Belgique

La rupture MR-Engagés à Bruxelles aura-t-elle des conséquences ailleurs ?

Ce jeudi 11 décembre, le président des Engagés Yvan Verougstraete a annoncé qu’il tenterait de former un gouvernement bruxellois sans le MR, pourtant vainqueur des élections. Jean Faniel, directeur général du CRISP, a déclaré que la situation n’a « rien d’exceptionnel » et que dans le cadre d’un processus de formation de gouvernement, il est légitime d’explorer plusieurs voies.


Ce jeudi 11 décembre, Yvan Verougstraete, président des Engagés, a annoncé son intention de former un gouvernement bruxellois sans le Mouvement Réformateur (MR), qui a remporté les élections.

Selon Jean Faniel, directeur général du CRISP (Centre de recherche et d’information sociopolitiques), cette situation n’a « rien d’exceptionnel ». Dans le cadre de la formation d’un gouvernement, il est légitime d’explorer plusieurs options. Si celles-ci échouent, il est normal de chercher d’autres alliances.

Cependant, nous revenons aujourd’hui au scénario initial, qui lui aussi pose des problèmes. Il est donc logique d’essayer une autre approche. « Au printemps dernier, il y a eu une volonté de former une majorité à gauche. Des négociations ont été engagées, mais les socialistes flamands de Vooruit ont finalement décidé de ne pas aller plus loin et l’expérience s’est arrêtée », rappelle Jean Faniel.

Pour le directeur général du CRISP, la nouvelle stratégie des Engagés pourrait avoir des avantages si les centristes réussissent à établir une majorité bruxelloise sans leur partenaire habituel, le MR. Cela prouverait qu’ils peuvent également créer des alliances en dehors du MR.

Néanmoins, les Engagés pourraient également se retrouver dans une position délicate vis-à-vis des libéraux, avec qui ils partagent le pouvoir à divers niveaux. Jean Faniel précise qu’un gouvernement de coalition nécessite des réunions constantes, des discussions et la capacité de négocier et de trouver des compromis. « Il faut voir si cette position ne va pas nuire à la relation existante entre le MR et les Engagés à d’autres niveaux de pouvoir », interroge-t-il.

Le président du MR, Georges-Louis Bouchez, a déjà déclaré que la rupture avec les Engagés à Bruxelles « laissera des traces ». « Il y a de nombreux dossiers où j’ai été loyal envers mon partenaire, mais maintenant nous allons fonctionner en free-lance. Je ne me sens plus lié », a-t-il averti.

Peut-on s’attendre à des conséquences sur les autres niveaux de pouvoir de la part du MR ? Jean Faniel explique que, dans le cadre des accords de gouvernement qui représentent une « feuille de route », les partenaires doivent essayer d’être loyaux. « Si les Engagés demeurent fidèles aux accords de gouvernement, que ce soit au niveau régional, fédéral ou communautaire, cela ne devrait pas poser de problèmes majeurs et le MR ne pourrait pas alors les accuser de déloyauté. »

Cependant, il ajoute que ces accords ne peuvent pas tout anticiper. Face à des situations nouvelles ou spécifiques, le MR pourrait rendre les choses plus compliquées pour les Engagés. Adopter une telle stratégie comporterait des risques pour les libéraux. Si le MR se montre trop intransigeant sur les propositions ou avant-projets présentés par des ministres Engagés, il pourrait également se retrouver confronté à des blocages sur les projets portés par les ministres MR.

« On peut imaginer que des représailles vont compliquer les interactions, mais pour que la situation soit viable pour les deux partis, il faudra maintenir un certain niveau de détente au fil du temps », avertit le directeur général du CRISP. « Il est clair aussi que si les choses devaient se détériorer trop avec le MR en Fédération Wallonie-Bruxelles ou en Région wallonne, les Engagés pourraient envisager un changement d’alliance », ajoute-t-il.

Une telle situation s’est déjà produite en 2017 au niveau de la Région wallonne. À cette époque, le cdH, dirigé par Benoit Ludtgen, avait choisi de ne plus gouverner avec le PS au niveau wallon, formant une courte majorité avec le MR. Le gouvernement dirigé par Paul Magnette avait alors été remplacé par celui de Willy Borsus.

Cependant, au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles, l’équipe dirigée par Rudy Demotte, qui associait le PS et le cdH, est restée en place, n’étant pas remplacée par une alliance avec les libéraux. Cette situation n’a pas empêché le cdH de progresser sur certains projets au sein des deux instances durant les deux dernières années de la législature.

Ainsi, une situation similaire pourrait se reproduire durant cette législature si les Engagés décidaient qu’il n’est plus tenable de gouverner avec le MR à Bruxelles. Toutefois, nous en sommes encore loin à l’heure actuelle.