Guerre Israël-Gaza : les colons de Shilo déclarent « Il n’y a pas de Cisjordanie »
La route 60 relie l’ensemble des colonies en traversant les territoires palestiniens. La colonie Shilo, au nord de Jérusalem, reste illégale en vertu du droit international.
Au loin, le minaret d’un village palestinien se profile. Au premier plan, un imposant chandelier rappelle aux conducteurs circulant en contrebas qu’ils sont surveillés par les forces israéliennes. La route 60 connecte les colonies en traversant les territoires palestiniens.
Il est donc tout à fait possible de traverser l’ensemble de la Cisjordanie occupée à bord d’une voiture immatriculée en Israël, sur des routes entièrement contrôlées par l’État israélien.
Cette zone est extrêmement sensible, notamment en raison des attaques palestiniennes à la voiture-bélier. Les forces de sécurité sont omniprésentes.
Nous arrivons à Shilo, une colonie au nord de Jérusalem, où l’accès est réservé à ceux qui y ont été conviés.
Israel Medad est un fervent défenseur de l’implantation des colonies dans les territoires palestiniens, qu’il refuse de désigner comme Cisjordanie. Il préfère l’appeler par son nom biblique : « Nous sommes en Judée Samarie (…) Il n’y a pas de Cisjordanie ».
À quelques centaines de mètres d’un village palestinien, 400 familles israéliennes résident, totalisant 2 500 colons répartis sur quelques collines. « On doit être partout, » explique Israel Medad. « Il n’y a aucune terre au monde où le peuple juif ne peut pas vivre. Et surtout dans le pays d’Israël. »
La communauté de Shilo est extrêmement religieuse. Dans son petit café, Shilat évoque la protection divine pour justifier le développement de la colonie. « Mon sentiment, c’est qu’on est protégé, » déclare-t-elle. « Le Tout Puissant nous protège. » Pour elle, il est inconcevable de envisager un État de Palestine : « Il n’y a pas de Palestine. Ici, c’est le pays d’Israël, promis au peuple d’Israël. »
Le Grand Israël est le souhait d’une partie de ces colons, un terme désignant l’annexion de l’ensemble de la Cisjordanie, impliquant l’expulsion des Palestiniens.
Bien que la colonie de Shilo soit autorisée par les autorités israéliennes, elle demeure illégale selon le droit international. Pour ses occupants, son expansion est une question de sécurité. « Mettez Gaza ici… Et quand je dis Gaza, je pense ‘terroristes’, ‘Hamas’, ‘Djihad islamique’, les salafistes, tout ce que vous voulez. Que pensez-vous qu’ils vont faire ? Ils feront ce qu’ils ont toujours fait : on trouvera des roquettes, des mortiers, toujours plus d’armes, des drones… », affirme Israel Medad.
Se sentant menacés par leurs voisins palestiniens, les colons de Shilo sont souvent armés, à l’image d’Ovadia : « J’ai une arme parce que je suis un soldat. Je suis sorti de Gaza hier. Et puis, je ne veux pas qu’une autre attaque terroriste se produise sans que je puisse intervenir. Nous avons des ennemis ici. »
Ainsi, lorsque Donald Trump demande à Benjamin Netanyahou de ne pas annexer la Cisjordanie, les réactions sont virulentes. « Il a tort, » réagit Israel Medad. « Après ce qu’il s’est passé le 7 octobre, demander à Israël de simplement se retirer du champ de bataille, sans avoir rien gagné. Sans anéantir le Hamas, sans désarmer, avec un État de Palestine. Il ne s’agit pas que de la non-annexion… C’est envoyer le message aux Arabes en disant : ‘Faites pire la prochaine fois’. »
En multipliant les implantations, les colons israéliens exacerbent le ressentiment des Palestiniens. Les attaques des Palestiniens contre les colonies encouragent les Israéliens à vouloir annexer la Cisjordanie davantage… Une histoire et une guerre sans fin, en quelque sorte.
Reportage de Régis De Rath et Garry Wantiez, avec Christophe Bernard et Daniel Fontaine.

