Belgique

Jeudi en Prime : Sophie Rohonyi (DÉFI) ne veut pas d’un gouvernement bruxellois sans le MR.

La Région Bruxelles-Capitale est sans gouvernement de plein exercice depuis 543 jours. Selon Sophie Rohonyi, présidente de DéFI, une coalition réunissant le PS, les Engagés, Ecolo et DéFI aurait besoin d’un siège supplémentaire pour obtenir la majorité francophone.


Cela fait 543 jours que la Région Bruxelles-Capitale est sans gouvernement de plein exercice. Jusqu’à présent, l’actuel formateur, le président du MR Georges-Louis Bouchez, n’a pas réussi à débloquer la situation. DéFI sera-t-il le pivot qui permettra de trouver une issue ? Ce parti est convoité par les socialistes, qui cherchent à former un gouvernement sans les libéraux. Toutefois, demain, la présidente de DéFI rencontrera le président du MR.

**Quel choix fera DéFI ?**

Quelle est la position de DéFI dans ces discussions pour constituer un gouvernement bruxellois ? Lorsqu’on demande à Sophie Rohonyi, la présidente de DéFI, s’il n’est pas temps à un moment donné de faire un choix, celle-ci rappelle d’abord que le choix que les électeurs bruxellois ont fait en juin 2024 n’était pas de plébisciter DéFI « comme étant le parti qui doit décider qui rentrera dans ce gouvernement ». « Ce sont au contraire le PS et le MR qui ont été les deux grands gagnants des élections et qui ont aujourd’hui la responsabilité de se mettre d’accord », explique-t-elle, précisant que son but n’est « pas de jouer sur deux tableaux », entre la solution mise en avant par le PS et celle du MR. « Le but, c’est vraiment de voir quel est le parti le plus à même de nous proposer une majorité stable, viable, mais aussi de nous proposer un vrai travail de rigueur budgétaire », dit-elle, pour « redresser la Région afin d’assurer sa survie ».

L’option du PS, de chercher une majorité sans le MR, est-elle réaliste ? Elle serait « très compliquée à mettre en œuvre », estime la présidente de DéFI. Pourquoi ? « L’attelage qui nous est proposé aujourd’hui par Monsieur Laaouej (le chef de file du PS bruxellois, ndlr) ne dispose pas d’une majorité au niveau francophone. 36 députés alors qu’il en faut 37 au minimum », fait remarquer Sophie Rohonyi. Il faudrait alors, explique-t-elle, compter sur le soutien de députés indépendants issus d’autres partis. Cela serait « extrêmement dangereux », en raison du risque de « chantage » que ces députés pourraient représenter. Selon Sophie Rohonyi, qui se base sur l’analyse de la constitutionnaliste Céline Romainville, ces députés demanderaient des gages au gouvernement auquel ils apporteraient leur soutien. Alors que le futur gouvernement bruxellois devra prendre des décisions pour réaliser des économies, la présidente de DéFI voit « mal ces députés assumer ces économies qui seront extrêmement difficiles, qui seront impopulaires, alors que rien ne les lie à ce futur accord de gouvernement ».

Bref, pour DéFI, l’option sans le MR, avec les socialistes et les autres partis francophones, ne semble pas tenable. « Elle me semble bancale, en effet, de la même manière que l’option qui est mise sur la table par le MR qui propose aujourd’hui de nous faire voter un gouvernement avec le MR tout seul », précise Sophie Rohonyi. Pour elle, il faut une majorité au niveau francophone comme au niveau néerlandophone. « La meilleure solution, c’est de voir le PS et le MR travailler ensemble, mettre leur ego de côté et mettre leurs querelles de côté », explique la présidente de DéFI.

Dans ce contexte, on rappellera que le président des Engagés, Yvan Verougstraete, a constaté lundi l’impossibilité, jusqu’à présent, pour le MR de constituer une majorité. Il a laissé un délai de 10 jours avant que les Engagés n’envisagent d’autres options.

Et chez DéFI, on attend aussi. « S’il y a Monsieur Laaouej, Monsieur Bouchez ou l’un des deux qui nous proposent une majorité valide, stable et démocratique, nous prendrons nos responsabilités. Mais là, ce n’est pas le cas », résume Sophie Rohonyi.

**DéFI veut moins de députés bruxellois et diminuer les cabinets ministériels**

Le prochain gouvernement bruxellois devra, dans tous les cas, faire des économies. Le chiffre d’un milliard d’euros est avancé. Quelles sont les priorités de DéFI ?

« Le redressement budgétaire sera fondamental tout en immunisant au maximum le pouvoir d’achat de nos concitoyens bruxellois », répond Sophie Rohonyi, qui rappelle que le pouvoir d’achat est déjà « mis à mal par des décisions prises aux autres niveaux de pouvoir ». Il faudra donc, estime la patronne de DéFI, travailler sur « la réduction des dépenses » et « simplifier l’appareil institutionnel bruxellois ». Il est ici question pour DéFI de « diminuer de manière drastique les cabinets ministériels et le nombre de députés ».

**Très critique envers l’Arizona**

Au fédéral, DéFI ne compte plus qu’un député et est dans l’opposition. De là, il critique les mesures récemment prises par l’Arizona. « Ce gouvernement Arizona a été plus soucieux de se sauver d’une crise politique que de nous sauver d’une crise sociale et budgétaire », explique Sophie Rohonyi. Selon elle, l’accord sur le budget a préservé l’élite « tandis que la classe moyenne, les travailleurs, les pensionnés, les petits indépendants ont été mis à contribution de manière disproportionnée ».

Sophie Rohonyi parle d' »injustice ». Elle épingle la « petite contribution qui passe de 0,15 à 0,30% » sur les comptes-titres de plus d’un million d’euros tandis que « la TVA sur le Take-away, sur le gaz, etc. » sera « un coup de massue pour le pouvoir d’achat ». Elle critique aussi les indexations plafonnées prévues par l’Arizona, parlant de « promesse bafouée » de la part du gouvernement.

La présidente de DéFI s’inquiète aussi des conséquences des réformes du marché du travail voulues par l’Arizona. « Je crains qu’on ne soit pas prêts », dit-elle à propos de l’accueil et de l’accompagnement de ceux qui seront exclus du chômage. Elle s’inquiète de l’arrivée des compensations financières promises par le fédéral. « Si les finances communales sont mises à contribution, finalement, ce sont tous les citoyens qui vont le payer et pas uniquement les chercheurs d’emploi ».

**Seul aspect positif de l’Arizona : le parquet financier**

La décision de mettre sur pied un parquet financier est la seule note positive que relève DéFI parmi les mesures de l’Arizona. « C’est un vrai investissement. Si on veut cesser d’aller chercher dans la poche des honnêtes citoyens, si on veut enfin aller chercher l’argent dans les poches des grands truands, eh bien, c’est là-dedans qu’on doit investir », estime Sophie Rohonyi. « On peut récolter des milliards et des milliards d’euros », selon elle.

La présidente de DéFI appelle toutefois le gouvernement « à ne pas renier ses promesses ». Elle s’inquiète ainsi que certains, au sein du gouvernement, veuillent rattacher le parquet financier « au parquet actuel ». « On doit avoir un parquet qui soit véritablement indépendant pour être véritablement efficace en matière de lutte contre la corruption active et passive », explique Sophie Rohonyi. Il faut, dit-elle, « une frontière claire à l’égard du politique ». Il faut aussi « un renfort financier » et dans le matériel informatique pour lutter, notamment, contre la cybercriminalité.