La limitation du chômage à deux ans va-t-elle accroître la pénurie dans certains métiers ? “Sans allocations, je vais devoir interrompre mes études”
Actuellement, les personnes qui se forment à un métier en pénurie peuvent conserver leurs allocations de chômage durant toute leur formation. Le ministre de l’Emploi David Clarinval (MR) confirme que la limitation à deux ans s’applique également à ces personnes. De quoi décourager les candidats ?
- Publié le 17-03-2025 à 18h46

La réforme du chômage programmée par le gouvernement De Wever va-t-elle accentuer le manque de travailleurs dans les professions déjà en pénurie ? Ce n’est pas l’objectif recherché, mais cela pourrait bien en être un dommage collatéral. Explications.
Aujourd’hui, les chômeurs qui se forment à un métier en pénurie (soins infirmiers, ouvriers du bâtiment, enseignement,…) peuvent bénéficier d’allocations de chômage durant toute leur formation. C’est un incitant à se réorienter vers un domaine qui manque de ressources humaines. Des milliers de personnes bénéficient de ce dispositif chaque année.
L’accord de gouvernement Arizona prévoit cependant de limiter le bénéfice des allocations de chômage à une durée maximale de deux ans. Le ministre de l’Emploi, David Clarinval (MR), a signalé ce week-end dans la presse flamande qu’il n’y aurait pas d’exception à cette règle, si ce n’est pour les plus de 55 ans. Il n’y aura donc pas d’exception pour les personnes qui suivent une formation à un métier en pénurie. Or, la formation d’infirmière, par exemple, dure quatre ans.
Pas du luxe
Pour certaines des personnes qui se réorientent, les allocations de chômage ne sont pas un luxe. Elles constituent un apport financier indispensable pour des étudiants plus âgés, qui ont déjà une famille à nourrir, un emprunt à rembourser, etc. Privés d’allocations de chômage, ils pourraient se tourner vers le CPAS, mais il n’est pas dit qu’ils auraient droit à un revenu d’intégration sociale, qui n’est octroyé qu’aux personnes en situation précaire, après enquête.
Bref, cette limitation du chômage à deux années pourrait freiner les réorientations vers ces métiers en pénurie. La presse flamande cite les témoignages d’étudiants infirmiers qui s’inquiètent pour la suite de leur formation. Notamment celui de Thomas (34 ans), étudiant en soins infirmiers de Gand : « J’ai deux enfants de 5 et 8 ans et je dois encore payer ma maison. Sans allocations, ce n’est pas financièrement possible et je vais devoir interrompre mes études ».
Rendre ces professions plus attrayantes ?
Selon le VDAB (l’équivalent du Forem et d’Actiris en Flandre), au moins 835 étudiants ont commencé leurs études d’infirmière en 2024 avec des allocations de chômage. Pour l’ensemble des formations professionnelles en cours d’une durée supérieure à deux ans, cela concernait près de 3 000 étudiants.
Le gouvernement fédéral va-t-il prendre le risque de ne pas tenir compte des besoins dans ces secteurs en pénurie ? La mesure va en tout cas à l’encontre de l’objectif, affiché dans l’accord de gouvernement, de lutter contre la pénurie dans les soins de santé en rendant « ces professions plus attrayantes ».
À l’heure de boucler cet article, le cabinet du ministre de la Santé Frank Vandenbroucke (Vooruit) n’avait pas encore donné suite à notre demande de réaction.