« J’aimerais que Monsieur Bouchez cesse d’invoquer le nom de mon père et d’insulter sa mémoire »
Deborah Gol demande de respecter la mémoire de son père, un homme qui, trente après son décès, reste une figure de référence pour les libéraux francophones. La justification de Georges-Louis Bouchez convoquée pour expliquer le recrutement d’anciens militants d’extrême-droite est dure à entendre.
- Publié le 13-01-2025 à 14h49
« Trente ans après le décès de mon père, il me semble que sa mémoire mérite d’être respectée et laissée en paix », écrit à la Dernière Heure ce lundi Deborah Gol. La fille de l’ancien ministre et président du Parti réformateur libéral, Jean Gol, est inquiète. Comme d’autres figures libérales, elle a appris ce week-end que trois anciens membres du parti d’extrême-droite Chez Nous avaient rejoint les rangs du MR.
Deborah Gol a toujours été très discrète. Elle a toujours pris soin de ne pas communiquer publiquement sur la politique ou de ne pas faire usage du poids historique de son nom pour peser dans le processus décisionnel du MR. Cela, alors que la mémoire de son père a déjà, à plusieurs reprises, été convoquée sur des questions qui, précisément, ne respectaient pas cet héritage. Aujourd’hui, une justification de Georges-Louis Bouchez l’a poussé à s’exprimer.
« En août, les conditions n’étaient pas réunies », explique le président du MR, au Soir, à propos de la venue des nouvelles recrues. « Pour une raison simple : il ne voulait pas renoncer à ses engagements passés. Cette fois-ci, nous avons discuté, il a fait amende honorable et il a fait œuvre de rédemption publique tout en adhérant aux valeurs du MR. Il n’a aucun mandat, il est simple militant et au moindre écart, il sera exclu. Ce sont des gamins de 20 ans. À cet âge, Jean Gol était chez les étudiants communistes. »
« Choquant »
« M. Bouchez doit savoir ce que cela aurait eu de choquant pour mon père d’être convoqué pour justifier l’adhésion de candidats de l’extrême droite au parti libéral », indique la Liégeoise. « J’aimerais, en d’autres termes, que Monsieur Bouchez cesse d’invoquer le nom de mon père et d’insulter sa mémoire en comparant son parcours à celui de candidats issus d’une mouvance qu’il avait tellement en horreur, notamment en tant que petit-fils de déportés. »
Il y a un peu plus d’un an, Deborah Gol a publié un livre, coécrit avec Rosita Winkler, visant notamment à rappeler quel était le parcours de son père ainsi que ses origines. Dans « Monsieur Magendavid est venu nous dire bonjour… », Mme Gol retrace les événements qui ont mené à la naissance de Jean, fils de Léa Karny et de Stanislas Gol, mais également futur vice-Premier ministre du Royaume de Belgique. L’objectif de ce livre était de protéger le legs de Jean Gol, qui, trente ans après son décès, est parfois utilisé à contresens des valeurs qu’il devrait transmettre.
Son oeuvre a eu tant d’impact sur l’histoire du libéralisme belge que ses successeurs ont nommé leur centre d’étude à son nom. Aujourd’hui, le centre Jean Gol est devenu une arme dans la guerre culturelle menée par Georges-Louis Bouchez.
« Accessoirement, les faits évoqués par M. Bouchez sont erronés. À 20 ans, mon père était aux étudiants socialistes et non communistes. Il avait eu précédemment, vers 16 ans, des sympathies pour les communistes belges, comme de nombreux jeunes dans les années cinquante, car ce mouvement comptait dans ses rangs de nombreux anciens résistants. Comparaison n’est pas raison.«
En 2022, Jules Gheude, essayiste et ancien proche collaborateur de Jean Gol, estimait également que « Georges-Louis Bouchez [dilapidait] l’héritage de Jean Gol ».