Chez Delhaize, Intermarché et bientôt Carrefour : l’engouement des consommateurs pour les courses du dimanche.
Environ 80% des magasins franchisés ouvrent leurs portes le dimanche, et certains sont même ouverts toute la journée. Selon Jo Willemyns, COO Food Retail, « Un client moyen qui fait ses courses dans un supermarché belge le dimanche dépense en moyenne 27 euros », ce qui est inférieur aux 35 euros dépensés les autres jours de la semaine.
La « révolution » du dimanche de Delhaize
Un dimanche matin, sur le parking d’un Delhaize à Bruxelles, il est difficile de trouver une place. À l’intérieur, les allées sont pleines et il y a une file d’attente aux caisses. Environ 80 % des magasins franchisés sont ouverts le dimanche, certains toute la journée, comme n’importe quel autre jour. Delhaize n’a pas encore de chiffres à communiquer, mais la chaîne de supermarchés estime que le dimanche est devenu, pour beaucoup, l’équivalent d’un samedi.
« Delhaize a révolutionné de la sorte la totalité de la grande distribution belge, en a réécrit les règles », affirme Pierre-Alexandre Billiet, CEO de Gondola. Selon lui, malgré l’attention portée sur la franchise de 128 magasins et la colère sociale qu’elle a engendrée, l’ouverture massive le dimanche mérite également d’être soulignée. « Tout le monde a parlé de la franchise, mais la plus grande révolution a été l’ouverture en masse le dimanche sous de nouvelles commissions paritaires. Ils savent ouvrir le dimanche et ils savent le faire de manière rentable. »
Pour Billiet, la façon dont les courses sont faites a changé. « Nous étions un pays où le dimanche était encore ‘sacré’. La franchisation de Delhaize a poussé les consommateurs à quitter leur canapé pour faire leurs courses. C’est un changement économique et culturel qui s’est opéré rapidement et que ses concurrents ont sous-estimé. »
Pierre-Alexandre Billiet nuance cependant son propos en faisant remarquer que les heures d’ouverture des franchisés le dimanche nécessitent une réévaluation. « La rentabilité vient essentiellement du dimanche matin. L’après-midi est souvent moins intéressante. Il faut aussi une flexibilité de gestion lors des autres jours de la semaine, où la fréquentation est moindre. »
Si de nombreux magasins de proximité étaient déjà ouverts le dimanche, les consommateurs n’y faisaient que des courses de dépannage. Aujourd’hui, ils réalisent leurs « grosses » courses.
Qui est l’acheteur du dimanche ?
Il est difficile de définir précisément le profil de l’acheteur du dimanche, mais certaines caractéristiques émergent :
– Le consommateur du dimanche évite souvent d’acheter le lundi ou le mardi.
– Il utilise des caddies plus grands : « On se rend compte que quand il a le temps, le consommateur achète plus », selon Gondola.
– C’est souvent un consommateur avec un pouvoir d’achat plus élevé, car ce sont souvent ceux qui manquent de temps durant la semaine en raison de leur travail ou de leurs enfants.
Et les autres grandes surfaces ?
Le groupe Colruyt prévoit d’ouvrir ses magasins Okay le dimanche matin à partir de janvier prochain, focalisés sur des produits frais comme les viennoiseries. Hanne Poppe, porte-parole du groupe, estime que « le dimanche matin, les clients achètent des petits pains, des croissants et des choses qu’ils ont oubliées. » D’autres enseignes du groupe, comme les Okay City ou les 4 marchés Cru, sont déjà ouvertes le dimanche matin.
La raison pour laquelle les magasins Colruyt restantes ne sont pas ouverts le dimanche a été révélée lors d’une assemblée générale : « Un client moyen dépense 27 euros le dimanche », a déclaré Jo Willemyns, COO de Food Retail. Ce montant s’élève à 35 euros les autres jours et à 70 euros chez Colruyt. Avec des tickets de caisse à 27 euros, il est impossible d’ouvrir de manière rentable le dimanche.
Certains magasins Carrefour sont déjà ouverts le dimanche, mais pour Lidl et Aldi, cette question n’est pas d’actualité, bien qu’ils surveillent le marché de près. Selon le CEO de Gondola, « plus les chaînes comme Lidl ou Aldi attendent, plus leur part de marché diminueront. Leur modèle est basé uniquement sur l’efficacité ; aujourd’hui, le modèle gagnant allie efficacité et flexibilité. »
Tous ouverts le dimanche ?
Le succès des magasins qui ouvrent le dimanche amène à se demander si toutes les grandes surfaces devraient suivre cette démarche. Selon notre expert, « fondamentalement, l’ouverture des magasins le dimanche n’est pas un acte gagnant. Mais ne pas le faire équivaut à une perte. »
Pierre-Alexandre Billiet souligne que lorsqu’un maximum de magasins seront ouverts le dimanche, il n’y aura plus de création de valeur, mais uniquement des coûts supplémentaires et un marché stagnant.
Myriam Delmée, présidente du Setca, estime qu’il n’est pas nécessaire de rouvrir un supermarché le dimanche. « Nous sommes dans un schéma où, pour les magasins intégrés, on n’a presque plus le choix, mais on peut essayer d’encadrer la situation. » Manuel Gonzalez, permanent CNE commerce, affirme que « le syndicat ne peut qu’essayer de négocier les meilleures conditions. » Il regrette que chez Delhaize, les travailleurs n’aient pas eu ce choix. En revanche, Carrefour est en train de négocier les conditions de travail du dimanche, insistant sur la nécessité de rendre le travail le dimanche volontaire.

