Bart De Wever ne donne pas d’explications sur le saut d’index.
Le Premier ministre teste l’idée d’un saut d’index auprès de ses partenaires de majorité, mais cette suggestion ne suscite pas l’enthousiasme du CD&V, de Vooruit et du MR. La dernière fois qu’un gouvernement a eu recours au saut d’index, c’était en 2015, sous Charles Michel, alors Premier ministre avec une majorité MR-N-VA-CD&V et Open Vld.
Un saut d’index menace-t-il les Belges ? D’après Het Laatste Nieuws, le Premier ministre envisagerait cette possibilité auprès de ses partenaires de coalition. Cette idée ne suscite déjà pas l’enthousiasme au sein du CD&V, de Vooruit, ni du MR, le vice-Premier ministre David Clarinval, interrogé par Le Soir, qualifiant cette option d' »inenvisageable ». Les syndicats s’élèvent également contre la suggestion du Premier ministre, la considérant comme une attaque sur le pouvoir d’achat, à quelques jours d’une manifestation nationale.
Le Premier ministre avance cette idée pour tenter de réduire un déficit budgétaire évalué à au moins 10 milliards d’euros. La dernière fois qu’un gouvernement a appliqué un saut d’index, c’était en 2015, sous le mandat de Charles Michel avec une coalition MR-N-VA-CD&V et Open Vld. D’autres gouvernements ont eu recours à ce mécanisme, notamment dans les années 80.
### L’indexation, de quoi s’agit-il ?
Cela fait plus d’un siècle que la Belgique bénéficie d’un système d’indexation automatique des salaires. Mis en place en 1920, ce mécanisme vise à adapter le pouvoir d’achat à l’évolution du coût de la vie. Il repose sur un indice, établi par le SPF Économie, basé sur le prix d’une série de biens et services. Quand cet indice augmente de 2% par rapport à la mesure précédente, il déclenche une indexation des salaires et des allocations. Depuis 1994, pour maintenir la compétitivité des entreprises, certains biens sont exclus de cet indice, donnant naissance à un “indice santé” qui ne prend plus en compte le tabac, les boissons alcoolisées, l’essence et le diesel. Des ajustements ont été faits à cet indice santé depuis 1994.
### Le saut d’index : de quoi parle-t-on ?
Parler de saut d’index signifie ne pas appliquer l’augmentation de 2% des salaires et allocations lorsque l’indice santé dépasse un nouveau seuil, un nouvel indice pivot. En conséquence, les salaires et allocations sont gelés jusqu’au prochain seuil, à moins qu’un nouveau saut d’index ne soit décrété par le gouvernement.
Prenons un exemple avec un salaire de 2000 euros. Normalement, une augmentation de 2% des prix entraînant une indexation devrait se traduire par 40 euros supplémentaires de salaire. Mais avec un saut d’index, le salaire reste à 2000 euros, entraînant une perte de pouvoir d’achat de 40 euros. Il faudra attendre le prochain dépassement d’indice pour une nouvelle indexation, mais les 40 euros de l’augmentation initiale sont définitivement perdus et ne seront pas pris en compte dans les futures indexations.
Les effets d’un saut d’index se font ressentir presque immédiatement là où l’indexation a lieu après le franchissement d’un indice pivot, comme dans la fonction publique, les allocataires sociaux et certains secteurs. En revanche, l’impact sera différé pour les secteurs où l’indexation se fait à des intervalles plus longs.
### Qu’est-ce que ça rapporte et à qui ?
Il apparaît clairement que le saut d’index entraîne une perte de pouvoir d’achat pour les citoyens dont les revenus, allocations ou pensions ne s’ajustent pas à l’évolution des prix. C’est pourquoi les syndicats défendent vigoureusement le mécanisme d’indexation automatique et s’opposent aux sauts d’index. On pourrait également soutenir que cette baisse du pouvoir d’achat amènera les consommateurs à diminuer leurs dépenses, ce qui pourrait générer moins de recettes fiscales (TVA) pour l’État.
Pourquoi un gouvernement envisagerait-il un saut d’index ? D’abord pour améliorer la compétitivité des entreprises, dans le contexte de l’écart salarial avec les pays voisins. Un saut d’index réduit cette différence entre les salaires d’une entreprise belge et ceux d’une concurrente française, allemande ou néerlandaise. « En théorie, des sauts d’index sont mis en œuvre lorsque l’inflation est suffisamment élevée pour que les entreprises ne peuvent plus intégrer les hausses des coûts salariaux dans leurs prix de vente », explique Bruno Colmant, économiste. Il précise que cette mesure est généralement appliquée en période de forte inflation, ce qui n’est pas le cas actuellement, « car l’inflation est revenue dans les limites fixées par la Banque centrale européenne, qui préconise une inflation autour de 2%. Nous sommes à 2% actuellement », note Bruno Colmant.
Lors de la dernière application d’un saut d’index sous le gouvernement Michel I en 2015, une des justifications avancées était que cela dynamiserait l’économie belge et contribuerait à la création d’emplois. Le gouvernement Michel I estimait qu’environ 33.300 emplois seraient créés d’ici 2019, en espérant que ces nouveaux emplois augmenteraient les recettes de l’État via des cotisations sociales. Cet objectif n’a pas été pleinement atteint, les entreprises ayant plutôt choisi d’affecter une partie des gains réalisés à leurs marges bénéficiaires plutôt qu’à l’embauche, selon une étude de la Banque Nationale.
Un autre motif invoqué pour appliquer un saut d’index est la promesse de réaliser des économies en réduisant les dépenses publiques. Avec ce mécanisme, les salaires et allocations ne sont pas augmentés de 2%, ce qui correspond à une somme que l’État – et les entités fédérées – ne doit pas verser aux fonctionnaires et allocataires sociaux.
Pour information, selon les prévisions du Bureau du Plan, le prochain dépassement de l’indice pivot pour les allocations sociales et les salaires du secteur public devrait se produire en janvier 2026, entraînant une indexation de ces revenus en avril 2026. À ce stade, aucun autre dépassement d’indice n’est attendu pour 2026.

