La nouvelle idée du Fédéral pour combattre le trafic de drogue ? Considérer les dealers comme des travailleurs au noir et les faire cotiser
Éléonore Simonet entre dans la guerre contre le narcotrafic. « Je vais les frapper là où ça fait mal ». La ministre des Indépendants veut mettre un terme à l’impunité en donnant un statut de travailleur légal à ceux qui vivent de business illégaux. Cette mesure, qui s’inscrit en complément des procédures judiciaires, les priverait d’une série d’aides sociales.
- Publié le 30-06-2025 à 10h23

C’est une mesure renversante et originale que veut mettre en place Éléonore Simonet (MR). La ministre des Indépendants se lance dans la guerre aux dealers et autres trafiquants non pas en se positionnant sur le terrain de la justice ou de la sécurité, mais en mobilisant les compétences liées à sa fonction : statut d’indépendant et assurance sociale.
Sa méthode ? Transformer les vendeurs de drogue qui ont un reçu un procès-verbal de la police en… indépendants. L’idée ? Puisque les dealers font du business, à eux d’assumer les charges sociales qui vont avec. Et ça pourra leur coûter très cher si les services parviennent à démontrer que ces travailleurs n’ont pas payé leurs taxes et leurs cotisations sociales pendant plusieurs années.
Fin de l’impunité
« L’impunité ne peut jamais être une option. En obligeant les criminels à payer des cotisations sociales et en leur faisant perdre tout avantage social, nous nous assurons que personne n’échappe aux conséquences de ses actes. Avec cette approche, je frappe les criminels là où ça fait mal : leur portefeuille. Nous rendons notre société plus sûre et nous nous attaquons fermement aux brebis galeuses », déclare Éléonore Simonet.
Il existe déjà une procédure qui consiste à prendre des mesures financières à l’encontre des personnes qui exercent des activités illégales en leur attribuant automatiquement le statut social d’indépendant. Cela se fait via l’Inasti, l’Institut national d’assurances sociales pour travailleurs indépendants. Cette procédure sera dorénavant appliquée systématiquement aux personnes identifiées ou arrêtées par la police, notamment pour vente de drogues, mais régulièrement ignorées par une justice surchargée.
Un simple PV suffit
Concrètement, cela fonctionnera sur deux axes : la transmission automatique des jugements et l’utilisation des constatations policières. Désormais, toutes les décisions judiciaires concernant des affaires de trafic de drogue seront systématiquement transmises à l’INASTI. Attention, l’affiliation peut être rétroactive jusqu’à cinq ans ! De quoi donner des sueurs froides aux trafiquants qui croyaient s’en être tirés à bon compte.
Deuxième volet. Même sans condamnation, un simple procès-verbal de police décrivant clairement une activité criminelle peut suffire à déclencher l’affiliation. « Un PV ou une constatation décrivant clairement une activité professionnelle suffit pour que l’INASTI examine une affiliation », précise le cabinet de la ministre.
Plusieurs dizaines de milliers d’euros à payer
Alors, combien ça va coûter à un dealer moyen ? Cela dépendra des années de travail au noir dont l’Inasti pourra démontrer l’existence. Un trafiquant affilié comme indépendant devra payer des cotisations sociales au taux de 20,5 % sur son revenu net imposable. Pour donner un ordre d’idée : la cotisation minimale actuelle s’élève à 871,71 euros par trimestre.
Mais ce n’est pas tout. Prenons l’exemple d’un dealer qui aurait généré des revenus confortables pendant cinq ans. Avec une affiliation rétroactive, il pourrait se retrouver avec une facture de plusieurs dizaines de milliers d’euros. « Pour une période d’un trimestre seulement, le chômage récupéré peut déjà s’élever à 4 500 euros », ajoute le cabinet ministériel. « Et c’est sans compter sur d’éventuelles autres sanctions. »
Fin des allocs, des bourses…
L’affiliation à l’INASTI entraîne d’autres conséquences. Les personnes concernées perdent l’accès aux avantages sociaux tels que les allocations de chômage (ONEM), allocations familiales, l’aide du CPAS, les bourses d’études ou le logement social, selon leur situation. D’autres sanctions, comme la saisie de biens, restent possibles via des procédures judiciaires.
La mise en place de cette procédure peut se faire assez rapidement. Elle ne nécessite pas d’être discuté au sein du gouvernement car toutes les dispositions légales sont déjà en vigueur. Le cabinet Simonet va toutefois examiner, en concertation avec notamment le ministre de l’Intérieur Bernard Quintin (MR), comment structurer la transmission d’informations vers l’INASTI de manière pérenne.
Légalisation du trafic ?
À partir du moment où le deal de drogue est perçu comme une activité pour laquelle des cotisations et des taxes doivent être prélevées, faut-il considérer le trafic de drogue comme un business légalisé ? « Absolument pas », insiste le cabinet Simonet. « Cette mesure ajoute une couche de sanctions financières en complément des poursuites pénales existantes. L’objectif est de combattre l’impunité en obligeant les criminels à payer des cotisations sociales, et non de légitimer leurs activités. »