Indignation autour de Nadia Geerts et les “restaurants ouverts à Gaza” : “C’est du négationnisme moderne”
La publication de l’essayiste Nadia Geerts, également vice-présidente de la RTBF, à propos de la situation à Gaza, qu’elle a supprimée et elle-même qualifiée « d’imbécile », suscite plusieurs réactions, dont celle de la présidente du CA de la RTBF. Nadia Geerts, elle, déplore la tempête de haine qu’elle subit depuis lors.
- Publié le 29-06-2025 à 17h38
- Mis à jour le 29-06-2025 à 19h07

Un simple tweet sur le réseau social X aura suffi à plonger Nadia Geerts, essayiste, conseillère au Centre Jean Gol du MR mais aussi vice-présidente du conseil d’administration de la RTBF – elle y a été nommée par le MR après les élections –, au cœur d’une vive polémique, sur fond du conflit israélo-palestinien.
Le tweet, rapidement supprimé, évoquait la situation humanitaire à Gaza par ces mots : « Je dis ça avec toutes les précautions nécessaires mais si on cherche un restaurant à Gaza sur Google, on en trouve plusieurs qui ont l’air d’être en activité », en réaction à d’autres publications qui essaiment sur les réseaux sociaux qui minimisent la situation à Gaza, voire affirment que la catastrophe humanitaire qui s’y déroule est un « hoax », une « fausse information ».
guillement « Je ne peux que me désolidariser des propos tenus qui ne correspondent en rien à ma vision des choses et à la réalité. »
À peine publié, ce message a suscité une avalanche de réactions, dont des accusations de « négationnisme » de la situation humanitaire à Gaza et des appels à la démission.
Un tweet effacé, une polémique persistante
Face à l’ampleur de la controverse, Nadia Geerts a rapidement présenté ses excuses publiques, en qualifiant sa publication « d’imbécile« .
« Cette fois, c’est ma faute, suite à un post publié sur X de manière irréfléchie, et que j’ai d’ailleurs retiré après quelques heures en reconnaissant mon erreur. J’aurais dû mieux me documenter, c’est évident« , explique-t-elle. Elle déplore néanmoins l’intensité de ce qu’elle qualifie de « tempête » : « Ce que je vois circuler depuis hier sur les réseaux sociaux, cependant, me semble totalement hors de proportion. On appelle à ma démission ou à mon départ forcé de diverses instances où je n’ai paraît-il plus ma place et ce, malgré le fait que […] j’ai retiré le post problématique et admis mon erreur« , justifie-t-elle.
« Je regrette, encore une fois, ce post imbécile, mais les attaques qui me visent depuis en disent à mes yeux bien plus long sur leurs auteurs, parfois éminents intellectuels progressistes, que sur moi« , avance-t-elle.
Réaction de la présidente de la RTBF, Joëlle Milquet
Joëlle Milquet, présidente du conseil d’administration de la RTBF, a pris ses distances ce dimanche.
« Les propos tenus par Nadia Geerts sont des propos personnels qui n’engagent nullement le conseil d’administration de la RTBF. À titre personnel, il est évident que j’ai des opinions et valeurs différentes sur de nombreux sujets en général et sur la situation de Gaza en particulier. Personnellement, je ne peux que me désolidariser des propos tenus qui ne correspondent en rien à ma vision des choses et à la réalité », confie-t-elle à La Libre. « Le prochain conseil d’administration de la RTBF, quant à lui, sera saisi de cette question, analysera la situation et décidera le cas échéant des suites qu’il conviendrait d’y donner« , prévient-elle.
guillement « Affirmer qu’il n’y aurait pas de famine à Gaza, sur base d’images de restaurants soi-disant ouverts ou de crêpes au Nutella, relève d’un négationnisme moderne. »
Sur les réseaux sociaux, l’ex-présidente d’Ecolo Zakia Khattabi, s’est fortement indignée. « Le dernier tweet de Nadia Geerts, vice-présidente du conseil d’administration de la RTBF, franchit une ligne rouge. Affirmer qu’il n’y aurait pas de famine à Gaza, sur base d’images de restaurants soi-disant ouverts ou de crêpes au Nutella (en référence à une autre polémique d’un chroniqueur affirmant que des gens mangent des crêpes au Nutella à Gaza, sur laquelle Nadia Geerts est revenue, NdlR), relève d’un négationnisme moderne : celui qui s’attaque non plus au souvenir, mais à la réalité présente« , lance-t-elle. « Cette stratégie de disqualification du réel est devenue une arme. Et quand elle est portée par une responsable d’une institution publique censée défendre le pluralisme et l’intégrité de l’information, c’est toute la démocratie qui vacille », renchérit-elle.
Contacté, le PS n’a quant à lui pas encore réagit mais devrait le faire prochainement.
Une défense sous forme de « dénonciation » du côté libéral
Corentin de Salle, directeur du Centre Jean Gol (think tank libéral), appelle à une forme de retenue. « C’est une erreur, elle l’a reconnue et s’en est excusée. Je pense que les réactions que ça a suscité sont compréhensibles mais, pour beaucoup d’entre elles, totalement disproportionnées« , nous explique-t-il. « Ce qu’elle a dit est extrêmement maladroit mais il n’y a pas de déni par rapport au drame qui est en train de se jouer à Gaza et à la catastrophe humanitaire […]. C’est une horreur qui s’y passe mais il reste de l’humain, c’est ça que ça veut dire », tente-t-il de justifier, avant de contre-attaquer.
guillement « Ce qu’elle a dit est extrêmement maladroit mais il n’y a pas de déni par rapport au drame qui est en train de se jouer à Gaza et la catastrophe humanitaire. »
« Il y a toujours des déferlements de haine sur les réseaux sociaux, qui tentent de ‘démoniser’ Nadia Geerts. C’est une femme bienveillante et courageuse. C’est quelqu’un qui a mené une lutte pour le féminisme et la laïcité pendant longtemps mais ce qu’on ne lui pardonne pas, c’est qu’elle continue cela au sein du MR. Ce que certains estiment être une apostasie, une trahison. On la cloue au pilori« , avance-t-il. Par ces mots, il évoque « toute une série de personnes qui ont une appartenance idéologique à laquelle Nadia Geerts a appartenu tout un temps et qui ne lui pardonnent pas d’être partie chez les libéraux. On l’a constaté après notre étude sur le wokisme, qui a suscité de nombreuses réactions frappantes« . Il dénonce donc ce « règlement de compte » et réitère le soutien du centre d’études qu’il dirige à l’essayiste.