Belgique

Il y a environ 112.000 sans-papiers en Belgique: une méthode inédite comptabilise les personnes qui échappent aux radars

L’étude menée par la VUB et Innoviris (l’institut bruxellois de recherche scientifique) s’est penchée sur ces personnes qui habituellement échappent aux comptages. Les chercheurs ont pour cela analysé les registres de décès. En effet, tous les décès enregistrés sur le territoire belge sont répertoriés, que les défunts soient déclarés auprès des administrations ou non avec, à chaque fois, l’âge, le sexe et les causes du décès. En soustrayant les décès des personnes enregistrées du total des décès, les chercheurs sont parvenus à déterminer le nombre de décès de personnes non enregistrées.

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Une méthode originale

Pour la période étudiée, il y en avait en moyenne 500 décès de personnes non enregistrées par an”, explique Johan Surkyn, démographe à la VUB, qui a dirigé l’étude. Les chercheurs ont ensuite extrapolé ce nombre avec les probabilités de mortalité. “Nous connaissons, pour chaque tranche âge, les probabilités de décès. Ces prédictions sont considérées comme très fiables. Elles sont par exemple utilisées par les organismes assureurs”, précise le chercheur. C’est la première fois qu’une telle méthode est employée pour étudier le nombre de personnes qui échappent aux radars. Précision : l’étude n’a pas encore été relue par d’autres scientifiques et elle n’a pas encore été publiée dans une revue.

Au cours de la dernière période étudiée (2012-2016), la Belgique comptait en moyenne chaque jour 489 000 personnes non enregistrées sur son territoire, parmi lesquelles 112 000 personnes en séjour irrégulier. “C’est cohérent par rapport aux estimations qui circulaient jusqu’ici. On estime en général qu’il y a entre 100 000 et 200 000 sans-papiers en Belgique. Nous sommes donc dans une estimation basse”, analyse Johan Surkyn. Un peu moins de la moitié d’entre eux (52 000) seraient à Bruxelles, selon les projections. À cette même période, la Belgique comptait 11,2 millions d’habitants.

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L’âge moyen en hausse

Grâce aux données collectées via les certificats de décès, les chercheurs ont pu constater que durant les trois périodes étudiées (1998-2006 ; 2007-2011 ; 2012-2016), les caractéristiques des sans-papiers ont évolué. En près de 18 ans, l’âge moyen des sans-papiers a légèrement augmenté, passant de 28,4 ans en 2006 à 33,6 ans en 2016. Cette tendance semble montrer que les personnes en séjour irrégulier restent sur le territoire belge, et ce malgré les ordres de quitter le territoire. “Lors des précédentes régularisations (en 1999 et 2009 – NdlR), la plupart des personnes qui ont reçu un titre de séjour avaient entre 25 et 40 ans. Davantage de femmes avaient été régularisées, notamment parce qu’elles avaient des enfants inscrits dans les écoles belges. On voit dans les chiffres que la proportion d’hommes augmente, et la moyenne d’âge aussi. Cela semble montrer qu’un groupe reste sur le territoire. Mais l’étude ne le prouve pas”, observe le chercheur. En 2006, les hommes représentaient 55 % de ce groupe, contre 60 % en 2016.

Le séjour irrégulier n’est jamais une bonne solution. C’est précisément pour cette raison que nous assurons un suivi individuel et que nous renforçons la politique de retour”, a réagi la secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration, Nicole de Moor (CD&V).