Belgique

Eléanore, 6 ans, « On a cru la perdre », dit sa maman Lola.

Lola a constaté l’apparition de petites taches mauves sur le ventre de sa fille Éléanore, qui dormait beaucoup plus et tétait moins. Après plusieurs examens, Éléanore a été diagnostiquée avec une leucémie myéloïde aiguë (LMA) et a commencé un traitement de chimiothérapie, ce qui a entraîné des effets secondaires importants.


La mère s’interroge sur une éventuelle varicelle. Le pédiatre, quant à lui, n’est pas inquiet. Peut-être s’agit-il simplement d’une folliculite ? Il ne juge pas nécessaire de procéder à des analyses sanguines. « Plus tard, j’ai appris que c’était l’un des premiers signes du type de leucémie qu’elle a », regrette Lola.

Trois à quatre semaines passent. Un jour, Lola constate que sa fille présente de petites taches mauves sur le ventre. « Comme des bleus », décrit-elle. Elle remarque également un changement dans le comportement d’Éléanore. « Elle dormait beaucoup plus, elle tétait moins, elle transpirait énormément la nuit… »

Lors d’une consultation à l’ONE, Lola évoque ses préoccupations. Les professionnels de santé semblent perplexes. Se demandent-ils si le bébé a subi des violences ? « Je l’ai un peu mal pris », se rappelle Lola. Inquiets, les parents se rendent à l’hôpital où un médecin examine une nouvelle fois Éléanore. « Pour lui, l’examen clinique était bon. Je ne trouvais pas cela normal, mais pour lui, tout allait bien. Donc nous sommes rentrés à la maison. »

Encore un mois s’écoule. La maladie progresse, se traduisant par l’apparition de petites bosses. D’abord une gourme au niveau de l’oreille, puis rapidement deux, trois… Lorsque le bébé est admis aux urgences, des petites bosses sont visibles jusqu’à son front. Cette fois-ci, les médecins s’alarment. « Ils ont fait une prise de sang et le verdict est tombé », raconte Lola. Éléanore est atteinte d’une leucémie myéloïde aiguë (LMA).

« Ma première réaction a été de pleurer. Je leur ai dit : ‘Elle va mourir’. Dans ma tête, un cancer était égal à la mort. » Immédiatement, Éléanore est transférée vers les Cliniques universitaires Saint-Luc, à Bruxelles. Lola se souvient de l’arrivée aux soins intensifs. « C’était très impressionnant. Il y avait des machines partout, du bruit partout… J’étais dans un état de stress total. »

Le lendemain, les médecins présentent aux parents les protocoles de chimiothérapies. Même à très petites doses, pour un bébé de deux mois, le traitement s’annonce violent. Dès la première chimiothérapie, les effets secondaires sont accablants. Lola et Julian, le père, croient même perdre leur fille. « C’était un gros moment de stress », se souvient Lola. « Systématiquement, après les séances de chimiothérapie, elle fait un choc septique, sa peau se marbre, sa tension monte très haut, puis elle descend très bas… »

Heureusement, ce traitement de choc porte immédiatement ses fruits. « La diminution des cellules tumorales a été très rapide », confirme Lola. Mais la bataille sera longue. Les séances de chimiothérapie se succèdent, et la petite Éléanore fait des allers-retours aux soins intensifs. « On n’est jamais à l’abri d’une infection ou d’une éventuelle complication », explique sa mère.

Avec la chimiothérapie, les défenses immunitaires d’Éléanore sont au plus bas. Le moindre virus peut lui être fatal. Pour cette raison, l’enfant a été placée dans une chambre à l’isolement. Les mesures d’hygiène y sont strictes et les visites limitées. « Quand on entre dans sa chambre, on change systématiquement de vêtements et de chaussures », détaille Lola.

La jeune femme passe une grande partie de ses journées à l’hôpital, relayée par Julian. Les nuits sont courtes et la fatigue s’installe. Lola regrette de ne pas pouvoir passer des moments importants avec ses deux aînés, Mia et Mao. « Aller les chercher à l’école, leur demander comment s’est passée la journée, leur lire une histoire avant d’aller dormir… Tout ça me manque. »

« Dans une chambre à l’isolement, on se sent encore plus seuls. On n’a pas de contact avec l’extérieur. Il y a un sas. On ne voit même pas ce qui se passe dans le couloir. » Lola et Julian soulignent néanmoins l’accompagnement attentif du personnel médical. « Les médecins sont très précis dans ce qu’ils nous expliquent. » Face aux angoisses et à la charge administrative liée aux traitements, les parents peuvent également compter sur le soutien d’une psychologue et d’une assistante sociale de l’hôpital.

Les mois passent et l’état d’Éléanore s’améliore, au point de lui autoriser de petites sorties en famille. C’est l’occasion de revoir enfin son frère et sa sœur. Lente mais réelle, la famille commence à envisager une sortie de l’hôpital, peut-être pour la fin de l’année. « Par la suite, elle aura encore de nombreux rendez-vous à la clinique, peut-être trois ou quatre jours par semaine », tempère la mère. « Avant de parler de guérison totale, il faut que cinq ans s’écoulent sans rechute. »

Depuis son accouchement, Lola n’a pas pu reprendre son travail tandis que Julian passe son temps entre l’hôpital et les deux enfants restés à la maison, étant désormais au chômage. Les revenus du couple se sont réduits. Pour Lola, c’est la panique. « On est constamment sur le fil du rasoir. Or, à l’avenir, il faudra que quelqu’un reste en permanence avec Éléanore pour la surveiller et gérer ses nombreux examens médicaux. Une partie des traitements est prise en charge par la mutuelle, une autre par l’assurance hospitalisation complémentaire, mais pas la totalité », explique Lola.

Toute la famille, à Namur et à Bruxelles, se mobilise pour collecter des fonds. Lola a décidé d’ouvrir une cagnotte en ligne. « Je ne m’y attendais pas du tout. Les dons ont explosé. Les gens sont d’une grande générosité », se réjouit-elle.

Lola a décidé de raconter le combat d’Éléanore, d’abord dans un journal intime, puis sur une page Facebook où elle donne régulièrement des nouvelles. « Je me disais qu’elle n’aurait aucun souvenir de son histoire et que si, par malheur, elle devait disparaître, je voulais que tout le monde se souvienne de son courage. »