Guerre en Ukraine : le plan de paix américain ne progresse pas
Donald Trump avait fixé Thanksgiving Day, puis Noël pour parvenir à un accord sur le plan de négociations entre l’Ukraine et la Russie. A présent, la Russie contrôle plus de 19% de l’Ukraine, y compris la totalité de la Crimée, qu’elle a annexée en 2014.
Donald Trump avait fixé Thanksgiving, soit il y a un mois, puis Noël comme échéances pour parvenir à un accord. Cependant, cela fait plusieurs semaines que ce plan américain est en discussion, subissant de nombreux remaniements, avec des ajouts ou des suppressions de points, tout en laissant en suspens plusieurs questions concernant les territoires.
### Un plan qui n’est qu’un plan de négociations
Initialement, la première version du plan présentée par Trump en novembre comptait 28 points, jugés trop en phase avec les intérêts de Moscou. Dans ses révisions, le nombre de points a été réduit à 19, puis porté à 22 avec les contributions européennes. Actuellement, il est à 20 points, mais pourrait plutôt être décrit comme une liste de discussion.
Aujourd’hui, une certaine dynamique semble émerger dans les négociations de paix entre l’Ukraine et la Russie, avec un rôle central pour Washington et l’Europe cherchant à se positionner dans les pourparlers.
L’Ukraine, qui avait précédemment rejeté diverses propositions, participe maintenant à de nouvelles discussions basées sur une version refondue du plan de paix. Cependant, les perspectives d’une résolution rapide du conflit restent incertaines.
### Que va devenir le Donbass ?
Cette version floue du plan ne fournit pas de réponses précises sur l’avenir des territoires ukrainiens revendiqués par la Russie, prévoyant un gel de la ligne de front sans solution immédiate pour les revendications territoriales de Moscou, qui occupe plus de 19 % de l’Ukraine.
Pour rappel, la Russie contrôle la totalité de la Crimée, annexée en 2014, et revendique 90 % du Donbass, 75 % des régions de Zaporijjia et Kherson, ainsi que des portions des régions de Kharkiv, Soumy, Mykolaïv et Dnipropetrovsk.
Le Kremlin exige le contrôle total du Donbass, zones industrielles riches en ressources que les forces russes n’occupent pas même intégralement sur le plan militaire. Kiev, de son côté, refuse tout compromis territorial.
Concernant le point 14, l’Ukraine propose, en accord avec les États-Unis, la création d’une zone économique libre et démilitarisée dans le Donbass, administrée par l’Ukraine et sécurisée par des troupes internationales. Cette proposition nécessiterait un référendum, impliquant une cessation des combats pendant plusieurs mois.
À ce jour, aucune réaction officielle n’a encore été rapportée par la Russie, mais la présence de troupes occidentales dans le Donbass semble inacceptable pour Moscou.
### Le casse-tête de l’adhésion à l’Otan
Volodymyr Zelensky discutera dimanche avec Donald Trump des garanties de sécurité, portant sur la manière dont les Occidentaux, Américains et Européens pourraient protéger l’Ukraine en cas d’accord de paix avec la Russie. Une adhésion à l’Otan ?
Il est fait mention dans le point 5 d’un mécanisme similaire à l’article 5 de l’Otan concernant la défense mutuelle, sans pour autant préciser la présence de troupes étrangères sur le territoire ukrainien. Il ne faut pas oublier cette demande cruciale de Moscou : un engagement légal de l’Ukraine à ne pas rejoindre l’Otan, que la Russie considère comme l’une des causes de la guerre.
Cette question des garanties de sécurité est cruciale pour l’Ukraine. Les Ukrainiens se sentent trahis par le mémorandum de Budapest des années 1990, qui leur avait promis une protection en échange de l’abandon de leur arsenal nucléaire, une promesse non tenue.
Cette expérience explique la demande actuelle d’engagements fermes et légalement contraignants. Zelensky cherche notamment une garantie américaine approuvée par le Congrès, afin de rendre obligatoire une intervention des États-Unis en cas de nouvelle agression russe.
Cette exigence est l’un des points les plus inacceptables pour Moscou, car elle pourrait impliquer une présence militaire occidentale en Ukraine, que la Russie cherche depuis le début à éviter.
### Plus de flexibilité de la part de l’Ukraine
Le plan propose également, au point 2, un pacte de non-agression et un engagement des parties à ne plus utiliser la force militaire pour modifier les frontières convenues.
Il envisage encore une adhésion à l’Union européenne à moyen terme, avec une procédure accélérée qui ne correspond pas aux règles et au calendrier européens.
Le point 9 mentionne un accord sur un programme d’aide économique de 678 milliards d’euros, le coût estimé de la guerre, pour aider à la reconstruction de l’Ukraine.
Le point 10 propose un accord de libre-échange avec les États-Unis, une possibilité difficile à négocier si l’Ukraine devait rejoindre ultérieurement l’Union européenne et qui pourrait s’avérer être un cheval de Troie.
Ces questions doivent être abordées lors de la rencontre en Floride entre les présidents américains et ukrainiens, tout comme le sort de la centrale nucléaire de Zaporijjia, occupée par les soldats russes. Le point 12 imagine une cogestion entre l’Ukraine, les États-Unis et la Russie, sans précisions supplémentaires.
Du côté ukrainien, la reprise des discussions vise à montrer que Kiev est disposé à négocier et que le blocage ne provient pas d’eux. Le pays souhaite ardemment une fin au conflit, d’autant qu’il rencontre de grandes difficultés à maintenir son effort militaire face aux offensives russes. Une paix durable est un impératif vital. Kiev cherche également à convaincre Trump de sa bonne foi dans les négociations, en mettant la responsabilité de l’impasse sur Moscou.
Dans ce contexte, l’Ukraine fait preuve d’une plus grande flexibilité qu’auparavant sur certains sujets sensibles. Elle se dit prête, au point 18, à organiser des élections, bien que la loi ukrainienne prohibe cette démarche en temps de guerre.
### La popularité de Zelensky
Cette concession répond à l’argument selon lequel Zelensky ne serait plus légitime à l’issue de son mandat. Cependant, Kiev souligne qu’organiser des élections nécessiterait plusieurs mois de préparation et supposerait une trêve préalable.
Zelensky bénéficie d’un large soutien en tant que président de guerre, mais sa réélection n’est pas garantie en cas de scrutin libre.
Des figures militaires comme l’ancien commandant en chef Valeri Zaloujny ou Kyrylo Boudanov, le chef du renseignement militaire, pourraient représenter une concurrence. Cela n’enlève toutefois rien au fait que Zelensky reste, pour de nombreux Ukrainiens, le meilleur représentant du pays sur la scène internationale.
### Faiblesses diplomatiques américaines
Volodymyr Zelensky se déclarait optimiste en fin de semaine après les échanges avec les négociateurs américains nommés par Trump, Steve Witkoff, un magnat de l’immobilier et partenaire de golf du président, et Jared Kushner, son beau-fils.
En ce qui concerne Donald Trump, il est incertain s’il fixera une nouvelle échéance. Bien qu’il cherche un succès diplomatique rapide, son attention semble maintenant dispersée par d’autres problèmes internationaux comme la Chine et le Venezuela. Son manque de compréhension des réalités historiques et politiques du conflit ukrainien pourrait compliquer toute tentative de règlement rapide.
### La balle est à présent dans le camp de la Russie
Actuellement, aucun signal ne parvient de Russie indiquant un potentiel de concession. Le Kremlin indique que les informations disponibles sont en cours d’évaluation.
Au contraire, Vladimir Poutine multiplie ses apparitions en tenue militaire, se rend dans des postes de commandement de l’armée et affirme que la Russie maintient l’initiative sur l’ensemble du front. Il insiste sur le fait que la conquête complète du Donbass n’est qu’une question de temps. Un discours qui démontre que Moscou ne semble pas pressé d’obtenir un accord à court terme, préférant la voie militaire.
Un nouvel indice a toutefois été rapporté par le journal russe Kommersant, selon lequel Poutine aurait déclaré à quelques-uns des principaux hommes d’affaires russes, lors d’une rencontre à Moscou le 24 décembre, qu’il pourrait envisager d’échanger certains territoires ukrainiens contrôlés par ses forces contre l’ensemble du Donbass.
Zelensky conclut que cela prouve que Moscou n’a pas l’intention de mettre fin au conflit, d’autant que les bombardements russes sur l’Ukraine se sont poursuivis dans la nuit de vendredi à samedi.

