« 80% des agriculteurs n’ont pas de successeurs : non au Mercosur »
Ce jeudi matin, quelque 200 tracteurs étaient déjà visibles, et les organisateurs attendent jusqu’à 500 engins au fil de la journée. Selon Florian Poncelet, « 80% des agriculteurs n’ont pas de successeurs » et « 10% ont moins de 35 ans ».
Ce jeudi matin, environ 200 tracteurs étaient déjà en place, et les organisateurs s’attendent à voir jusqu’à 500 véhicules au cours de la journée. Au total, 8 000 agriculteurs originaires de 25 pays européens sont annoncés, après des actions menées dès hier, notamment à l’aéroport de Liège. Les manifestants s’opposent à la signature imminente d’un accord commercial entre l’Union européenne et le Mercosur, qu’ils estiment menaçant des secteurs vulnérables tels que la viande bovine, la volaille et le sucre.
» Aujourd’hui, c’est vraiment pour que le Mercosur ne soit pas voté et aussi pour que le cadre financier plus réel soit revu à la hausse pour nous « , a déclaré Florian Poncelet depuis la place du Luxembourg. Il a ainsi souligné la double préoccupation des agriculteurs : le traité commercial et le budget de la PAC.
Pour les agriculteurs, le principal souci concerne les importations de produits » qui ne répondent pas à nos normes standards et qui ont un coût de production bien moins élevé que les nôtres « , insiste Florian Poncelet.
Bien que des clauses de sauvegarde et des règles de réciprocité aient été abordées au Parlement, le président des Jeunes Agriculteurs estime que ces garanties sont insuffisantes : » Le Parlement était d’accord avec ça, en majorité. Mais, au niveau du Conseil et de la Commission, ils ne veulent pas en tenir compte. Par conséquent, c’est un coup dans l’eau, encore une fois. »
La Wallonie est totalement contre. La Flandre est plutôt pour.
Le débat politique est tendu : la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, souhaite toujours signer le traité lors du sommet du Mercosur, mais l’aval des États membres est nécessaire. Selon Florian Poncelet, la Belgique elle-même est divisée : » la Wallonie est totalement contre. La Flandre est plutôt pour. Donc, du coup, la Belgique doit s’abstenir. » Pour la FJA, ce manque d’unité compliquera les décisions en Belgique et en Europe.
Les syndicats alertent sur la possible arrivée de » 99 000 tonnes » de bœuf en provenance du Mercosur et sur l’impact attendu sur le sucre et le poulet.
Les mesures de sauvegarde votées au Parlement ne rassurent pas tous les acteurs : » C’est comme toute clause habituelle. Ça va mettre beaucoup trop de temps à se ressentir. Le temps de réaction également. Donc, le mal sera fait. Ces clauses-là, c’est juste pour nous aider un peu, mais c’est clairement insuffisant « , résume Florian Poncelet.
Un autre sujet central de la mobilisation concerne l’architecture financière de la PAC, la Politique Agricole Commune. Les manifestants dénoncent une baisse prévue d’environ 20 % du budget, une compression qu’ils estiment insoutenable pour des exploitations déjà fragilisées par des années de crises successives. » Retirez 20 % au salaire de quelqu’un, vous verrez bien la tête qu’il va faire, ce n’est clairement pas normal « , alerte Florian Poncelet.
Pour lui, la PAC ne représente pas une simple aide : » De base, la PAC servait à ce qu’on devait produire, et la PAC nous servait de revenus. Aujourd’hui, sans les aides de la PAC dans une exploitation agricole, il n’y a clairement aucun revenu et il est tout simplement compliqué de produire. »
Florian Poncelet souligne également le risque d’un accroissement des inégalités entre États si la Commission laisse une large marge de manœuvre aux gouvernements nationaux pour compenser la baisse : » On est en train de faire des pays différents dans l’Union européenne. Donc, c’est un non-sens d’être tous les mêmes au niveau de la PAC. »
Au-delà des chiffres et des mesures, les manifestants partagent une inquiétude démographique : » 80 % des agriculteurs n’ont pas de successeurs « , rappelle Florian Poncelet, qui ajoute que » 10 % ont moins de 35 ans « .
Il considère que l’absence de perspectives économiques et de revenus stables décourage les jeunes à s’installer et compromet la transmission des exploitations.
Les discours politiques sur la relève, dépourvus d’engagement budgétaire concret, ne suffisent pas : » Le commissaire annonce vouloir doubler les générations et nous aider, mais il n’annonce pas de budget. Finalement, c’est assez compliqué. »
Interrogé sur la suite des événements si le Mercosur était approuvé, Florian Poncelet se montre prudent mais déterminé : » Ce qu’on va faire, je ne sais pas. Il faudra qu’on en discute. Mais j’espère que ce sera un non et que ce foutu Mercosur sera oublié. »
Et face à une mobilisation européenne massive, il avertit : » Si avec une mobilisation pareille, les infos ne remontent pas et ne font pas bouger les choses, je ne sais pas ce qu’on doit faire. »
Sur le plan local, le président de la Fédération des Jeunes Agriculteurs espère des mesures concrètes pour préserver les filières qu’il représente : » J’espère avoir un budget PAC fort, un soutien couplé fort et que le prix de la viande se maintienne, pour espérer se maintenir où on est aujourd’hui. »
Le bras de fer entre les institutions européennes, les États membres et les organisations agricoles s’annonce déterminant pour l’avenir des exploitations et pour la possibilité de transmettre les fermes aux générations futures.

