Belgique

Élections en Irlande : un deepfake d’une candidate ne rassure pas en campagne présidentielle

Ce vendredi, environ 3,6 millions de citoyens sont appelés aux urnes en Irlande pour élire le successeur de Michael D. Higgins, président depuis 2011. En réaction à une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux annonçant faussement son retrait, Catherine Connolly a dénoncé « une tentative honteuse de tromper les électeurs et de saper la démocratie » et a déposé plainte auprès de la commission électorale irlandaise.


Ce vendredi, environ 3,6 millions de citoyens sont appelés aux urnes en Irlande pour élire le successeur de Michael D. Higgins, président depuis 2011.

Trois noms figurent sur le bulletin : Catherine Connolly, députée indépendante soutenue par plusieurs partis de gauche, Heather Humphreys, ministre issue du Fine Gael (centre-droit, membre de la coalition gouvernementale) et Jim Gavin, ancien candidat du Fianna Fáil (centre-gauche) qui a annoncé son retrait trop tard pour que son nom soit retiré. Le vainqueur, qui deviendra le dixième président de la République d’Irlande, sera proclamé samedi soir au château de Dublin.

Mais cette fin de campagne se distingue par l’arrivée de l’IA dans le processus électoral.

**Une fausse annonce de retrait**

Mardi soir, une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux a suscité l’attention. Elle montrait une version factice de Catherine Connolly semblant annoncer son abandon du scrutin. La vidéo, conçue pour imiter un reportage de la chaîne publique RTÉ, affirmait même que « l’élection est annulée et Heather Humphreys gagne par défaut ».

En réaction, Catherine Connolly a dénoncé « une tentative honteuse de tromper les électeurs et de saper la démocratie », a rapporté la BBC. Elle a déposé plainte auprès de la commission électorale irlandaise, tout en appelant les internautes à ne pas relayer la vidéo : « Si vous voyez cette vidéo, ne la partagez pas – signalez-la. La meilleure réponse au mensonge, c’est le vote ».

La vidéo, désormais supprimée de la plupart des réseaux sociaux, impressionne par son réalisme. Elle illustre les avancées spectaculaires des outils de génération d’images et de vidéos, tels que Sora d’OpenAI, créateur de ChatGPT, ou Veo de Google.

Bien que certains détails puissent encore éveiller des soupçons, comme un son légèrement artificiel, des mouvements de lèvres imparfaits ou un grain d’image inhabituel, ces indices deviennent de plus en plus difficiles à détecter au premier coup d’œil.

La Commission européenne enquête sur Meta (Facebook et Instagram) depuis avril 2024 pour des manquements présumés au Digital Services Act (DSA), une législation obligeant les grandes plateformes à réduire les risques pour les processus démocratiques, y compris la désinformation.

En Irlande, c’est le régulateur Coimisiún na Meán qui est chargé de surveiller ces plateformes. L’autorité « a contacté le réseau concerné pour lui rappeler ses obligations en période électorale ». Cependant, selon Euractiv, l’Irlande « n’a pas encore pleinement doté son futur régulateur de l’IA des moyens nécessaires pour faire appliquer le nouvel AI Act ». Autrement dit, la loi européenne contre les manipulations algorithmiques n’est pas encore complètement opérationnelle.

Meta a déclaré à Euractiv avoir « supprimé certaines vidéos liées à Connolly car elles violaient ses règles sur l’interférence électorale », sans confirmer si le deepfake original avait bien été retiré. La plateforme a assuré avoir « déployé une équipe dédiée en Irlande pour répondre rapidement à toute menace de désinformation ». YouTube, de son côté, a affirmé avoir « supprimé la chaîne ‘RTÉ News AI’ pour usurpation d’identité ».

En conclusion, cette affaire peut agir comme un avertissement. Les deepfakes deviennent des armes de désinformation redoutables en période électorale.

Connolly a promis de ne pas se laisser détourner de sa campagne : « Je continuerai à parcourir chaque comté pour défendre une présidence pleine d’espoir et d’inclusion ».