À Osaka, l’Expo 2025 veut croire à un futur harmonieux: sous la soucoupe belge, un monde en évolution
La princesse Astrid, en représentation du roi Philippe, et son mari, le prince Lorenz, se rendent ce lundi à l’Exposition universelle d’Osaka dans le cadre de la visite officielle qu’ils mènent actuellement au Japon. La Libre s’était rendue sur les lieux quelques jours plus tôt et s’était notamment arrêtée longuement au Pavillon belge. Récit de voyage.
- Publié le 07-06-2025 à 18h16

Sous un ciel hésitant de mai, le flot des visiteurs s’écoule avec méthode sur les allées immaculées de l’Expo 2025. Une discipline douce, presque chorégraphiée, rythme les déplacements des dizaines de milliers de curieux qui investissent chaque jour l’île artificielle de Yumeshima, dans la baie d’Osaka. « Comme pour les Jeux olympiques de Paris, il y a eu beaucoup de critiques », glisse Suki, guide professionnelle, en observant les files s’allonger devant les pavillons les plus courus. Les souvenirs de l’édition de 1970 – première du genre sur le sol japonais – restent ambivalents. Entre nostalgie d’une époque économique dorée et stigmates urbanistiques non cicatrisés, l’événement de cette année se devait de convaincre.
Et contre toute attente, il y parvient. « Il y a eu une inversion de tendance dans l’opinion. On est fier, maintenant. Le résultat est magnifique », sourit Suki. Si les débuts furent timides – la vente des billets a longtemps souffert d’une logistique laborieuse, les coûts de construction ont été jugés parfois exorbitants et l’intérêt a eu du mal à prendre –, le public japonais, d’abord sceptique, s’est approprié l’événement. Sur le site, les touristes étrangers restent rares, mais l’enthousiasme des habitants d’Osaka, Kyoto ou Tokyo suffit à faire vibrer les lieux.
Forza Italia
Devant le pavillon italien, une file serpente sous le soleil revenu, trois heures d’attente pour apercevoir une œuvre du Tintoret, le majestueux atlas Farnese ou encore un Caravage exceptionnellement prêté par le Vatican. « La grâce, cette combinaison d’intelligence et de créativité, c’est l’Italie », s’exclame Cécile, une visiteuse belge, visiblement peu affectée par l’attente. Elle dégusterait bien une gelato sur le toit labyrinthique du pavillon, sans doute l’un des plus vantés de l’expo. Mais avec les pluies torrentielles du matin, le point de vente n’est plus accessible. Sur le toit fleuri du pavillon, quelques membres du staff raclent les eaux laissées par l’averse matinale.
À quelques mètres de là, la Belgique aussi attire les foules. Sa « soucoupe volante » – surnom donné par la presse locale à l’étrange dôme futuriste – accueille jusqu’à 5 000 visiteurs par jour. Un succès inattendu pour un pavillon, conçu par l’architecte louviérois Cyril Rousseaux et qui entend dépasser les clichés. « Pour une fois, on réussit à mettre en avant nos cerveaux, pas seulement nos gaufres ou notre chocolat », soulignait à juste titre Pieter De Crem, commissaire du pavillon, lors d’une récente visite. À l’entrée, quatre murs végétaux hauts d’une dizaine de mètres, encerclent une sorte de fontaine à l’envers, d’où tombent quelques filins sur lesquels glissent, lentement, des gouttelettes d’eau. L’illustration de la pluie, fait remarquer une visiteuse.
Passé ce magnifique monument, bercé de musique japonaise traditionnelle, le dépaysement est total. Place aux technologies liés aux soins et à la santé. Celle qu’on a baptisée BeluBelu, sculpture anthropomorphe en matériaux composites, trône en son cœur, comme un symbole de l’excellence scientifique belge : robotique médicale, vaccins, intelligence cellulaire. Loin de la caricature, l’installation conjugue technologie, poésie et accessibilité. Sur le rooftop, la baraque à frites fait frémir les narines. Un air de Bruxelles flotte au-dessus d’Osaka, rehaussé de musique japonaise traditionnelle.
Une promenade avec vue panoramique
Au centre du site, un anneau en bois de 2,4 kilomètres surplombe l’ensemble de l’exposition. Depuis cette hauteur, le regard embrasse la diversité des pavillons, joyaux d’architecture, où l’outrance technologique – « trop d’écrans« , regrette un visiteur – côtoie des moments de grâce : un spectacle de marionnettes vietnamien, une danse traditionnelle malaise, une chanson venue d’Indonésie.
Loin d’une simple foire commerciale, l’Expo 2025 se veut aussi un message. Le Japon l’a placée sous le signe de la « concorde dans un monde confronté aux divisions » et de la « société du futur« , misant sur l’intelligence artificielle et les innovations spatiales. Quelque 160 pays et régions y participent, bien décidés à mettre en scène non seulement leurs savoir-faire, mais aussi leurs visions du monde de demain.
La Belgique, elle, mise sur son expertise médicale et scientifique, en écho à la présence annoncée de Peter Piot, épidémiologiste de renom. Pour renforcer ce lien entre cultures et générations, le pavillon belge a même recruté cinquante étudiants en japonologie, ambassadeurs improvisés d’une rencontre des mondes. Et pour souligner l’importance du moment, la princesse Astrid et le prince Lorenz sont attendus sur place le 9 juin, avant de rendre hommage à Nagasaki et de rencontrer l’empereur du Japon à Tokyo. Une présence royale en guise de pont symbolique entre mémoire, diplomatie et innovation.
Jusqu’au 13 octobre, Osaka vibrera donc au rythme de ces échanges multiples. Mais tous repartiront avec l’impression fugace, et précieuse, d’avoir entrevu un possible futur – à la fois technologique, sensible et humain.