Belgique

« Il ne faut pas être un monstre pour commettre ce type de fait »

“Sans préservatif, c’est mort !”: un viol “ordinaire” jugé en fonction du nouveau Code pénal sexuel

La prévention de viol n’est pas contestée. “Il aurait dû entendre et comprendre que c’était non à ce moment-là”, dit l’avocate. Mais cela s’est produit dans la dynamique d’une relation romantique, puis sexuelle, entre deux personnes adultes, ajoute la défense. Lors de la rencontre avec Lucie, il n’y avait aucune intention de lui faire du mal ; ils voulaient tous les deux passer un bon moment ensemble.

”Beaucoup d’hommes ont déjà été trop loin”

Dans ce type de relation, qui n’est pas contractuelle, on peut changer d’avis. On peut, après dix minutes, ne plus avoir envie et se rétracter, continue-t-elle. À la lumière du progrès de la société en matière de consentement, quand il y a ambiguïté, il n’existe pas, tranche-t-elle. Autrement dit : “Quand ce n’est pas clair, c’est que c’est non !”.

« J’étais en fugue. Il nous a donné à manger. Bah, je devais coucher…” : certaines ados exploitées sexuellement banalisent la prostitution

Lucie a été très courageuse, salue l’avocate. “Beaucoup de femmes n’auraient pas osé se présenter à la police, de peur de ne pas être crues. En déposant plainte, elle a pris la bonne décision. Ce n’est pas parce qu’elle a invité mon client chez elle et qu’il y a eu des préliminaires entre eux qu’il avait le droit de la pénétrer.”

C’est un dossier très actuel ; de nombreuses femmes ont le même vécu, poursuit la défense. Elle cite un récent sondage d’Amnesty International, en 2020, selon lequel 20 % d’entre elles (soit une sur cinq) déclarent s’être déjà vu imposer une relation sexuelle. “Cela veut aussi dire que beaucoup d’hommes ont déjà été trop loin. Cela n’a rien à voir avec le fait qu’il est multirécidiviste. Il aurait dû entendre ce non, arrêter et la laisser tranquille”.

Un sursis probatoire avec un cadre strict

Mais que faire du prévenu, qui a déjà purgé 7 ans de prison ? À l’inverse du parquet, la défense estime qu’il n’est pas irrécupérable : “Il y a encore de l’avenir. Un travail peut être fait”, assure-t-elle. “Neuf ans en prison, sans suivi, ce n’est pas la solution. Pourquoi ne pas envisager un sursis probatoire ? Avec un cadre strict, comme une interdiction totale de consommer de l’alcool et une thérapie à un rythme plus soutenu, une fois par semaine.”

Si le tribunal veut infliger une peine effective, la défense demande de diminuer le tarif de la peine. “Neuf ans, je trouve ça énorme…” Elle répète : il faut regarder le dossier en faisant abstraction des antécédents : “Il ne faut pas être un monstre pour commettre ce type de fait”.

La 54e chambre du tribunal correctionnel de Bruxelles doit prononcer le jugement ce mardi 14 mars.