Belgique

Bilan 2025 : De Wever et Bouchez, personnalités de l’année à Bruxelles

Bart De Wever a marqué l’année 2024 en réussissant à s’imposer dans l’opinion publique, y compris chez les francophones. Le gouvernement bruxellois a été sans gouvernement pendant 556 jours au moment d’écrire ces lignes, établissant un record.

Un nationaliste flamand au 16 rue de la Loi

Les deux analystes de la vie politique belge s’accordent à dire qu’une personnalité a véritablement marqué l’année : Bart De Wever. « Depuis l’image forte de son serment de fidélité au roi lors du vote de confiance à son gouvernement, soutenu presque à l’unanimité par la N-VA, il semble qu’un changement s’est opéré au niveau communautaire« , affirme Caroline Sägesser. Depuis les élections de 2024, le Premier ministre a réussi à s’imposer dans l’opinion publique, y compris auprès des francophones, contre toute attente. Thomas Gadisseux ajoute : « C’est son image de robustesse et de rigueur dans un monde en mutation qui fonctionne. Il incarne la continuité, un cap« .

Peut-on parler d’une « flamandisation » de la politique fédérale, comme redouté il y a un an ? « La réforme du chômage affecte davantage les Wallons, alors que la réforme des pensions en impactera plus la Flandre. C’est l’enchevêtrement de toutes les réformes qui déterminera si la Belgique a été ‘flamandisée’« , tempère l’intervieweur de Matin Première.

Cependant, même celui qui a refusé le pouvoir il y a dix ans n’est pas avide d’y rester, selon la chercheuse du CRISP : « Je ne suis pas sûr qu’il désire vraiment occuper cette fonction au-delà de 2029. On sent que cela lui pèse, il le dit lui-même. Le costume n’est pas si bien ajusté, surtout avec la dramatisation autour du budget et sa gestion des négociations. De plus, contrairement à ses prédécesseurs, il n’a aucune ambition internationale et rentrera avec plaisir à Anvers« .

© Belga / NICOLAS MAETERLINCK

Bouchez-De Wever, le tandem politique qui a rythmé l’année

Face à la stature « ferme et claire » de Bart De Wever, Georges-Louis Bouchez représente « tout l’inverse : le mouvement, l’agitation perpétuelle, l’opposition, la tactique« . Thomas Gadisseux décrit ainsi le président du MR, qui a marqué l’année en choisissant de ne pas intégrer le gouvernement fédéral pour poursuivre son combat politique. « C’est un peu problématique cette attitude vis-à-vis de la logique des institutions. Il est une personnalité proéminente de l’année, tout comme l’année précédente. Avant ou après les élections, Georges-Louis Bouchez reste toujours en mode campagne, pour son parti et pour lui-même« , indique Caroline Sägesser.

Concernant la dynamique entre le Premier ministre et le président du parti, les signaux politiques apparaissent confus, selon Thomas Gadisseux : « La combinaison des deux les renforce, mais le résultat est qu’on ne sait plus quand un accord politique existe en Belgique, ou quand les décisions sont encore valables. Depuis la formation du gouvernement, les négociations sont permanentes. En ce qui concerne le budget, au moment où nous parlons, certains éléments de l’accord ne sont toujours pas finalisés« .

Une crise historique au gouvernement bruxellois

À 556 jours sans gouvernement au moment où ces lignes sont écrites, la situation atteint un record.

Les journalistes et les historiens regrettent que la situation bruxelloise n’ait pas été prise en compte plus tôt par les partis politiques. « Nous n’avions pas anticipé cette crise, ni imaginé qu’elle durerait si longtemps« , avoue Caroline Sägesser. « Cependant, a posteriori, la conjoncture politique après les élections aurait sans doute exigé une attention particulière à Bruxelles : il y a eu un transfert de voix sans précédent des francophones vers les néerlandophones, l’élection de trois sièges pour la Team Fouad Ahidar, et des résultats très différents des autres régions du pays, où des alliances de droite et de centre-droit étaient déjà envisagées« .

Les justifications pour reporter les délais se sont accumulées : d’abord les élections communales, puis les négociations fédérales, suivies des budgets… « Quand le moment est venu de poser les bonnes questions, il y a eu un blocage total« , constate Thomas Gadisseux. Malgré les récentes tentatives de parvenir à un consensus, « le rendez-vous est manqué« , analyse-t-il. « La situation complexe à Bruxelles ne sera pas résolue. Il fallait une majorité suffisamment large pour faire évoluer les structures, revoir les institutions. Tout cela semble impossible en l’absence d’un socle commun assez fort« . Il est fataliste en ne voyant comme issue à cette crise que la prochaine échéance électorale : « On peut déjà prendre rendez-vous pour 2029« . D’ici là, d’autres personnalités pourront avoir accédé au devant de la scène.

Écoutez l’intégralité de ce débat dans le podcast du Monde en direct ci-dessus.