En Flandre, certaines communes voient les radars routiers comme une mine d’or. Et en Wallonie ?
La ministre flamande de la Mobilité, Annick De Ridder (N-VA), annonce dans sa note de politique générale vouloir mettre fin à l’utilisation perverse des amendes routières qui servent à renflouer les caisses des communes. En Wallonie, la Région prépare aussi ses amendes routières administratives.
- Publié le 20-11-2024 à 19h52
Depuis février 2021, les communes flamandes sont autorisées à infliger leurs propres amendes administratives en cas d’excès de vitesse, aux endroits où la vitesse maximale autorisée est de 30 ou de 50 km/h. Ce n’est possible que si le dépassement est de maximum 20 km/h au-dessus de la vitesse autorisée (sinon les poursuites seront pénales et non administratives) et si le radar a été financé par l’autorité communale. Le montant de ces amendes est compris entre 53 et 163 euros et va directement dans la poche des communes.
Le dispositif présente un avantage : la police n’est plus seule à faire la chasse aux excès de vitesse et les communes peuvent l’aider. La sécurité routière peut s’en trouver renforcée et les finances locales améliorées. De Morgen écrivait mercredi que les montants récoltés par les communes flamandes étaient en augmentation. L’an dernier, le total atteignait près de 124 millions d’euros.
Surtout pas de ralentisseurs…
Mais il semble que de nombreuses communes détournent ce mécanisme d’amendes routières administratives pour en maximaliser les rentrées financières. Certaines choisissent de placer les radars à des endroits où les excès de vitesse sont nombreux plutôt qu’aux endroits les plus dangereux. D’autres refuseraient même de placer des ralentisseurs aux endroits concernés, afin d’assurer des rentrées plus juteuses. Tout cela au détriment de la sécurité.
En outre, il semble que des entreprises privées ont flairé le bon filon. Faute d’expertise et de budget d’investissement, certaines communes font appel au privé pour installer et entretenir les dispositifs de contrôle. Des dizaines de communes auraient entamé un partenariat avec une société privée, laquelle percevrait 24 euros par amende de 53 euros. Plus il y aura d’excès de vitesse constatés, plus la commune et l’entreprise engrangeront des montants élevés.
Dépénalisation
La ministre flamande la Mobilité, Annick De Ridder (N-VA), entend s’attaquer à ce dévoiement des amendes routières, annonce De Morgen. Ce projet figure dans la note de politique générale de la nouvelle ministre. Selon elle, « la répression ne peut en aucun cas être un mode de financement. Elle doit renforcer la sécurité routière et être perçue comme équitable ». Annick De Ridder compte évaluer le dispositif. Son cabinet explique : « Le système actuel a des effets pervers indésirables. Certaines municipalités ne sanctionnent pas là où l’insécurité est la plus grande, mais là où elles peuvent générer le plus de revenus. De plus, les communes ne peuvent pas envisager d’arrêter ou même de supprimer les dispositifs ralentisseurs dans le seul but de faire des bénéfices. »
Les spécialistes de la sécurité routière regrettent par ailleurs que ce système d’amendes routières administratives aboutit à une forme de dépénalisation. « Vous pouvez être amené à payer cinquante fois une amende administrative pour excès de vitesse. Mais si vous comparaissez plus tard devant un magistrat pour une autre infraction au code de la route, il n’en saura rien », explique un expert cité par De Morgen.
La ministre De Ridder compte mettre fin à cette impunité. Elle veut développer un système d’enregistrement dans lequel les infractions au code de la route identifiées par les communes seront stockées. Elle veut également relier ces données aux données fédérales. Si le permis à points voit le jour, les amendes administratives pourraient alors déboucher sur un retrait de points.
Et en Wallonie ?
Et qu’en est-il au sud du pays ? Interrogé par La Libre, le cabinet du nouveau ministre de la Mobilité François Desquesnes (Les Engagés) assure que « la situation est totalement différente » et que « les radars sont localisés pour répondre aux enjeux de sécurité routière ». D’ailleurs, ajoute la porte-parole du ministre, « en Wallonie, seule la Région peut (faire) installer des radars fixes ». Les communes n’ont donc pas l’opportunité de flasher à gogo pour renflouer leurs finances.
Cependant, le gouvernement wallon travaille à la mise en place d’un système qui permettra de transformer certaines amendes routières pénales en sanctions administratives, explique-t-on au cabinet Desquesnes. Un décret a été adopté en 2019 mais son arrêté d’exécution n’est pas encore sorti. Ici, ce ne sont pas les communes qui pourront placer des radars et percevoir les amendes, mais bien des agents régionaux assermentés. « On n’a pas voulu faire comme la Flandre, pour éviter que les règles changent d’une commune à l’autre », dit le cabinet. Cela concernera les excès de vitesse dans les zones 30 et 50 (avec un dépassement de maximum 20 km/h), comme en Flandre, mais également des zones où la vitesse autorisée est supérieure (avec un dépassement de maximum 30 km/h). Les amendes seront directement perçues par la Région. « Cela permettra de désengorger le fédéral. Dans certaines zones, il n’y a pas assez de policiers pour traiter tous les P-V). » La date d’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif n’est pas encore connue.