avec eux.
Sur le fond, cette nouvelle initiative a-t-elle davantage de chances d’aboutir que les précédentes ? On peut en douter…
Des discussions ont déjà eu lieu sans aboutir en mars, entre sept partis (MR, PS, Engagés, Groen, Vooruit, Open VLD et CD & V). Les libéraux avaient alors refusé les demandes socialistes, notamment sur le logement, dans une séquence qui semble avoir convaincu le PS que le MR ne souhaitait pas d’eux dans la coalition.
Reste que les Engagés, Ecolo, et les autres partis auront désormais à se positionner entre la proposition d’Ahmed Laaouej et du MR, puisque deux chemins sont ouverts.
guillement « Les discours du 1e mai sont passés. J’appelle tous les négociateurs bruxellois à baisser les armes pour les drapeaux blancs, et à collaborer de manière constructive pour trouver un compromis et relever Bruxelles. »
« Les Engagés seront, une fois de plus et comme depuis le 9 juin 2024, constructifs pour collaborer à un projet pour Bruxelles. Nous demandons au formateur qu’il présente rapidement une méthode et un rythme capables de rassembler autour de son initiative« , a déclaré Christophe De Beukelaer, chez qui effleure une pointe d’irritation. « Les discours du 1e mai sont passésJ’appelle tous les négociateurs bruxellois à baisser les armes pour les drapeaux blancs, et à collaborer de manière constructive pour trouver un compromis et relever Bruxelles. »
Concluons par une note d’optimisme, ce qui est un combat voire un devoir moral dans cette négociation bruxelloise. Alors que la négociation était en état de mort cérébrale depuis un mois, il se passe au moins quelque chose sur ce front, depuis ce début de cette semaine…