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Argentine : promesses de Milei aux Argentins après sa victoire, soutien de Donald Trump ?

Ce dimanche, le parti La Libertad Avanza de Javier Milei a gagné les élections législatives, à mi-mandat. La Bourse de Buenos Aires a d’ailleurs spectaculairement réagi ce lundi, son principal indice, le Merval, ayant gagné plus de 20% à l’ouverture.


Ce dimanche, le parti La Libertad Avanza (« La liberté progresse ») de Javier Milei a remporté les élections législatives de mi-mandat. « Aujourd’hui commence réellement la construction d’une grande Argentine. Faisons de nouveau de l’Argentine un grand pays! Et vive la liberté, bordel !! », a déclaré le président argentin, exprimant sa satisfaction d’avoir déjoué les sondages.

La victoire claire de ce parti, qui adopte un programme néolibéral et se rapproche du populisme d’extrême droite à la manière de Donald Trump, a réjoui le marché boursier de Buenos Aires.

Cela a également surpris certains observateurs de la politique argentine. « C’est assez rare qu’un président qui a gagné l’élection remporte aussi les élections intermédiaires législatives », explique Frédéric Louault, professeur de science politique à l’Université libre de Bruxelles et spécialiste de l’Amérique latine.

Comment comprendre le soutien de 40% des électeurs? Quelles seront les conséquences de la politique menée par un homme qualifié de « président fou » depuis son élection en 2023 ?

Les Argentins votent souvent en fonction des résultats économiques, note Frédéric Louault. « Si on observe le comportement électoral en Argentine, ce n’est pas si surprenant, car les indicateurs économiques sont quand même assez positifs », indique-t-il.

Après deux années de politiques néolibérales, parfois difficiles, comme la réduction des aides sociales ou la privatisation des services publics, y compris la police, la justice et la défense nationale, Javier Milei a convaincu grâce à son bilan économique.

Ce lundi, la Bourse de Buenos Aires a réagi de manière spectaculaire à l’annonce des résultats. Son principal indice, le Merval, a enregistré une hausse de plus de 20% à l’ouverture, tandis que le taux d’emprunt à dix ans a chuté de 14% à 10%.

« Il présente de bons résultats à court terme. On est quand même sur 5% de croissance. Et l’inflation a été limitée », rappelle le spécialiste de l’Argentine. Après un pic important au moment de son élection, l’inflation est aujourd’hui redescendue à un niveau inférieur à celui constaté il y a cinq ans.

Federico Rivas Molina, dans le Courrier international, évoque que « la crainte d’un défaut de paiement des obligations d’État argentines a poussé le président Javier Milei à s’en remettre à un éventuel sauvetage financier des États-Unis face à la dure loi du marché, impitoyable avec le peso argentin et la dette du pays ».

Donald Trump a promis une première tranche de 20 milliards pour stabiliser l’économie argentine, en manque de liquidités, à condition de la victoire électorale de Milei.

Avec un peso argentin sous pression face au dollar, Javier Milei savait qu’il jouait gros en cas de défaite.

Javier Milei progresse mais demeure le deuxième parti avec 93 députés contre 37 auparavant. « Il va devoir gérer l’opposition qui, pour l’instant, est un petit peu assommée, mais qui va certainement résister assez fortement. Surtout lorsque Milei va vouloir prendre de nouvelles mesures qui pourraient nuire aux intérêts de l’électorat de gauche, notamment les fonctionnaires et les personnes âgées qui sont à la retraite ».

Javier Milei a convaincu 40% des votants, mais un tiers de l’électorat ne s’est pas rendu aux urnes. « Ça minimise aussi son implantation dans la société argentine. D’autant qu’il y a une partie de la population qui a voté pour Milei pour des raisons strictement économiques, mais qui ne partage pas forcément son idéologie très radicale. »

De plus, plusieurs scandales de corruption ont entaché sa campagne électorale. « Il y a eu ces derniers mois plusieurs alertes, que ce soit au niveau de l’économie ou des scandales de corruption, qui montrent que cette victoire de Milei est beaucoup moins puissante qu’elle ne paraît à première vue ».

Le projet politique de Javier Milei reste situé à l’extrême droite. Pour célébrer sa victoire, Javier Milei a opté pour le costume et la cravate au lieu de sa veste en cuir habituelle. S’agit-il d’un signe ? L’outsider anarcho-capitaliste, connu pour son « plan tronçonneuse » visant à réduire les dépenses de l’État, a-t-il assoupli son discours depuis qu’il est au pouvoir ?

« Son objectif était même de détruire l’État, finalement. Là, il est revenu un petit peu sur cette ambition. Il est plutôt dans une ambition réformiste assez radicale », analyse Frédéric Louault.

« Il a gagné une minorité suffisamment forte pour avoir un soutien assez stable et forcer certains types de réformes qu’il a déjà enclenchées. Aller plus loin dans ce projet de réforme structurelle de l’économie sera sa principale priorité ».

Sa proximité idéologique avec le mouvement MAGA de Donald Trump reste donc intacte. « C’est presque ‘Make Argentina Great Again' ».

Électron libre, Javier Milei a néanmoins un projet à géométrie variable. Il vante le retour d’une Argentine prospère à la fin du XIXe siècle, tout en s’opposant à l’avortement et plaidant pour un libre marché de la drogue et des dons d’organes. « Ce qui n’empêche pas que, globalement, on peut classer Javier Milei comme un dirigeant d’extrême droite », rappelle le professeur de l’ULB.

Pour conclure, Caroline Vick, correspondante à Buenos Aires en Argentine, fait le point sur la situation dans Le Monde est en direct.